Social - RMI et prestations familiales ont pris du retard sur le revenu médian

En pleine préparation du Grenelle de l'insertion, la dernière étude de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) ne passera pas inaperçue. Elle met en évidence une conséquence de l'indexation des prestations et des minima sociaux sur l'inflation. Celle-ci permet en principe de garantir le maintien du pouvoir d'achat des bénéficiaires de ces prestations en alignant le montant de ces dernières sur l'évolution des prix. Mais l'étude montre que ce mécanisme théorique n'est pas sans faille. Tout d'abord, les gouvernements successifs n'ont pas toujours respecté la règle - non écrite - de l'indexation. Ainsi, la base mensuelle des allocations familiales (BMAF), qui sert de base au calcul des prestations familiales, a subi une baisse de 1,9% de son pouvoir d'achat au cours des dix dernières années et de 4,6% depuis 1984. La situation est un peu meilleure pour le minimum vieillesse : +0,3% de pouvoir d'achat sur les dix dernières années et +3% depuis 1984. Il en va de même pour le RMI, dont le pouvoir d'achat a progressé un peu plus vite que l'inflation jusqu'en 2001, un peu moins vite après.
Mais, durant les dix dernières années, le pouvoir d'achat du salaire moyen a progressé de 14%. Prestations et minima sociaux ont donc nettement décroché. Les allocations familiales ont ainsi perdu 24,5% de leur valeur relative depuis 1984. Elles devraient aujourd'hui augmenter de 33% pour retrouver leur niveau relatif de 1984. Il en va de même, dans de moindres proportions, pour le RMI. Lors de sa création en 1988, celui-ci équivalait à 34,9% du revenu médian. Il n'en représente plus désormais que 30% (soit une baisse de 14% en niveau relatif). Même chose pour le minimum vieillesse, passé de 52% du revenu médian en 1984 à 42,5% en 2007 (-18% en valeur relative). En 2007, un titulaire du minimum vieillesse avec l'allocation logement touchait environ 61,6% du revenu médian, soit très légèrement plus que le seuil de pauvreté (60% du revenu médian). En l'absence de revalorisation du pouvoir d'achat du minimum vieillesse, ce dernier passera sous le seuil de pauvreté dès 2009.
Il y a bien sûr plusieurs façons de lire ces résultats. Pour l'OFCE, "cette forte augmentation du nombre de personnes âgées pauvres n'est guère compatible avec l'objectif proclamé de Martin Hirsch de faire baisser d'un tiers le taux de pauvreté en France". Pour les partisans d'une approche libérale, l'élévation du niveau de vie justifie le décrochage relatif des minima sociaux (au moins dès lors que le maintien du pouvoir d'achat est garanti). Enfin, les tenants du "travailler plus pour gagner plus" verront dans ce décrochage relatif au regard de l'évolution du revenu médian une incitation supplémentaire à la reprise d'un emploi. Une préoccupation qui n'est pas étrangère à la mise en place du RSA et qui devrait être au coeur des débats du Grenelle de l'insertion.

 

Jean-Noël Escudié / PCA