Fiscalité locale - Taxe foncière : et si 2014 marquait un frein à la hausse, après le dérapage enregistré depuis des années ?
Cette année encore, la présentation à la presse des résultats de l'observatoire des taxes foncières sur les propriétés bâties de l'Union nationale de la propriété immobilière (Unpi) est l'occasion pour son président, Jean Perrin, de dénoncer un "dérapage insupportable de la taxe foncière" entre 2008 et 2013. Mais aussi – c'est une nouveauté – d'espérer des jours meilleurs à la faveur des premières données de 2014.
Entre 2008 et 2013, la taxe foncière a augmenté de 21,26% en moyenne sur le territoire français (voir détail en encadré). Une hausse jugée "exorbitante" due au cumul de deux augmentations : celle des valeurs locatives, assiette de l'impôt, par la loi de finances (majoration forfaitaire de 9,65% en cinq ans), et celle des taux d'imposition décidés et votés par les élus locaux (+ 10,65% en moyenne). Si on inclut la majoration légale des valeurs locatives, les parts départementales de taxe foncière ont augmenté en moyenne de 24,49% et celles du bloc communal de 18,42%.
Tout ceci est jugé "insupportable", notamment parce que, calcule l'Unpi, la hausse de la taxe foncière est très supérieure à l'inflation (estimée à 5,87% par l'Insee durant la période) ; très supérieure à la hausse des loyers du secteur privé (estimée à environ 7,05% par l'observatoire Clameur) ; et très supérieure à la hausse des salaires (le smic horaire brut a, par exemple, augmenté de 11,73% entre 2008 et 2013).
Seul 13 départements ont augmenté leur taux en 2014
L'Unpi se félicite toutefois que "les premières tendances pour 2014 traduisent un effort de modération des départements comme des communes". Elle espère y voir une tendance durable, fruit d'une "prise de conscience" des pouvoirs publics qui ne serait pas sans rapport avec son action de lobbying en faveur des propriétaires de logement. "A l'avenir, l'augmentation de la taxe foncière ne doit résulter que de la revalorisation annuelle des bases d'imposition, à l'exclusion d'une hausse des taux d'imposition", estime-t-elle, réitérant sa demande de "bloquer les taux de taxe foncière".
En 2014, seul 13 départements ont augmenté leur taux, selon l'observatoire qui travaille à partir de données de la Direction générale des impôts. "Ils ont donc eu beaucoup moins recours au levier fiscal qu'en 2013, où 36 départements avaient augmenté leur taux", se félicite l'Unpi, notant qu'un département a même légèrement diminué son taux de taxe foncière, le Morbihan (-2,02%). Au total, le taux départemental moyen a augmenté de 0,16% en 2014 contre + 1,24% entre 2012 et 2013.
En un an, la taxe foncière a beaucoup moins augmenté dans les grandes villes
Sur 46 grandes villes dont l'observatoire a eu les données 2014, 8 villes (ou leurs groupements) ont augmenté leur taux de taxe foncière, contre 10 en 2013. Par ailleurs, le coefficient de majoration appliqué aux valeurs locatives en 2014 est beaucoup faible que les années précédentes : les valeurs locatives, assiette de la taxe foncière, n'ont été augmentées que de 0,90%, contre 1,80% entre 2012 et 2013.
Au final, dans ces 46 grandes villes, la taxe foncière a beaucoup moins augmenté entre 2013 et 2014 (+1,15%) qu'entre 2012 et 2013 (+2,99%). Entre 2013 et 2014, c'est à Marseille que la taxe foncière a le plus augmenté (+ 5,97%), "en raison du fait que le taux de la communauté urbaine de Marseille a doublé", explique l'Unpi. Loin derrière, on trouve Courbevoie (+ 2,37%) et Créteil (+ 2,15%), chacune de ces villes ayant légèrement augmenté leur taux communal.
Enfin, au Mans et à Metz, les augmentations constatées (la taxe foncière y a augmenté respectivement de + 1,92% et de + 1,84%), s'expliquent par une légère hausse à la fois des taux du bloc communal et du taux départemental.
En bas de tableau, le taux des groupements de communes auxquels appartiennent
Grenoble et Roubaix ont légèrement diminué. La taxe foncière n'y a donc, majoration des valeurs locatives comprise, augmenté que de 0,75% et 0,77%.
Valérie Liquet
Quelques données de l'observatoire
Taux d'imposition départementaux : La Guyane est, en 2013, le département au taux le plus élevé (32,92%), suivi du Gers (32,86%), de l'Aisne (31,72%), et de l'Aude (30,69%). En bas de tableau, le département de Paris applique le taux le plus faible (5,13%), suivi de deux autres départements franciliens, les Hauts-de-Seine (7,08%) et les Yvelines (7,58%). "Les taux de la Guyane ou du Gers sont plus de six fois supérieurs à ceux du département de Paris", note l'Unpi appelant toutefois à "relativiser ces écarts" dans la mesure où les valeurs locatives des immeubles, qui constituent l'assiette de la taxe foncière, sont à surface égale moins fortes dans le Gers par exemple qu'à Paris.
