Lutte contre l'exclusion - Malgré l'amélioration de l'emploi, le taux de pauvreté a augmenté en 2005
Après la polémique sur les personnes sans domicile fixe d'Argenteuil, la question de la pauvreté fait un retour en force dans le débat public. A l'origine de ce renouveau : la publication, par l'Insee, des premiers résultats de l'enquête "Revenus fiscaux 2005". Ceux-ci montrent en effet une progression - qui reste néanmoins modérée - de la pauvreté en France. Si l'on considère que le seuil de pauvreté est de 50% du revenu médian (revenu partageant les ménages en deux groupes d'égale importance numérique), le nombre de ménages vivant sous ce seuil (soit 681 euros par mois) est passé de 6,2% du total en 2004 à 6,3% en 2007. Si l'on prend en compte 60% du revenu médian (817 euros par mois), le taux de pauvreté est passé, sur la même période, de 11,7 à 12,1%. La surprise vient moins de cette augmentation que du contexte dans lequel elle intervient. En effet, cette progression du taux de pauvreté se situe dans un environnement moins défavorable que les années précédentes, avec un début de reprise de l'emploi qui se lit, par exemple, dans le recul du nombre de bénéficiaires du RMI. Or contrairement à l'embellie économique de 1997-2002, cette amélioration n'a pas eu d'impact positif sur le taux de pauvreté. Tout en estimant que "2006 et 2007 ne devraient pas être marqués par une forte hausse de la pauvreté", l'Observatoire des inégalités - qui regroupe associations caritatives et chercheurs - s'interroge sur la qualité des emplois créés et rappelle que certains sont rémunérés en dessous du seuil de pauvreté. La dégradation plus marquée pour la deuxième définition de la pauvreté (60% du revenu médian) pourrait en effet s'expliquer par l'augmentation du nombre de "travailleurs pauvres".
Cette montée de la pauvreté n'a pas échappé au haut commissaire aux solidarités actives. Dans une libre opinion donnée au journal Le Monde, Martin Hirsch appelle, lui aussi, l'attention sur ce phénomène - "Pour être clair, 260.000 personnes sont devenues pauvres [en 2005]" - et s'étonne que ces chiffres soient "rendus publics dans l'indifférence". Il rappelle également l'objectif fixé par Nicolas Sarkozy de réduire d'au moins un tiers en cinq ans le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté et annonce avoir "commencé les discussions avec les partenaires sociaux, collectivités territoriales, acteurs économiques, réseaux associatifs" en vue d'"élaborer une démarche concertée" pour lutter contre la pauvreté. Intervenant à nouveau le 31 août lors d'un déplacement dans le Cantal, Martin Hirsch a rappelé que le revenu de solidarité active (RSA) a précisément pour objectif de permettre aux bénéficiaires de minima sociaux de retourner vers l'emploi sans baisse de revenus "tant qu'ils en ont besoin" et de lutter contre le phénomène des travailleurs pauvres. L'expérimentation du RSA doit concerner environ 90.000 personnes dans 17 départements, avant une probable généralisation à la fin de 2008.
Jean-Noël Escudié / PCA