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Logement - Ralentissement des loyers à Paris : merci qui ?

Les loyers de l'agglomération parisienne ont, selon les estimations de l'Olap, peu ou pas augmenté à la relocation entre 2015 et 2016 : -0,6% en grande couronne, +0,2% en petite couronne et seulement +1,2% à Paris. Encadrement ou tendance naturelle du marché ? Les raisons de ce ralentissement continuent d'opposer les défenseurs d'une politique de régulation des loyers et leurs opposants.

L'Observatoire des loyers de l'agglomération parisienne (Olap) - l'un des acteurs clés de l'encadrement des loyers à Paris et bientôt dans l'agglomération parisienne - annonce que ce territoire a connu, en 2016, "la hausse des loyers la plus faible depuis 2001". Il s'agit en l'occurrence des résultats provisoires - les chiffres définitifs seront publiés en juin - obtenus à partir des premières estimations issues de l'enquête annuelle de l'Olap, portant sur les loyers d'habitation du parc locatif privé non meublé.

Le taux d'évolution à la relocation le plus faible depuis 2001

En 2016, ces loyers ont augmenté en moyenne (tous locataires) de 0,2% dans l'agglomération parisienne. Il s'agit effectivement du rythme d'évolution le plus faible depuis 2001, "tout en restant légèrement supérieur à celui de l'indice de référence des loyers (IRL), dont la progression moyenne annuelle est quasi nulle (+0,03%)".
L'étude confirme également la décélération des relocations. L'évolution varie cependant selon les territoires considérés : en 2016, les loyers après relocation s'affichent en baisse en grande couronne (-0,6%, après -0,4% en 2015), quasi stables en petite couronne (+0,2%) et en hausse de 1,2% à Paris, ce qui "illustre aussi la persistance de la tension malgré les mesures règlementaires d'encadrement des loyers en niveau et évolution" (pour mémoire, seule Paris fait pour l'instant l'objet d'un encadrement des loyers, celui-ci devant être étendu à l'agglomération à partir de 2018).
De façon globale, l'Olap relève que le "saut à la relocation" (hausse du loyer entre deux locations) a été de +0,4% en 2016, ce qui constitue également le taux le plus faible depuis 2001. Ce taux tournait encore autour des +10% annuels entre 2007 et 2012.

Mesures administratives versus purge naturelle

Ces résultats soulèvent aussitôt la question des causes à l'origine de cette nette décélération. Dans son communiqué du 19 mai 2017, l'Olap explique que "dans un contexte de reprise modérée de l'économie francilienne et de stabilité de l'indice des loyers, ces résultats illustrent l'impact du décret annuel de limitation de la hausse des loyers et, pour Paris, l'effet complémentaire de l'arrêté d'encadrement des loyers en niveau, même si l'évolution globale reste encore légèrement supérieure à l'IRL dans la capitale, illustrant la tension persistante sous-jacente de ce marché". Or dans une autre étude publiée en décembre 2016 sur les effets de l'encadrement des loyers au second semestre 2015, l'Olap concluait que la mesure entraînait "des effets réels, mais limités en 2015". Difficile, dans ces conditions, de se faire une opinion tranchée.
Le son de cloche est différent du côté de l'observatoire Clameur (Connaître les loyers et analyser les marchés sur les espaces urbains et ruraux), regroupant des grands acteurs de l'immobilier privé, et qui a de tout temps contesté l'intérêt de l'encadrement des loyers (voir notre article ci-dessous du 10 mars 2017). Selon l'organisation, qui s'appuie notamment sur l'exemple de Lille - seconde ville à loyers encadrés après Paris -, ces évolutions seraient le fruit de la "purge" naturelle du marché intervenue après les excès et la crise de 2008. Elle en veut aussi pour preuve les évolutions convergentes, qu'il y ait ou non mise en place d'un encadrement des loyers. Mais encore faudrait-il pouvoir mesurer l'éventuel impact psychologique anticipé, sur les bailleurs, de l'annonce d'un possible encadrement...
Pour l'instant, tenants et adversaires de l'encadrement des loyers peuvent donc continuer d'affûter leurs arguments, sans grande crainte d'être démentis.