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Social - Une circulaire de la Justice et du Budget pour lutter contre la fraude aux prestations sociales

Après la tenue du Comité national de lutte contre la fraude (CNLF), le 5 mai dernier, le gouvernement franchit une nouvelle étape dans la lutte contre la fraude aux prestations sociales avec la publication d'une circulaire adressée à la fois aux magistrats des parquets et aux directeurs des caisses nationales des principaux régimes (Cnam, Cnaf, Cnav, MSA et RSI), ainsi qu'au directeur de Pôle emploi. Cette circulaire "invite l'autorité judiciaire et les organismes sociaux à définir conjointement leurs stratégies d'action pour mieux lutter contre la fraude, avec l'objectif d'assurer la cohérence et la lisibilité de l'action publique". L'objet de cette instruction inhabituelle par ses destinataires communs est "de renforcer la coordination des différents intervenants, afin d'améliorer l'efficacité de la réponse pénale en matière de fraude aux prestations sociales". Elle ne vise pas, en effet, les erreurs dans les déclarations de ressources, mais la fraude organisée, en particulier de la part de délinquants. Le communiqué conjoint de la ministre de la Justice et du ministre du Budget cite d'ailleurs expressément l'exemple "des trafiquants de stupéfiants percevant illégalement le RMI en dissimulant leurs revenus occultes liés à la drogue". Nombre de travailleurs sociaux des départements peuvent témoigner de cas similaires, même s'ils sont peu nombreux.
Pour lutter contre ce type de fraude, la circulaire estime que deux conditions doivent être remplies. La première consiste à "mieux faire connaître aux parquets les spécificités de l'organisation et fonctionnement des organismes de sécurité sociale, des fraudes sociales dont ils peuvent être victimes et les pouvoirs ou procédures propres dont ces organismes disposent pour prévenir, détecter et sanctionner les fraudes". La seconde condition, à l'inverse, consiste à faire en sorte que les organismes sociaux soient à même de "prendre en compte les spécificités de la procédure pénale, les contraintes de l'institution judiciaire". Outre un exposé des différents dispositifs mis en place et des principales références juridiques, la circulaire rappelle que "la culture de la transmission de l'information doit être permanente chez tous les acteurs de la lutte contre la fraude". Elle invite par conséquent les organismes sociaux à "se rapprocher des parquets afin de définir conjointement une stratégie d'action". Parallèlement, elle invite les magistrats des parquets à "systématiser la transmission aux organismes sociaux des informations tirées des procédures menées à l'encontre des trafiquants des quartiers sensibles lorsque les éléments des enquêtes font apparaître que ceux-ci bénéficient indûment de prestations sociales, afin que toutes les conséquences financières en soient rapidement tirées". Cette circulaire s'inscrit ainsi dans la stratégie plus vaste - exposée par le chef de l'Etat dans son discours du 28 mai, lors de la réunion avec les principaux acteurs de la sécurité, de la chaîne pénale et de l'Education nationale - consistant à mieux prendre en compte le volet financier de la délinquance. A noter : la circulaire propose, dans son annexe 3, une intéressante typologie des différentes fraudes sociales. Celle-ci montre que les départements, dont plusieurs prestations sont versées par les Caf, sont loin d'être à l'abri de ce phénomène, y compris dans sa dimension de délinquance organisée.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence : ministère de la Justice, ministère du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique, circulaire (non datée) relative à la lutte contre la fraude aux prestations sociales.