Zones à faibles émissions-mobilité : le gouvernement veut coordonner et accompagner
À l’issue d’un premier "comité des ZFE-m", qui se réunira désormais tous les semestres, Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, et Clément Beaune, ministre chargé des Transports, ont annoncé plusieurs mesures afin de favoriser la coordination des dispositifs et d’accompagner les collectivités et les Français à faire face aux nouvelles obligations. 150 millions d’euros du fonds vert seront ainsi fléchés vers les ZFE-m et les territoires conserveront bien le produit des amendes. Le dispositif de contrôle/sanction ne sera néanmoins pas disponible avant le second semestre 2024.
Obsédé – de l’aveu même de Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports – par la crainte que les zones à faibles émissions - mobilité (ZFE-m) se muent en "zones à forte explosion", le gouvernement a réuni ce 25 octobre les 43 agglomérations concernées au cours d’un "comité des ZFE-m". "Le premier d’une série", a précisé le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, puisque ce comité se réunira désormais deux fois par an, a-t-il annoncé à l’issue de la réunion. Une réunion au cours de laquelle "les échanges ont été extrêmement nourris, sur des questions pratiques, techniques, financières et politiques", a-t-il reconnu. Sans surprise, compte tenu des fortes attentes exprimées par les élus concernés (voir notre article du 7 octobre). Christophe Béchu a toutefois rappelé à maintes reprises que "la mise en œuvre de ces ZFE est à la main des collectivités – choix des zones, des véhicules, de l’amplitude horaire…" et qu’il n’était "pas dans l’optique du gouvernement de se substituer aux collectivités, mais de leur donner les moyens de faire". "Le rôle de l’État est double : une coordination assumée et un accompagnement", a complété Clément Beaune.
Favoriser la coordination
Côté coordination, un groupe de travail sur l’harmonisation des dispositifs des différentes ZFE-m sera mis en place. "L’État n’imposera rien de plus que ce qui est prévu par la loi Climat et Résilience, mais une harmonisation paraît souhaitable. Singulièrement pour les professionnels, notamment lorsque les zones sont proches, comme celles de Lyon, Saint-Étienne et de Grenoble, par exemple", relève-t-on au ministère. Comme l’a signalé Christophe Béchu, les modalités arrêtées sont déjà disparates, citant "Paris, où le dispositif ne s’applique ni la nuit ni le week-end, Lyon, où c’est 24h/24, ou Strasbourg, qui met en place un passe de 24 passages pour les petits rouleurs, indépendamment de la vignette".
Deux autres groupe de travail seront également lancés. Le premier portera sur "les questions d’accessibilité sociale". Et ce, afin qu’"à aucun moment, on ne puisse imaginer que cet impératif de santé publique, qui est impérieux, n’aurait vocation qu'à rétablir des péages ou des octrois à l’entrée de nos métropoles, avec des exclusions sociales des plus fragiles, puisque nous avons une surreprésentation de ménages modestes parmi ceux qui possèdent les véhicules les plus polluants", a pris le soin d’indiquer Christophe Béchu. Le second aura trait aux "ZFE maritimes", pour lutter contre la pollution induite par les navires. Enfin, "un Monsieur ou une Madame ZFE" sera désigné, interlocuteur unique qui sera le référent interministériel en lien avec les ministères des Transports, de la Santé, de l’Intérieur et les entreprises.
Accompagner les collectivités et les Français
Le volet accompagnement est double, visant les collectivités d’une part, et les Français d’autre part.
• Pour aider les collectivités à rendre le dispositif effectif, l’État développe un mécanisme de contrôle/sanction automatisé qui prendra la forme de radars lecteurs de plaques. Il ne sera toutefois pas disponible avant le second semestre 2024. "Ce qui ne veut pas dire qu’en attendant il n’y a pas de contrôle", a précisé Clément Beaune, invitant chacun à prendre ses responsabilités en la matière. Christophe Béchu a de son côté confirmé que "le produit des amendes sera intégralement conservé par les territoires mettant en place les ZFE".