Evolution des cotisations départementales - Sur l'ensemble du territoire, les cotisations "départementales" (*) payées par les contribuables ont augmenté en moyenne de 25,99% entre 2008 et 2013 (ou de 24,49% si on prend en compte le nombre de communes par département). Les cotisations départementales qui ont très peu augmenté se situent en Guadeloupe (+ 9,00%), en Martinique (+ 9,03% en moyenne), en Guyane (+ 10,28%), dans l'Orne (+ 10,30%), en Savoie (+ 10,45%), ou encore dans les Bouches-du-Rhône (+10,75%). "En réalité, les cotisations départementales de taxe foncière n'y ont progressé qu'en raison de la revalorisation annuelle des valeurs locatives", reconnaît l'Unpi.
Taux cumulés de taxe foncière - Les taux cumulés de taxe foncière (taux département + taux du bloc communal) s'élèvent en 2013, en moyenne, à 36,76% sur l'ensemble du territoire. Les taux des départements sont en moyenne plus élevés (19,76%, en tenant compte du nombre de communes par département) que les taux du bloc communal (16,99%). Avec de forte disparité. C'est à Fontanes-de-Sault, dans l'Aude, que les taux d'imposition ont été les plus élevés en 2013 (98,80%). Et Neuilly-sur-Seine demeure en 2013 la commune où les taux de taxe foncière sont les plus bas (9,98%). A noter que les taux d'imposition sont assis sur la valeur locative des immeubles et donc "pour une même surface de bâti, les propriétaires fontanans ne payent donc pas nécessairement dix fois plus de taxe foncière que les propriétaires neuilléens", rappelle l'Unpi.
Evolution 2008-2013 de la taxe - Sur l'ensemble du territoire, la taxe foncière a augmenté en moyenne de 21,26%. Parmi les bénéficiaires de la taxe foncière, les départements ont en général davantage augmenté leurs taux (+ 13,54%) que les communes ou groupements de communes (+ 8,00%). Si on inclut la majoration légale des bases d'imposition, les cotisations départementales de taxe foncière ont globalement augmentée de 24,49%, contre 18,42% pour les parts du bloc communal. L'augmentation la plus spectaculaire a été constatée à Tavaco, en Corse-du-Sud (+ 133,78%, majoration des bases d'imposition comprise). A l'inverse, dans 70 communes la taxe foncière a diminué, les plus fortes diminutions ayant été constatées à Festigny, dans la Marne (- 31,22%), Punerot, dans les Vosges (- 20,85%), et Les Grandes Loges, dans la Marne (- 19,64%).
Les taux dans les grandes villes - Les taux de taxe foncière (hors TEOM) dans les cinquante villes les plus importantes de France s'élèvent à 40,72%. Cette moyenne est supérieure de presque quatre points à la moyenne nationale (36,76%). C'est à Amiens que les taux cumulés de taxe foncière (département + bloc communal) sont les plus forts en 2013 (55,87%). Le Havre arrive en seconde position (54,36%), suivie de Grenoble (54,00%), exaequo avec Angers, et de Caen (53,79%). En bas de tableau, ce sont quatre villes franciliennes qui concentrent les taux les moins élevés : Courbevoie (12,34%), Paris (13,50%), Boulogne-Billancourt (15,09%), et Nanterre (19,13%). Si on prend en compte la TEOM, c'est au Havre que les taux d'imposition en 2013 sont les plus forts (68,21%), suivie de Nîmes (67,71%), de Tourcoing (65,71%) et d'Amiens (65,40%). A l'inverse, les villes aux taux les plus bas sont Courbevoie (15,24%), Boulogne-Billancourt (19,62%), Paris (19,71%) et Nanterre (22,60%). En dehors de l'Ile-de-France, il s'agit de Villeurbanne (34,22%) et de Lyon (35,05%)
La taxe dans les grandes villes - La taxe foncière a augmenté, entre 2008 et 2013 en moyenne de 21,21% dans les grandes villes, soit dans une proportion comparable à celle du reste du territoire (+ 21,26%). C'est à Paris que l'augmentation de taxe foncière (hors TEOM) a, de loin, été la plus forte (+ 68,23%). "Plus que la hausse du taux communal, c'est la création en 2009 d'un taux départemental qui explique cette forte augmentation", note l'Unpi, "Paris demeure cependant la deuxième grande ville aux taux de taxe foncière les plus faibles". C'est à Aix-en-Provence que la taxe foncière a le moins augmenté (+ 10,65%). La taxe foncière "Teom comprise" a quant à elle augmenté en moyenne de 20,35% dans les 50 plus grandes villes de France. Paris arrive toujours en tête de classement (+ 48,54%). Puis vient Courbevoie (+ 36,38%). En bas de tableau, on retrouve Nîmes, (+ 11,44%), puis Nanterre (+ 12,07%), Fort-de-France (+ 12,35%), Strasbourg (+ 13,18%) et Bordeaux (+ 13,36%).
(*) Pour rappel, en 2011 la part régionale de taxe foncière a été transférée au département. Pour évaluer l'augmentation des cotisations "départementales", l'observatoire de l'Unpi compare d'un côté, les taux départementaux de 2013, et de l'autre, les taux additionnés des départements et des régions en 2008.