Qualité de la fibre : opérateurs et industriels veulent échapper à un durcissement de la réglementation
Alors que la proposition de loi sur la qualité des réseaux THD doit être discutée le 2 mai 2023 au Sénat, Infranum et la FFT montent au créneau pour tenter d'échapper à l'encadrement qu'elle entend instituer. Les deux associations font valoir les premiers résultats pour leur plan qualité et mettent en garde sur le "risque d'arrêt des raccordements".
La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a examiné le 12 avril 2023 la proposition de loi sur "la qualité et la pérennité des réseaux THD" portée par le sénateur et président de l'Avicca, Patrick Chaize. Aux "engagements" de la filière dont les effets peinent à se traduire en améliorations concrètes depuis trois ans, les sénateurs ont opté pour un encadrement des déploiements et notamment de la sous-traitance des raccordements ou mode Stoc (voir encadré).
Améliorations en cours
Cet encadrement comme la possibilité de missionner l'opérateur d'infrastructure (OI) pour réaliser les raccordements n'est pas du goût des acteurs privés. Le 25 avril 2023, les opérateurs de la Fédération française des télécoms (FFTelecom) et celle des industriels (Infranum) se sont fendus d'un communiqué commun pour le dénoncer. Si les acteurs privés affirment "avoir pleinement conscience des difficultés rencontrées par certains usagers" et reconnaitre les "légitimes préoccupations des élus locaux", ils veulent s'en tenir aux mesures du plan qualité présenté en juin 2023 (notre article du 21 juin 2022). "La mise en œuvre de ces propositions est en marche. Des attestations de compétences circulent entre les acteurs, des contrôles s'exercent sur le terrain, des premières sanctions auprès de sous-traitants négligents sont intervenues. Des plans de reprise de locaux techniques à forte 'incidentologie' ont été également lancés" justifient-ils.
Risque d'arrêt des déploiements
Le nouveau cadre envisagé par le Sénat entrainerait selon eux "la refonte de tous les processus opérationnels et contractuels", risquant de "déstabiliser l'ensemble de la filière, de surcroît sans aucune garantie d'amélioration", avec in fine "un arrêt brutal des raccordements". Ils plaident pour "une publication des indicateurs de qualité de service et d'exploitation mesurés de façon neutre et objective" sous le contrôle "rigoureux et impartial par l'Arcep". Ils estiment enfin que "le nœud du problème" sur la qualité des raccordements est celui de la rémunération des sous-traitants. "Il est illusoire d'espérer améliorer le niveau de qualité constaté sur le terrain sans apporter une réponse claire sur la rémunération juste de l'ensemble des acteurs de la filière, à tous les étages", considère Philippe Le Grand, président d'Infranum.
Le ministre des Télécommunications Jean-Noël Barrot a montré lors de son audition au Sénat (notre article du 12 avril 2023) une oreille plutôt attentive aux positions de la filière télécoms sur le mode Stoc. Il restera à savoir s'il sera entendu par la majorité sénatoriale la semaine prochaine.
Choix du mode de raccordement et guichet uniqueLa proposition de loi sénatoriale donne à l'opérateur d'infrastructure le choix du mode raccordement (mode "Stoc" ou mode "OI"). L'OI doit instaurer un "guichet unique" assurant la prise en charge des difficultés de raccordement rencontrées par les utilisateurs. Le texte prévoit la remise à l'abonné d'un certificat par chaque intervenant chargé d'effectuer un raccordement à la fibre, attestant de la conformité des travaux réalisés au cahier des charges. Ce certificat est préalable au paiement des opérateurs dans les réseaux d'initiative publique. En commission, 19 amendements ont été adoptés par les sénateurs. L'un vise à étendre l'interdiction du mode "Stoc", cantonné par la version initiale aux "zones fibrées", aux communes dans lesquelles la fermeture du réseau cuivre est engagée. Il s'agit aussi d'instaurer une obligation de labellisation de tout intervenant chargé de réaliser un raccordement. Une clarification des pouvoirs de l'Arcep sur les questions de qualité et une remontée des données des guichets uniques ont aussi été introduites. |