Insertion - RSA : une expérimentation "sous pression", prélude à la réforme des minima sociaux
En adoptant définitivement, le 1er août 2007, le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (Tepa), l'Assemblée nationale et le Sénat ont ouvert le champ d'une expérimentation institutionnalisée du revenu de solidarité activité (RSA), destiné à remplacer à terme le RMI. Au total, 25 départements - dont 15 se sont déjà fait connaître et 10 devraient se porter candidats avant octobre 2007 - devraient participer à l'expérimentation. Lors de leur passage devant le Parlement, les articles de la loi Tepa relatifs au RSA n'ont pas fait l'objet d'amendements significatifs. La seule modification importante, à l'initiative du Sénat, concerne la possibilité de prendre en compte, dans le calcul du montant du revenu différentiel qu'est le RSA, les prestations et aides locales ou extralégales dont peuvent bénéficier par ailleurs les allocataires. Il est toutefois peu probable que les départements expérimentateurs, déjà confrontés à la mise en place d'un dispositif complexe, se saisissent massivement de cette possibilité.
Le recours de l'opposition devant le Conseil constitutionnel ne portant pas sur les dispositions relatives au RSA, l'expérimentation va donc pouvoir débuter dès la rentrée. Il s'agira toutefois d'une expérimentation "sous pression". Dans la lettre de mission à Martin Hirsch, en date du 9 juillet 2007, le chef de l'Etat ne cache pas son souhait "que le revenu de solidarité active soit créé au plus tard à la fin de l'année 2008 et si possible avant". Cette généralisation annoncée fait plutôt de l'expérimentation une période de rodage, qui devrait permettre d'affiner les modalités du dispositif, sans en modifier les principes directeurs.
Ce délai sera cependant très utile pour avancer dans la réforme des minima sociaux. Reléguée au second plan par la mise en place de l'expérimentation du RSA, celle-ci demeure le cadre dans lequel doit s'inscrire cette expérimentation. Nicolas Sarkozy a en effet chargé le haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté "de transformer en profondeur les minima sociaux et la prime pour l'emploi, afin que le retour à l'emploi soit toujours plus rémunérateur que le maintien dans l'assistance, et que le travail donne à tous la garantie de sortir et d'être protégé de la pauvreté". Cet objectif ambitieux - doublé de celui d'une réduction de la pauvreté de 30% en cinq ans - suppose de s'attaquer à plusieurs questions délicates. Faut-il harmoniser ou envisager une véritable fusion de tout ou partie des actuels minima sociaux ? Comment rapprocher les minima sociaux, sachant que certains sont plus favorables que d'autres (par exemple l'API par rapport au RMI) et que l'AAH devrait faire l'objet d'une revalorisation significative ? Comment mettre en oeuvre l'objectif affiché de retour à l'emploi ? Autant de questions qui devraient alimenter débats et réflexions. Une question concerne plus directement encore les collectivités territoriales, et plus spécialement les départements. Le RMI/RSA est en effet le seul minimum social axé sur le retour à l'emploi et les collectivités locales sont les mieux placées, avec le service public de l'emploi, pour assurer l'accompagnement des bénéficiaires. Dans ces conditions, vers qui pourrait-on se tourner demain pour accompagner, par exemple, les allocataires de l'API ?...
Jean-Noël Escudié / PCA