Le gouvernement table sur un accord global pour achever la couverture fibre du territoire
Auditionné par le Sénat le 8 mars 2023, le ministre des Télécommunications a annoncé travailler avec les opérateurs sur un accord global pour finaliser la couverture du territoire. Contre des engagements sur la complétude, l'État pourrait réduire la taxation des opérateurs. Restera à savoir si les collectivités destinataires de l’Ifer ne feront pas partie des lésées de ce "Big Deal".
La couverture en très haut débit était une fois de plus à l’ordre du jour du Sénat. Après la présidente de l’Arcep Laure de La Raudière, c’est au tour de Jean-Noël Barrot, ministre en charge de la transition numérique et des télécommunications d’avoir été auditionné par la Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat. Il a été beaucoup question de fibre, un peu moins de téléphonie mobile et de lutte contre l'exclusion numérique.
Accord global avec les opérateurs
Le ministre a confié avoir deux "leviers" pour assurer la complétude des déploiements, sujet qui intègre pour le gouvernement les retards observés en zone privée (AMII et très dense) mais aussi les raccordements complexes qui affectent l’ensemble du territoire. Aux sanctions, tout juste mentionnées, le ministre semble cependant préférer la voie des "incitations" espérant ainsi trouver "un point d’équilibre". Concrètement, Bercy planche sur un "accord global" avec les opérateurs avec pour objectif de le conclure d’ici la fin du 1er semestre 2023. Le périmètre de cet accord couvrirait la complétude, la résilience et l’accessibilité tarifaire des réseaux. Des sujets qui, on le soulignera, recouvrent en bonne partie le dossier du service universel des télécommunications dont la mise en œuvre est toujours en pointillés faute de texte réglementaire.
L'Ifer dans la balance des négociations
Contre des engagements des opérateurs en termes d’achèvement de la couverture fibre et de préservation de tarifs "abordables" pour les abonnés, le gouvernement mettrait notamment sur la table la diminution de l’Imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer), l’impôt sur les infrastructures honni par la Fédération française des télécoms, apparu en 2010, à la suite de la suppression de la taxe professionnelle. Les recettes de cet impôt vont nécessairement "diminuer" a expliqué le ministre car "tous les opérateurs ont annoncé le décommissionnement de la 2G et de la 3G". L’idée serait donc que, malgré la diminution de l’assiette de l’Ifer, le taux des taxes ne soit pas pour autant augmenté… Cela suppose cependant de trouver un accord avec les collectivités territoriales qui sont aujourd’hui destinataires du produit de l’Ifer. Cette réforme de l’Ifer est "en discussion avec les associations d’élus", a assuré le ministre qui a évoqué une "stabilisation des recettes" sans employer le mot compensation. Le gouvernement s'oriente par ailleurs vers une aide au raccordement des abonnés "sur la partie privative", les opérateurs ayant à charge le tirage de la fibre jusqu’à la limite de propriété. Le mécanisme de subvention pourrait s’inspirer de celui en vigueur pour les bornes de recharge des véhicules électriques.
La nouvelle stratégie d'inclusion bientôt dévoilée
Concernant la qualité de la fibre, le ministre a fait un bilan des actions engagées en septembre 2022. Le volet contrôle des intervenants – transmission des plannings et production d’un compte rendu – serait "très bien engagé". Le plan de reprise des équipements les plus dégradés (1.000 points de mutualisation) serait pour sa part "bien engagé", le volet formation n’étant pour sa part "pas tout à fait abouti". Quant à la remise à plat du mode Stoc (sous-traitance des raccordements), comme le demandent l’Avicca ou les élus de Haute-Savoie (lire l'article du 3 mars 2023), elle ne paraît pas à l’ordre du jour.
En matière de couverture mobile, l’ANCT a pour mission d’évaluer les besoins au-delà de ce qui est prévu dans le cadre du New Deal mobile (5.000 sites par opérateurs).
Enfin, sur le volet lutte contre l’illectronisme, le ministre a annoncé que le bilan de la concertation serait dévoilé avant la fin du mois de mars 2023. Celle-ci doit servir de base à la nouvelle stratégie d’inclusion numérique pour la mandature et assurer, notamment, la pérennité des conseillers numériques France service.
Emmanuel Macron a désormais un nouveau conseiller sur le numérique. Il s’agit de Guillaume Rozier, le jeune datascientist qui s’est fait connaitre en 2020 pour avoir créé le premier tableau de bord de suivi de l’épidémie de Covid 19, Covid-Tracker, basé sur l’exploitation en temps réel des données open data de Santé publique France. Il a ensuite été à l’origine de "vite ma dose", une application permettant de connaître les créneaux de vaccination disponibles autour de soi. A l’automne 2022, il a conçu Trackmywatt, une application de suivi de consommations électriques. Guillaume Rozier devient "conseiller du président de la République sur les sujets de la stratégie numérique et des données publiques". Sur Twitter il a affirmé vouloir "faire émerger un service public de la donnée", "continuer d'ouvrir toutes les données qui peuvent l'être" et "créer les conditions de leur valorisation". |