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Aménagement numérique - RIP, couverture mobile : collectivités et Etat main dans la main au colloque de l'Avicca

A l'occasion du colloque d'automne de l'Avicca, l'association regroupant les collectivités engagées dans le numérique, les signaux positifs ont concordé en faveur de l'avancement et de la commercialisation des réseaux d'initiative publique (RIP). La couverture mobile a également mobilisé bon nombre de débats, preuve que les collectivités sont de plus en plus impliquées pour contribuer à résorber les difficultés d'accès aux réseaux cellulaires.

Les Trip de l'Avicca - Trip pour "territoires et réseaux d'initiatives publiques" - constituent le rendez-vous semestriel incontournable pour les protagonistes des réseaux d'initiative publique. Ces réseaux, créés sous l'impulsion des collectivités pour pallier la carence d'initiative privée dans le déploiement de la fibre optique en territoire rural, parviennent désormais à un stade de déploiement crucial. Au second trimestre 2016, il existait 919.000 prises FTTH (fiber to the home) raccordées via un RIP, soit une hausse de 30% sur un an. A la mi-2016, près de 190.000 clients finaux accèdent à la fibre optique par ces réseaux ; l'augmentation sur un an est là de 41%. Surtout, de nombreux marchés de réseaux d'initiative publique ont été attribués depuis un an, soit à des opérateurs intégrés (Orange, SFR), soit à des opérateurs neutres (Axione, Altitude et Covage notamment). Des attributions qui augurent des déploiements futurs. 14 procédures de marché étant encore en cours actuellement, ce sont pas moins de 61 départements qui seront couverts par un réseau d'initiative publique courant 2017.

Le financement et la commercialisation des RIP progressent

Axelle Lemaire, secrétaire d'Etat au Numérique et à l'Innovation, est venue saluer ces avancées ce jeudi 24 novembre au matin. Soulignant le succès de la validation du plan France Très Haut Débit par la Commission européenne, elle a rappelé que cet aval sans réserve constituait une exception parmi les grands plans européens de déploiement de l'internet fixe. L'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni : autant de pays qui auraient cédé du terrain lors des discussions avec Bruxelles. Ce que les acteurs du numérique aiment maintenant à appeler le "modèle français", avec la construction d'infrastructures optiques neutres, se diffuse à l'international : le Mexique ou encore l'Afrique se laissent tenter par la démarche, assurant des débouchés à l'export pour les industriels et les consultants français en aménagement numérique du territoire. Les réseaux d'initiative publique ont également su attirer des fonds d'investissement en infrastructures qui, depuis désormais plus d'un an, multiplient leurs participations dans les projets publics.

La commercialisation des RIP reste un sujet de préoccupation et de tension, les principaux opérateurs préférant se concentrer sur les réseaux qu'ils sont à même d'exploiter en propre. Cependant, au vu de l'importance des réseaux publics, qui couvriront à terme 40% de la population française, l'impasse n'est pas longtemps tenable. Le colloque de l'Avicca a été l'occasion, pour Bouygues Télécom et Free, de confirmer leur intention de proposer des offres grand public sur les RIP, après plusieurs années d'absence. Bouygues a annoncé son arrivée sur Vaison-la-Romaine dans les prochaines semaines et une extension progressive de son offre sur les autres RIP gérés par l'opérateur Axione. Free a pour sa part donné des signes d'intérêt pour une commercialisation sur le RIP du Nord-Pas-de-Calais, dont la convention d'affermage a été signée avec Axione au début de ce mois de novembre. Ces annonces convergent avec celle de la création du nouvel opérateur triple-play Vitis, piloté par Netgem, Océinde, et la Caisse des Dépôts. Objectif annoncé : proposer une offre grand public, riche en contenus numériques, sur les RIP gérés par des opérateurs neutres et souvent boudés par Orange et SFR. Les RIP jouissent donc de bons signaux qui pourraient bien rendre ces réseaux plus attractifs pour le consommateur final.

Couverture mobile : l'Etat et les collectivités apprennent à s'harmoniser

Lors de son allocution, Axelle Lemaire a également mentionné l'importance de la couverture mobile, tout en concédant que tant du côté de Bercy que des opérateurs, "il n'y avait pas de prise en compte des difficultés de couverture mobile au sein de la technostructure". C'est désormais tout un dispositif de gouvernance et de traitement des anomalies qu'il faut mettre en place : le guichet unique France Mobile, dont Localtis s'était fait l'écho, devrait constituer une avancée majeure. Annoncé un temps pour la fin de ce mois de novembre, il devrait finalement être diffusé en version beta d'ici la fin de l'année. Du côté des collectivités, on note que tant l'Etat que les opérateurs ont fini par comprendre que les critères de zone blanche, trop restrictifs, n'étaient pas du tout en phase avec l'expérience des usagers sur le terrain. Longtemps alpha et oméga de l'amélioration de la couverture mobile, la mise en place d'un accès réseau en centre-bourg n'est plus du tout suffisante : "une cabine téléphonique mobile", déclare Antoine Darodes, directeur de l'Agence du numérique. Une manière de dire qu'on ne peut plus attendre des citoyens de se déplacer devant la mairie du village pour venir capter quelques barres précaires de réseau cellulaire.

Sur ce dossier, les collectivités se sont montrées particulièrement volontaristes pour contribuer à repérer puis à résorber les anomalies de couverture. Mais s'agissant de la couverture de 1.300 sites stratégiques, le "reste à payer" à la charge des collectivités pour la mise en place de pylônes mutualisés semble encore au-delà des marges de manœuvre budgétaires des territoires. L'AMF ne souhaite donc pas pour l'heure conventionner avec l'Etat. Du côté de l'Avicca, on dit qu'il est nécessaire d'avancer, tout en insérant des clauses de revoyure laissant la porte ouverture à de nouveaux compromis. Les régions et les départements devraient assister les communes dans l'installation de pylônes et effectuer des groupements d'achat pour abaisser les coûts. Mais restent les enjeux d'adduction du réseau de fibre optique jusqu'au pylône, ou encore de fourniture énergétique, qui laissent présager des coûts non négligeables. Or, si une aide via le fonds de soutien à l'investissement local (FSIL) a été annoncée, elle concernerait plutôt les petites communes, et non les grosses collectivités qui prennent pourtant en charge l'infrastructure de collecte.

La Caisse des Dépôts vient appuyer les collectivités sur la couverture mobile

Sur ces points, c'est la Caisse des Dépôts qui a profité du colloque, dont elle est un partenaire historique, pour apporter de nouveaux soutiens aux collectivités. Gabrielle Gauthey, directrice des investissements et du développement local au sein du groupe, a annoncé que les investissements des collectivités en faveur de la résorption des zones blanches mobiles deviendraient éligibles aux prêts de long terme, sur fonds d'épargne ou sur fonds de la Banque européenne d'investissement. En partenariat avec TDF, la Caisse des Dépôts a également annoncé le lancement de Belvédère, une société visant à accompagner l'installation de pylônes mutualisés par les collectivités dans le cadre du plan de résorption des zones blanches, puis de France Mobile. Selon Gabrielle Gauthey, l'objectif de Belvédère est de rendre la mise en place concrète d'un pylône et d'une infrastructure passive mutualisée à la fois plus facile et moins coûteuse pour les territoires. Avec la couverture mobile, les collectivités se lancent en effet, de fait, dans l'exercice d'une nouvelle compétence.