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Y a-t-il assez de logements en France ?

 "Les conditions de logement en France" analysées par l'Insee tendraient à montrer que, s'il n'y a pas assez de logements en France, il y en a en tous les cas beaucoup plus qu'il y a 50 ans. Ils sont aussi plus confortables... et beaucoup plus chers. Radioscopie en 220 pages des modes d'habiter français.

L'Insee publie son étude sur "Les conditions de logement en France". Elle exploite les résultats de l'enquête logement 2013, qui a déjà donné lieu à plusieurs études et publications sectorielles (voir par exemple notre article ci-dessous du 18 juin 2015). Les résultats complets de l'enquête logement 2013 ont eux-mêmes été publiés il y a moins d'un an (voir notre article ci-dessous du 8 avril 2016). L'étude sur les conditions de logement a toutefois le mérite de proposer une vision globale de la situation - et plus particulièrement de l'évolution depuis trente ans -, ainsi que plusieurs focus sur des thèmes particuliers.

Le retour du collectif

Côté global, on retiendra surtout un certain nombre d'évolutions significatives. Ainsi, après l'attirance pour la maison individuelle - très liée au baby boom et à l'effet "repoussoir" de certains grands ensembles des années soixante -, on observe, depuis 2008, un repli de la construction de maisons individuelles au profit des appartements, signe d'un possible changement des comportements que l'Insee explique par les coûts environnementaux du transport automobile, le vieillissement de la population, mais aussi l'importance des gains de productivité permis par la concentration des activités.
Autre phénomène, lié lui aussi au vieillissement de la population : la mobilité résidentielle tend à se réduire, avec une tendance très marquée entre les enquêtes logement de 2006 et de 2013 et tout particulièrement dans le secteur social.
En revanche, l'écart de prix entre l'agglomération parisienne et le reste de la France ne s'est pas réduit : alors qu'il est de 8,8% pour l'ensemble des prix à la consommation, il est - à caractéristiques comparables - de près de 25% pour le logement.

Depuis 1968, +28% pour la population, +76% pour les résidences principales

L'étude de l'Insee donne également des éléments de réponse à une question très politique : y-a-t-il assez de logements en France ? Contrairement à l'opinion courante, la réponse penche plutôt vers le oui. De 1968 à 2013, le nombre de résidences principales a progressé de 76% (et même 80% pour le parc total de logement), alors que la population métropolitaine progressait seulement de 28%... Le taux d'occupation des résidences principales diminue de façon continue, sous le double effet du vieillissement démographique et des recompositions familiales (qui nécessitent davantage de logements). Le nombre de mètres carrés par personne est passé de 31 en 1984 à 40 en 2006 et reste stable depuis lors.
De même, le confort de base des logements s'est très nettement amélioré. En 2013, seuls 1% des logements manquent du confort sanitaire de base et 3% (incluant les précédents) présentent plus d'un défaut grave d'isolation thermique, d'étanchéité ou d'installation électrique. Pour sa part, le surpeuplement a été divisé par deux entre 1984 et 2006 (et s'est stabilisé depuis à 8%).

Plus de propriétaires, mais un logement de plus en plus cher

Côté propriété, le taux de ménages propriétaires occupants est de 58% en métropole et atteint même 75% à l'âge de la retraite, mais le contraste reste toujours aussi fort entre les locataires d'appartements (75% des locataires) et les propriétaires de maisons individuelles (80% des propriétaires)...
Le bât blesse en revanche sur le coût du logement. Si la proportion de locataires en situation d'impayés de loyers ou de charges (4,5%) est restée inchangée entre 2006 et 2013, les difficultés de remboursement d'emprunt touchent désormais 11,5% des accédants, contre 8,9% en 2006. On pourrait y ajouter les ménages qui se trouvent en situation de précarité énergétique. Ces évolutions s'expliquent par la crise économique et le chômage, mais aussi par le fait que les dépenses de logement des locataires ont nettement augmenté depuis le milieu des années 80. L'écart de revenus s'est creusé entre propriétaires et locataires. Ainsi, en 2013, les 10% de ménages les plus pauvres sont très largement locataires (à 74%), "ce qui n'était pas le cas trente ans plus tôt".

Locataire à vie dans le parc social ?

Outre cette vision d'ensemble, l'étude de l'Insee propose quatre focus thématiques. Le premier porte sur la situation des locataires. Elle montre en particulier que cette situation est plus durable dans le secteur social que dans le secteur libre. Une évolution qui s'explique notamment par le vieillissement de la population du logement social et par l'écart croissant de revenus entre propriétaires et locataires. Conséquence mécanique : la réduction des sorties du secteur social conduit à une saturation de ce secteur et entraîne, à son tour, un vieillissement de sa population.
Le second focus traite du recul de l'accession à la propriété depuis la crise de 2008, malgré une capacité moyenne d'achat à crédit qui reste supérieure à celle des années 1970-1980. Du coup, les ménages non propriétaires ont aujourd'hui moins de chance d'accéder à la propriété, même si les nouveaux propriétaires sont aujourd'hui plutôt aisés, jeunes et en couple.

Pourquoi déménage-t-on ?

Troisième focus : les déterminants de la mobilité résidentielle. Environ un ménage sur cinq a changé au moins une fois de résidence entre 2009 et 2013, les plus jeunes étant aussi les plus mobiles. Sans surprise, le taux de mobilité résidentielle est beaucoup plus élevé chez les locataires du secteur libre (48,5%) et du parc social (20,8%) que chez les propriétaires (8,2%). Ces mobilités résidentielles sont très liées aux évolutions familiales, mais aussi aux transitions professionnelles.
Enfin, le dernier focus porte sur les déterminants du statut d'occupation des logements et de la mobilité résidentielle des 2,7 millions de ménages immigrés. Elle met en évidence que ces ménages sont beaucoup plus souvent locataires que les non-immigrés, ce qui s'explique notamment par un âge plus jeune, une concentration dans les zones urbaines, mais aussi des revenus plus faibles. Mais plus l'installation en France est ancienne, plus les ménages immigrés deviennent comparables aux ménages non-immigrés en matière de logement.

 

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