Finances locales - Un passage à la TIPP flottante pourrait diminuer les ressources des régions
Alors que le prix du baril se rapproche des 100 dollars US, le rétablissement de la TIPP "flottante" revient sur le devant de la scène : quelles en seraient les conséquences sur le budget des régions, pour qui la TIPP est un des principaux outils d'autonomie financière ?
La taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) est la principale taxe perçue en France sur certains produits pétroliers utilisés en tant que carburant ou combustible de chauffage. Depuis le 1er janvier 2006, les ressources de TIPP attribuées aux régions "sont constituées par l'attribution d'une fraction de tarif de la taxe intérieure sur les produits pétroliers perçue sur les quantités de supercarburants sans plomb et de gazole vendues aux consommateurs finals sur le territoire de la région ou de la collectivité territoriale de Corse" (article 52 de la loi de finances pour 2005). En outre, depuis le 1er janvier 2007, les régions ont la possibilité de voter un taux spécifique sur les trois carburants (SP 95, SP 98, gazole).
La TIPP "flottante" avait été instituée en octobre 2000 et supprimée en juillet 2002. Ce mécanisme permettait au gouvernement de moduler la TIPP pour réduire la volatilité des prix du carburant à la pompe.
En effet, les principaux droits d'accise perçus sur la consommation des produits pétroliers sont la TIPP et la TVA. Or la TIPP est fixée en fonction des volumes et la TVA est proportionnelle au prix.
Une part de TVA ?
Aussi, lorsque le cours du pétrole augmente, le produit de la TVA augmente mécaniquement. Dans le cas d'une TIPP "flottante", si l'augmentation du cours dépasse un certain pourcentage, la TIPP est diminuée de manière inversement proportionnelle à l'augmentation de la TVA. Il en résulte une stabilité des prix du carburant à la pompe. Inversement, et suivant le même mécanisme, les ressources issues de la TIPP sont revalorisées lorsque le cours du pétrole brut est de nouveau orienté à la baisse, les bénéficiaires de cette TIPP, dont les régions, récupérant alors les ressources concédées en période d'inflation. Toutefois, pour que le système fonctionne, il faut que les périodes de baisse et de hausse s'équilibrent à long terme.
Restaurer la TIPP "flottante" conduirait à une diminution des ressources des régions alors que l'Etat bénéficierait d'une croissance de ses ressources issues de la TVA. La solution pour maintenir les ressources des régions serait que l'Etat renonce, à leur profit, à une partie des fonds issus de la TVA.
A défaut, les régions pourraient utiliser le mécanisme de modulation de la part régionale dans la TIPP totale prévu dans l'article 84 de la loi de finances rectificative pour 2005. En pratique, certaines régions ne pourraient recourir à cette possibilité, ayant déjà procédé à une modulation maximale de leur tarif de TIPP. Pour le moment, le Premier ministre, François Fillon, a exclu de proposer "des mesures qui viseraient à baisser artificiellement le prix" des carburants, écartant implicitement la restauration de la TIPP "flottante" au motif que l'augmentation des prix du pétrole est inexorable.
Jordane Mathieu / Cabinet de Castelnau