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Carte militaire - Une "mission de contrôle" pour quoi faire ?

Cela ressemble à une redite de la carte judiciaire : les élus s'inquiètent du manque de dialogue qui entoure la réforme militaire et se montrent sceptiques quant au rôle de la "mission de contrôle".

Les élus de petites villes se montrent dubitatifs sur le rôle de la mission de contrôle installée par l'Assemblée nationale pour accompagner la réforme de la carte militaire. "Le contrôle de l'action du gouvernement par le Parlement est une bonne chose et c'est légitime, mais nous ne savons pas bien ce que cette mission va contrôler ; s'agit-il d'une caution pour la mise en place du Livre Blanc ?", s'interroge Michel Vergnier, le député-maire de Guéret (Creuse), référent de l'Association des petites villes de France (APVF). Une réaction qui intervient au lendemain des déclarations des deux députés désignés pour cette mission de contrôle, l'UMP François Cornut-Gentille et le socialiste Bernard Cazeneuve. Expliquant leur rôle, mercredi 12 juin, ces derniers se sont notamment engagés à veiller "avec beaucoup d'attention" à ce que la réforme soit équitable et assortie "d'une véritable politique d'accompagnement" pour les collectivités locales. C'est la première fois, ont-ils souligné, qu'une mission s'intéressera, a priori, à une question relevant de pouvoirs régaliens. Encore marqués par l'épisode de la carte judiciaire, les maires, qui déplorent le manque de concertation du gouvernement dans cette nouvelle réforme, se demandent ce que les deux députés attendent pour les recevoir. "Est-ce que ça les intéresse de nous entendre ?, s'interroge Michel Vergnier. Lors des Assises de l'APVF à Figeac il y a quinze jours, j'ai pu m'entretenir avec Bernard Cazeneuve sur cette question mais, depuis, on reste sans nouvelles."

"La concertation, c'est à nous de la demander"

En tant que chef des armées, Nicolas Sarkozy doit présenter le 17 juin le Livre blanc fixant les priorités stratégiques de la France pour les quinze années à venir. Les restructurations induites par ce document et la révision générale des politiques publiques (RGPP) menée parallèlement doivent être dévoilées dans la foulée, probablement durant la première quinzaine de juillet. Chaque maire concerné sera alors individuellement reçu au ministère de la Défense. Un dialogue a déjà été entamé depuis plusieurs semaines avec les associations d'élus, mais ces derniers ne disposent pour l'heure que des informations contenues dans un pré-rapport de l'état-major de l'armée de Terre, divulgué dans la presse début avril, où il est question de supprimer une trentaine de garnisons. Encore ne s'agissait-il là que de l'armée de Terre. Car, au total, une cinquantaine de sites sur les 450 communes comptant une implantation pourraient bien fermer. Fin mai, le président de la République a notamment évoqué la fermeture supplémentaire d'une quinzaine de bases aériennes. "Nous ne remettons pas en cause le bien-fondé de cette réforme, le problème c'est qu'on ne nous dit rien dans le détail, regrette Michel Vergnier. On nous parle de concertation et de transparence, or la concertation, c'est à nous de la demander." De fait, après avoir interpellé le gouvernement le 6 mai sur la perspective de la suppression de 130 postes à Guéret, l'édile s'est simplement vu rétorquer par  le secrétaire d'Etat aux Anciens combattants, Jean-Marie Bockel, que "si cette hypothèse devait se confirmer - ce qui n'est pas le cas pour le moment - nous examinerions, comme nous le faisons lorsque des territoires ruraux sont particulièrement touchés, tous les aspects d'un tel déplacement en matière d'aménagement du territoire et d'activités".
Les maires ont reçu le soutien des sénateurs socialistes qui, vendredi, ont demandé dans un communiqué que le gouvernement "présente publiquement l'inventaire des sites" et ont déploré "l'absence de dialogue".


42.000 postes sont amenés à disparaître

L'inquiétude est d'autant plus vive chez les élus que les fermetures envisagées concernent essentiellement des territoires éprouvés par les restructurations, comme dans le quart Nord-Est. Au total, 42.000 postes sont amenés à disparaître (9.000 rien qu'en Lorraine), au rythme de 6.000 départs par an. Et avec eux, c'est tout un pan de l'économie locale qui risque d'en pâtir, s'inquiètent les élus. "A Commercy, une ville de 7.000 habitants dans la Meuse, 700 postes devraient être supprimés, ce sera lourd à porter", indique Michel Vergnier. "Certes, la Défense n'a pas vocation à faire de l'aménagement du territoire, comme le rappelle Nicolas Sarkozy, mais nous voulons connaître les mesures de compensation." Selon l'APVF, une quinzaine de petites villes seraient visées parmi lesquelles Bourg-Saint-Maurice, Briançon, Noyon, Senlis, Bruz ou Givet. L'Association des maires de France (AMF) est elle aussi montée au créneau pour demander "un plan d'accompagnement permettant de compenser les préjudices financiers et économiques subis par les communes à travers la création d'un fonds spécifique". Pour éviter de reproduire le scénario de la carte judiciaire, le gouvernement tente de réagir. Le secrétaire d'Etat à l'Aménagement du territoire Hubert Falco travaille de pair avec Hervé Morin pour trouver des solutions. Il a notamment évoqué la création d'un fonds interministériel, sans préciser son mode de financement. Le ministère de la Défense a pour sa part confié à un cabinet un audit des grandes entreprises susceptibles d'être intéressées par une implantation sur les sites laissés vacants.

 

Michel Tendil