Citoyens - Un décret modernise la gestion de l'état civil
Un décret paru le 10 mai dernier précise certaines des règles relatives à l'établissement des actes de l'état civil par les mairies. Il permet l'application de plusieurs dispositions de la loi de modernisation de la justice du 21e siècle qui visent en particulier à encadrer la gestion informatique de l'état civil.
Les communes qui gèrent l'état civil au moyen d'une solution informatique devront respecter plusieurs conditions fixées par un décret paru au Journal officiel le 10 mai. Leur logiciel devra "être hébergé sur un site distinct de celui où sont tenus les registres des actes de l'état civil" et "être mis en œuvre sur des infrastructures conservées dans des locaux répondant à des conditions de sécurité et de sûreté adaptées". En outre, la commune devra pouvoir mettre à jour les données en moins de 24 heures et permettre le transfert du registre au service d'archives compétent. Un arrêté du ministre de la Justice fixera plus précisément les conditions techniques "de sécurité, d'intégrité et de confidentialité" des logiciels de gestion de l'état civil et les conditions de leur hébergement.
Le contrôle du traitement automatisé mis en œuvre par la commune et de son hébergement relève du procureur de la République. Comme pour les registres de l'état civil, ce dernier peut, "à tout moment" procéder à ce contrôle. Si la commune enfreint l'une des règles, le procureur de la République "adresse une demande de mise en conformité assortie d'un délai de mise en œuvre qui ne peut excéder trois mois".
S'agissant de l'organisation de l'hébergement, une grande latitude est accordée à la commune : soit elle décide d'assurer elle-même cette fonction, soit elle la délègue (au département, ou à la région, ou à un établissement public de coopération intercommunale ou encore "à toute personne morale de droit public de son choix"). Sous certaines conditions, la commune ou son délégataire peut confier cette mission à une personne morale de droit privé.
Lors du dépôt du projet de loi sur la Justice du 21e siècle - devenu la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la Justice du 21e siècle -, le gouvernement constatait que "la majorité des communes détiennent des données d'état civil sous format informatique et utilisent celles-ci en dehors de tout cadre juridique pour l'édition des actes de l'état civil". Il pointait "des risques" concernant la conservation des données d'état civil. Ce sont, en effet, aujourd'hui des prestataires privés, qui proposent l'hébergement de ces données aux collectivités locales. Mais aucun niveau d'exigence n'a été fixé à l'égard de ces prestataires, observait-il.
Plus qu'un seul registre au format papier
Les communes qui répondent aux critères fixés par la réglementation pourront faire une demande de dispense d'élaboration des registres de l'état civil en double exemplaire et d'envoi au greffe du tribunal de grande instance des avis de mention apposés sur les actes. En effet, en cas de disparition de leur registre de l'état civil, elles pourraient le reconstituer au moyen de leurs données numériques. Si elle est acceptée, la dispense prendra effet au 1er janvier de l'année qui suit celle de la demande.
Le gouvernement de Manuel Valls évaluait qu'un millier de communes, principalement les plus grandes seront concernées par la dispense. Ces communes gèrent environ 80% des actes de l'état civil. La mesure devrait leur permettre d'économiser quelque 2,4 millions d'euros sur leurs frais de papier, d'affranchissement et de reliure. Mais l'Association des archivistes français et la Fédération française de généalogie ont tiré la sonnette d'alarme au moment de la discussion du projet de loi au Parlement. Pas convaincues de la fiabilité de la conservation au format numérique des actes de l'état civil, elles estiment que la disparition du double du registre fait peser un risque sur la pérennité de l'état civil.
La fin de l'obligation de tenue des actes de l'état civil en double exemplaire rendait obligatoire la réécriture des dispositions réglementaires sur l'établissement des registres et sur leur reconstitution en cas de disparition (vol, incendie…). Le décret procède à ce toilettage. En outre, en application de l'article 53 de la loi du 18 novembre 2016, le décret détermine le contenu et les conditions de délivrance des copies intégrales et des extraits des actes de l'état civil.
Vérification des données: une nouvelle étape s'ouvre
Autre point important, le décret complète le cadre de l'utilisation de la plate-forme de communication électronique des données de l’état civil, dite "Comedec".Créé par un décret de février 2011, l'outil permet la vérification par les mairies des données de l'état civil (à leur initiative ou à la demande d'un organisme). Les usagers sont ainsi dispensés de la production d'un acte de l'état civil dans certaines de leurs démarches administratives. Le décret du 6 mai 2017 précise notamment que l'utilisation de la plate-forme est gratuite pour les communes. Simple faculté pour la plupart des communes, l'usage de Comedec sera, au plus tard le 1er novembre 2018, une obligation pour "les communes sur le territoire desquelles est située ou a été établie une maternité".
Via le décret, l'Etat "s'engage", dès ce 10 mai, et ce pendant une période de sept ans, à verser annuellement une aide à ces communes. Elles recevront une aide de l'Etat qui sera calculée "au prorata des vérifications effectuées au profit des notaires et à partir d'un seuil minimal". Les modalités de calcul et de versement de cette aide par l'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) seront précisées par un arrêté du ministre de la Justice.
Rectification des erreurs: mode d'emploi
On retiendra encore que le décret fixe dans le code de procédure civile la liste des erreurs ou omissions purement matérielles auxquelles l'officier de l'état civil peut apporter une rectification, le cas échéant. Il dispose que "l'officier de l'état civil, détenteur de l'acte comportant l'erreur initiale procède aux rectifications entachant cet acte". Il est aussi précisé que le procureur de la République territorialement compétent pour procéder à la rectification administrative des erreurs et omissions purement matérielles des actes de l'état civil et à l'annulation des actes irrégulièrement établis est "le procureur de la République du lieu où a été établi l'acte comportant l'erreur ou l'omission initiale ou l'acte irrégulièrement dressé".
Ces précisions interviennent à la suite de l'article 55 de la loi du 18 novembre 2016, qui a simplifié et clarifié la procédure de rectification matérielle des actes de l'état civil. La mesure autorise l’officier de l'état civil à procéder directement aux rectifications les plus simples sans devoir attendre les instructions du procureur de la République. En sachant que ce dernier "peut toujours faire procéder à la rectification administrative des erreurs et omissions purement matérielles des actes de l'état civil". Ces dispositions sont entrées en vigueur le 11 mai 2017.
Les autres dispositions du décret s'appliqueront à compter du 1er novembre prochain.
Référence: décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 relatif à l'état civil.