Transports - Véhicules électriques : Rambouillet se pose en territoire d'expérimentation
C'est un territoire étendu, peu dense, niché dans un écrin de verdure, où les habitants se disent sensibles à l'écologie. Et où - problème récurrent dans de nombreuses villes moyennes - l'offre de transports en commun est rare et concentrée sur l'hyper-centre. Chaque foyer y a en moyenne deux véhicules, la dépendance est donc forte à l'automobile et les accès à la gare sont régulièrement embouteillés. De là à engager un tournant et à oser miser davantage sur la mobilité électrique, il n'y a qu'un pas que la communauté d'agglomération Rambouillet Territoires (Yvelines) tente justement de franchir.
Une stratégie de petits pas
Mais elle le fait en douceur : la stratégie adoptée est celle des petits pas. Le premier fut franchi il y a deux ans. Pour montrer l'exemple, Rambouillet a remplacé les véhicules diesel de sa flotte par des Bluecar électriques de Bolloré. Et ce ne fut pas seulement pour soulager son bilan carbone. "L'intérêt de ces véhicules électriques n'est pas que dans leur motorisation mais dans les mille et une façons de les partager. Nous élargissons le cercle et comptons prêter ces véhicules le week-end à des associations", annonce Jean-Christophe Attard, directeur général des services à Rambouillet Territoires. Seconde étape : attirer les entreprises et habitants. Fin 2015, la collectivité a laissé Orange équiper de technologies de remontées d'informations en temps réel quatre autres véhicules très basiques (livrés en kit !) qu'elle a achetés à la jeune pousse France Craft. "Ces sortes de golfettes utilitaires se rechargent en quatre heures, un plateau ou une benne peuvent être installés à l'arrière. Leur confort est spartiate mais suffit pour leur usage. De plus, ils n'ont pas coûté cher à la collectivité. Pour multiplier les retours d'expérience, nous les mettons à disposition des agents de la vingtaine de communes de l'agglomération", poursuit-il. Les usages sont logistiques, mais avec une dimension sociale : la Croix-Rouge y a recours pour approvisionner un monastère accueillant non loin des migrants. "Notre marque de fabrique est aussi d'associer dans ces expérimentations les usagers, du début à la fin, pour qu'ils testent nos véhicules et donnent leurs avis. En ressortent des idées de nouveaux usages. A partir d'une question posée, deux autres surgissent ! Les industriels apprécient ces retours du terrain. Et les habitants, auprès qui de nous faisons oeuvre de pédagogie pour ne pas qu'ils aient l'impression d'être des "cobayes", également.
Cerner les futurs usages du véhicule autonome
Autre entente : avec Greenovia, un cabinet-conseil du groupe La Poste spécialisé dans l'éco-mobilité, Rambouillet déploie une cinquantaine de bornes de recharge de véhicules électriques. Rare candidat francilien au dispositif de l'Ademe d'aide à l'installation d'infrastructures de recharge, elle a bénéficié, en incluant celle de la Région, de 80 % de subventions. "La borne nous revient à 2.000 euros, il aurait été dommage de passer à côté d'une telle occasion ! Dès ce printemps, nous maillerons ainsi le territoire", ajoute Jean-Christophe Attard. Enfin, avec Continental, Renault, la RATP, des laboratoires et des PME, Rambouillet teste les premières solutions de mobilité en zone peu dense qui mettent en œuvre les technologies du véhicule autonome : "Elles sont éprouvées, mais il faut les confronter à la vie réelle et cerner les futurs usages. Pour ce projet à 7 millions d'euros, nous attendons l'appui du fonds unique interministériel FUI 21. C'est au printemps que le ciel devrait se dégager", pressent Jean-Christophe Attard.
Morgan Boëdec / Victoires-Editions
L'Ademe vante les potentiels du véhicule électrique
L'Ademe vient de publier un avis sur les potentiels du véhicule électrique pour la transition énergétique des transports. Elle rappelle d'abord que si ces véhicules sont encore minoritaire dans le parc roulant, avec 17.268 immatriculations en 2015, (près de 1% des ventes de véhicules neufs), le marché se développe assez fortement puisque l'an dernier, les ventes ont augmenté de 65% par rapport à 2014. Pour la première fois, les particuliers ont aussi représenté la majorité (près de 60%) des acheteurs. L'agence rappelle les principaux atouts des véhicules électriques par rapport à leurs homologues thermiques : contribution à une moindre dépendance des transports routiers à l'égard du pétrole importé, réduction de la facture énergétique du pays, baisse des émissions de gaz à effet de serre, amélioration de la qualité de l'air en ville grâce à des émissions nulles à l'échappement, réduction des nuisances sonores. Si à l'achat, le véhicule électrique reste globalement plus cher que le véhicule thermique, (majoritairement en raison du coût de la batterie), son usage permet des économies significatives car le coût de l'électricité, de l'entretien et généralement de l'assurance sont moindres, souligne l'Ademe. Il devient économiquement viable à partir d'un kilométrage quotidien (de 50 à 80 km) et d'une fréquence d'utilisation permettant d'amortir l'investissement initial. Ainsi, poursuit l'avis de l'Ademe, il sera "d'autant plus intéressant sur les plans économiques et environnementaux qu'il sera utilisé intensément, par exemple pour des trajets domicile-travail quotidiens importants lorsque le véhicule individuel est nécessiare en absence de transports en commun, dans le cadre de flottes partagées de véhicules d'entreprises, pour des livraisons de marchandises en ville, pour des services de mobilité (autopartage)". Pour l'Agence, le véhicule électrique permet aussi d'accélérer la transition vers de nouveaux modes de déplacement optimisant l'utilisation du véhicule et n'imposant plus sa possession. Couplé à l'utilisation du numérique, il ouvre la voie à de nombreuses possibilités d'innovations, à commencer par le véhicule autonome. En outre, estime l'Ademe, les véhicules électriques peuvent faire plus que de la mobilité puisque leurs batteries offrent des capacités de stockage d'énergie utiles pour contribuer à la régulation du réseau électrique et au développement des énergies renouvelables. "La mise sur le marché de véhicules électriques peut être accompagnée de services énergétiques pouvant être valorisés économiquement et permettant de structurer l'offre d'électromobilité en retour, avance l'Ademe. Pour minimiser son impact sur le réseau électrique, il est primordial de mettre en place des systèmes de gestion intelligents de la charge prenant à la fois en compte les contraintes d'utilisation mais également celles du réseau". Enfin, l'Agence estime que l'électromobilité doit se concevoir comme "un écosystème à part entière, qui associe contructeurs automobiles, opérateurs de recharge, fournisseurs de service, utilisateurs...". "Il s'agit d'une véritable filière dont la pertinence économique et la viabilité environnementale devront apparaître dans une approche systémique", conclut-elle. Anne Lenormand