Logement - Une circulaire précise la mise en œuvre du plan de prévention des expulsions locatives
Une instruction du 22 mars 2017 - signée des ministres des Affaires sociales, de l'Intérieur, du Logement, des Familles et de la Lutte contre l'exclusion - précise les modalités de mise en œuvre du plan interministériel pour la prévention des expulsions locatives, présenté il y a un an (voir notre article ci-dessous du 31 mars 2016). L'instruction rappelle que le nombre de décisions de justice prononçant l'expulsion du locataire pour impayé de loyers a augmenté de 80% depuis le début des années 2000, pour atteindre 126.946 décisions en 2015, tandis que le nombre total d'expulsions effectivement réalisées avec le concours de la force publique passait de 5.936 à 14.127 sur la même période.
Inverser la tendance
La circulaire juge "primordial d'inverser cette tendance et de recentrer la prévention en amont du jugement, afin de limiter au maximum le recours à l'expulsion". En dépit de son intitulé, elle couvre un champ plus vaste que le seul plan de 2016, puisqu'elle aborde aussi des réformes et dispositifs antérieurs, comme la charte de prévention des expulsions ou la réforme des Ccapex (commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives) (voir nos articles ci-dessous).
Elle recommande de "concentrer l'intervention du dispositif et des acteurs en amont de l'audience et particulièrement avant le début de la procédure judiciaire elle-même, de façon à limiter le recours au jugement d'expulsion aux seules personnes de mauvaise foi". La mise en œuvre des procédures prévues par la loi Alur du 24 mars 2014 doit être facilitée par le recours à l'application Exploc, qui soulage les services d'une partie du travail de gestion des dossiers individuels en permettant des échanges dématérialisés.
Deux objectifs opérationnels
En termes de stratégie, l'instruction interministérielle fixe deux objectifs opérationnels. Tout d'abord, identifier les ménages menacés d'expulsion le plus en amont possible et leur assurer une prise en charge socio-juridique adaptée. Il s'agit en l'occurrence de faire en sorte que la Ccapex puisse s'appuyer sur un réseau coordonné d'acteurs, afin d'orienter les personnes signalées vers un premier diagnostic partagé de la situation entre travailleur social et juriste. Pour cela, il est préconisé de mettre en place une ou des antennes de prévention des expulsions, animées notamment par l'Adil sous l'égide de la Ccapex, qui pourraient assurer des permanences d'accès aux droits. La circulaire recommande également la mise en place d'un processus coordonné des signalements entre les services sociaux et ces antennes de prévention des expulsions.
Le second objectif opérationnel consiste à permettre l'apurement de la dette et à garantir le maintien ou le relogement avant l'audience des personnes signalées. Pour cela, la circulaire recommande notamment d'articuler la prise en charge de la dette entre les acteurs concernés et de définir une procédure spécifique adaptée à l'apurement en urgence avant ou durant la période du commandement de payer.
Davantage de coordination avec les magistrats
Parallèlement à la saisine des dispositifs d'apurement et sur la base du diagnostic initial qui lui a été transmis, la Ccapex devra saisir les bailleurs sociaux et privés du département, afin de trouver une solution de relogement en urgence. Par ailleurs, la circulaire prévoit qu'une politique spécifique au parc social sera définie, "afin de tendre vers un objectif 'zéro expulsion sans relogement' pour les locataires qui y demeurent". Enfin, la circulaire demande de garantir la coordination avec les magistrats et l'effectivité de la prévention en aval de la décision de justice.
Le pilotage national et le suivi de ces orientations seront assurés par le pôle national de prévention des expulsions placé auprès de la Dihal (délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement). Ce pôle national s'appuiera sur un réseau de référents désignés dans chaque administration centrale, ainsi que sur un réseau de référents locaux désignés dans chaque préfecture.
Références : instruction LHAL1709078C du 22 mars 2017 relative à la mise en œuvre du plan interministériel pour la prévention des expulsions locatives.