Sécurité des élus : en commission, les députés approuvent la proposition de loi d'origine sénatoriale
La proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux, que le Sénat a adoptée en première lecture en octobre, arrive à l'Assemblée nationale. La discussion a commencé ce 31 janvier lors d'une réunion de la commission des lois. Celle-ci a notamment renforcé les sanctions contre les auteurs de violences contre les élus.
En matière de protection des élus, "nous laisserons aux sénateurs la priorité du véhicule, nos propositions auront vocation à enrichir par voie d'amendements la proposition de loi [du sénateur Jean-Noël Buffet]", que le Sénat a adoptée le 10 octobre en première lecture, avait indiqué en décembre le député Sébastien Jumel, en présentant le rapport de la mission d'information sur le statut de l'élu local, créée par la délégation aux collectivités territoriales de l'Assemblée nationale.
Avec ses collègues de la commission des lois, le député communiste de Seine-Maritime a tenu parole. Sur ce texte sénatorial d'une quinzaine d'articles, inscrit par le gouvernement à l'ordre du jour des travaux de l'Assemblée nationale, la commission a adopté, ce 31 janvier, pas moins de 36 amendements. Les objectifs poursuivis : sanctionner plus lourdement les auteurs de violences contre les élus, mieux protéger les familles des élus et des candidats, fluidifier les relations entre les maires et les autorités judiciaires, ou encore améliorer la prévention de la délinquance à l'échelle locale.
Des peines plus lourdes
"Ces violences [contre les élus], nous ne devons pas et nous ne pouvons pas les laisser perdurer, il en va de l'essence même de notre démocratie", avait déclaré au début de la réunion la rapporteure, Violette Spillebout (Renaissance). En précisant que "dans six cas sur dix, ces élus agressés sont des maires".
Les amendements retenus prévoient que les peines seront alourdies lorsque les victimes sont d'anciens élus. Les sanctions seront également plus lourdes pour les atteintes aux biens présentant un danger pour les personnes, et ce quels que soient les élus visés (aujourd'hui, la circonstance aggravante n'intervient que pour les membres des exécutifs locaux).
Les atteintes à la vie privée visant les élus, les candidats à un mandat, ou les membres de leur famille pourront aller jusqu'à deux ans d'emprisonnement et 60.000 euros d'amende. De plus, en cas d'outrage contre un élu, le juge pourra prononcer une peine de travaux d'intérêt général (TIG).
Des relations plus étroites avec le parquet
Pour encourager le développement de conventions entre les associations d'élus locaux, les préfets et les procureurs, en vue d'une meilleure information des maires sur le traitement judiciaire des infractions à l'encontre des élus, la proposition de loi affirme expressément cette possibilité.
Les députés ont par ailleurs réintroduit dans le texte la faculté pour le procureur de la République de disposer d’un espace de communication réservé dans les bulletins d'information municipaux des communes de plus de 1.000 habitants. Les sénateurs avaient supprimé cette disposition de la proposition de loi.
Mieux prévenir et lutter contre la délinquance
La commission a aussi adopté plusieurs amendements pour améliorer le fonctionnement des conseils locaux ou intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD et CISPD). L'un d'eux prévoit l'obligation de désigner un "agent coordinateur" ayant pour mission d'assister le maire qui préside l'instance. Si la collectivité ne procède pas à la nomination de cet agent – faute de moyens financiers, par exemple – le préfet sera contraint de mettre un agent de l'Etat à la disposition du CLSPD. D'autres mesures prises par les députés concernent la composition des conseils de sécurité et de prévention de la délinquance : des citoyens tirés au sort participeront systématiquement à leurs travaux, de même que les maires des communes membres de l'intercommunalité (pour ce qui des CISPD).
Les députés ont aussi prévu que le gouvernement remette au Parlement plusieurs rapports, notamment sur "l'opportunité d'élargir le bénéfice de la protection fonctionnelle à tous les élus locaux" et sur "le bilan des suites données aux plaintes déposées par les élus auprès des services de police ou de gendarmerie pour des faits de violences dont ils sont victimes".
Proposition de loi sur le statut de l'élu local
La proposition de loi "regroupe les dispositions législatives nécessaires à la mise en œuvre de certaines mesures du plan" de prévention et de lutte contre les violences aux élus, que le gouvernement a présenté le 7 juillet dernier (voir notre article dédié), a rappelé la rapporteure. En soulignant aussi que le texte constitue "le volet sécurité d'un ensemble plus large de mesures, législatives ou réglementaires, qui doivent permettre une rénovation profonde du statut de nos élus". Des améliorations que l'Assemblée veut apporter, via une proposition de loi qui sera prochainement déposée conjointement par Violette Spillebout et Sébastien Jumel, les deux rapporteurs de la mission d'information sur le statut de l'élu local.
Sur les neuf premiers mois de 2023, "2.387 faits" de violence envers les élus ont été recensés, "ce qui conduit à anticiper une hausse encore de 15% de ces faits par rapport à 2022", a indiqué la députée du Nord.
La proposition de loi d'origine sénatoriale renforçant la sécurité des élus locaux sera examinée dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale à partir du 6 février.