Social - Contrôle des prestations par les CAF : des progrès à confirmer
Deux années de suite - en 2007 et 2008 - la Cour des comptes s'est déclarée dans l'impossibilité de certifier les comptes de la branche famille. Très critique vis-à-vis de la gestion de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), la Cour mettait notamment en avant les carences de l'audit interne, le manque de rigueur dans l'analyse des risques, le suivi laxiste des dépenses d'action sociale (notamment pour le financement des modes de garde de la petite enfance) et l'absence de répertoire national des bénéficiaires d'allocations. Face à cette situation, la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) et la commission des affaires sociales du Sénat se sont saisies de la question. Elles viennent de remettre leur rapport, intitulé judicieusement "Les comptes de la branche famille pourront-ils être certifiés cette année ?". Une interrogation à laquelle les auteurs se gardent d'ailleurs de répondre, afin de ne pas paraître forcer la main à la Cour des comptes.
Le rapport passe néanmoins en revue l'ensemble des dispositions prises par la branche famille pour redresser la situation et répondre aux observations de la Cour. Le bilan apparaît plutôt positif, dans la mesure où "la Cnaf et le réseau des CAF ont pris clairement la mesure du défi qui leur était adressé ; des engagements précis et adaptés ont été pris ; la mobilisation des dirigeants et des personnels a été incontestable et à la hauteur de l'enjeu". Tout en relevant un certain retard dans le lancement du chantier du répertoire national des bénéficiaires (RNB), les rapporteurs constatent néanmoins que celui-ci devrait être pleinement opérationnel à partir de juin 2009. De même, le répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS), qui croise les fichiers des différentes branches, devrait être progressivement déployé en 2009-2010. Basé sur le NIR (le numéro d'inscription au répertoire géré par l'Insee et souvent appelé à tort le "numéro de sécurité sociale"), le RNB n'est cependant pas sans limites, même si celles-ci ne remettent pas en cause l'intérêt de l'outil. Le rapport constate ainsi "l'existence d'un 'matelas' incompressible d'allocataires et d'ayants droit pour lesquels il n'est pas possible d'établir un numéro d'identification au répertoire". Il s'agit en pratique de certains ressortissants étrangers pour lesquels se pose la question du document officiel permettant d'établir la filiation des enfants (ces documents étant le plus souvent dans la langue d'origine et parfois d'une fiabilité incertaine), mais aussi des étudiants étrangers, le plus souvent originaires de l'Union européenne. Ces personnes se voient donc généralement attribuer un "pseudo-NIR". Le rapport constate au passage que les difficultés de certification des NIR proviennent souvent "des insuffisances manifestes dans la tenue de l'état-civil dont la responsabilité n'incombe en aucun cas aux caisses, s'agissant d'une compétence de l'Etat". Au 31 décembre 2008, pour les 30,5 millions de bénéficiaires de la branche famille, 29 millions de NIR avaient néanmoins été certifiés, tandis que 1,5 million - soit 5% du total - "posaient un problème en cours de résolution".
Le rapport se félicite aussi de la mise en place de nouveaux outils de maîtrise des risques et de gestion des crédits d'action sociale, même si le processus doit encore "aller jusqu'à son terme". Tout en constatant la hausse régulière des cas de fraude identifiés grâce au renforcement des contrôles (6.314 cas en 2007 pour un montant total de 58 millions d'euros, contre 1.654 cas et 18 millions d'euros en 2004), la Mecss et la commission des affaires sociales du Sénat se prononcent "pour une diffusion plus large de la culture de lutte contre la fraude au sein de la branche famille". Le rapport prend toutefois soin de rappeler que les fraudes constatées ne représentent que 0,1% du total des prestations servies par la branche famille.
Jean-Noël Escudié / PCA