L’accompagnement des collectivités sera également financier, le ministre indiquant que "le fonds vert comportera 150 millions d’euros de crédits fléchés vers les ZFE" – revenant ainsi définitivement sur la volonté précédemment exprimée de "ne pas segmenter ce fonds" (voir notre article du 14 septembre). Le fonds pourra financer, entre autres, des études d’analyse préalable ou d’évaluation ex post, des études d’ingénierie préalables, la mise en place de signalisation ZFE-m, des études et aménagements de voirie pour développer la marche et le vélo, y compris l’aménagement de stationnement vélo sécurisé.
Enfin, l’accompagnement sera pédagogique, avec "le lancement d’une campagne d’information en 2023".
• S’agissant des aides aux Français – le ministre ne détaillant pour l’heure que celles aux particuliers –, plusieurs annonces ont également été faites.
D’abord, le fait que la "surprime ZFE" à la conversion – une prime complémentaire de 1.000 euros réservée aux personnes habitant ou travaillant dans une ZFE-m – ne sera désormais plus conditionnée à la mise en place d’une prime locale par les intercommunalités soumises à ZFE.
Ensuite, la mise en place expérimentale, à partir du 1er janvier 2023 et pendant deux ans, d’un prêt à taux zéro pour l’acquisition d’un véhicule à faibles émissions "dans les métropoles en dépassement des valeurs limites pour la qualité de l’air". "Il pourra atteindre 30.000 euros, sera cumulable avec les autres aides et concernera également la location longue durée et le retrofit", a précisé Christophe Béchu. S’agissant de l’élargissement au rétrofit, la mesure, promue par amendement du député Jean-Luc Fugit, a été votée ce 24 octobre dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023. Le ministre a par ailleurs précisé que le ministère travaillait à la mise en œuvre d’une garantie de l’État afin de favoriser le déploiement de ce prêt.
Enfin, le ministre a confirmé, conformément aux annonces du président de la République, que le bonus écologique à l’achat de véhicules à faibles émissions sera porté de 6.000 à 7.000 euros pour les 50% des ménages les plus modestes.
Pas plus vite que la musique
"Quand vous mettez bout à bout l’ensemble des dispositifs, l’effort est incomparable en Europe", a tenu à souligner Clément Beaune, chiffrant l’aide au verdissement du parc automobile à "10% des 12 milliards" de l’ensemble de l’effort budgétaire 2023 consacré aux transports. Un effort d’autant plus important que "la part du parc diesel en France – plus de la moitié – est sans équivalent", a précisé Christophe Béchu. Ce dernier a par ailleurs déclaré que si le gouvernement est "totalement déterminé à aller vers la fin des véhicules thermiques en 2035, vers l’exclusion au fur et à mesure du temps des véhicules les plus polluants, il faut juste le faire en ayant conscience que, en mettant trop vite en place, par exemple, un dispositif de leasing social [annoncé pour la fin 2023], sauf à vouloir subventionner de manière massive la filière électrique chinoise qui produit des véhicules dans des usines à charbon, les conséquences climatiques à court terme ne seraient pas favorables".
Les zones à faibles émissions ou à faibles émissions-mobilité (ZFE ou ZFE-m), qui visent à interdire progressivement les véhicules les plus polluants, se mettent en place en ordre dispersé, avant leur généralisation, prévue par la loi, le 31 décembre 2024 dans les 43 agglomérations de plus de 150.000 habitants de France métropolitaine. Elles concernent d'ores et déjà 11 agglomérations françaises, dont les premières ont été Lyon, Grenoble et Paris. Les conditions sont variables selon les agglomérations : les périmètres se limitent à l'hypercentre ou englobent la majorité de l'agglomération, le rythme d'application et les aides financières changent, les deux-roues sont concernés ou non. |