Qualité de la fibre : l'Arcep détaille le cadre mais pas les chiffres
Le site de l'Arcep a désormais une rubrique sur le suivi des travaux pour améliorer la qualité des réseaux et des raccordements FTTH. Si celle-ci a le mérite de récapituler les actions entreprises, elle ne permet pas en l'état de mesurer si la situation s'améliore, faute de statistiques globales.
Pas une seule intervention de la présidente de l'Autorité de régulation des communications électroniques (Arcep) n’échappe au quart d'heure sur les problèmes de raccordement et de dégradations des réseaux FTTH, comme en témoigne la récente intervention de Laure de La Raudière devant les sénateurs de la commission des Affaires économiques (lire notre article du 8 février 2023). Pour démontrer que le dossier est suivi au plus près par l'Autorité, ses services ont créé une rubrique dédiée sur son site internet rappelant la gouvernance et le suivi des actions entreprises depuis trois ans.
Cinq instances coordonnées par l'Arcep
Que trouve-t-on sur cette page ? Tout d'abord un récapitulatif des instances de dialogue mises en place par l’Autorité pour assurer le suivi du chantier qualité de la fibre. Pas moins de cinq instances pilotent ce dossier : un comité d'experts "neutres" pour élaborer des référentiels ; un groupe de travail exploitation pour suivre les expérimentations et la mise en oeuvre des nouveaux contrats de sous-traitance ; le groupe Interop'fibre pour définir les protocoles déchanges d’information ; des ateliers opérateurs pour travailler sur des sujets spécifiques et enfin un groupe de travail sur les raccordements finals. On relèvera que les collectivités territoriales ne sont pas mentionnées en tant que telles – les opérateurs d'infrastructure des RIP sont cependant bien associés – alors que les élus sont en première ligne face aux usagers mécontents.
Liste des actions entreprises
Si l'Autorité coordonne ces instances, elle rappelle "qu’il est in fine du ressort des opérateurs de fournir la matière pour ces travaux (analyses, expérimentations, retours d’expérience…), d’identifier les solutions à apporter et, enfin, de les mettre en œuvre sur leurs réseaux". De fait, la majeure partie des mesures ont été imaginées par les instances d’Infranum, la fédération des industriels des télécoms. Pour mémoire, il s’agit de la modification des contrats de sous-traitance (dit Stoc V2) pour clarifier les responsabilités et empêcher plus de trois niveaux de sous-traitance ; du déploiement de l’application e-intervention pour tracer l’ensemble des travaux sur les équipements FTTH ; de la formalisation des échanges de plannings ; du contrôle des points des accès aux points de mutualisation ; de la formation et labellisation des intervenants et enfin de la remise en état des points de mutualisation ordonnée par l’Arcep.
Peu de chiffres
Ceux qui recherchent des statistiques sur l’évolution du chantier qualité de la fibre seront cependant déçus. Les rares statistiques immédiatement accessibles portent sur la remise en état des points de mutualisation, fournies par mois et par opérateur en volume et en pourcentage. Si elles montrent une accélération des remises en état en 2022, aucune donnée géolocalisée ou brute n’est fournie. Quant aux indicateurs de qualité de service FTTH, l’internaute est invité à aller chercher lui-même les chiffres sur les sites des différents opérateurs, chacun les présentant à sa façon. Dit autrement, l’Arcep ne nous dit pas quels sont les bons et les mauvais élèves ni si la situation s’améliore, ou pas. Des statistiques seraient pourtant disponibles. Selon nos informations, une trentaine d’indicateurs auraient été présentés aux collectivités, sans qu'il soit permis de les révéler. Ce qui remet quelque peu en question l'idée d'une régulation par la donnée.
Un chantier au long court
Tout porte à croire que les problèmes de qualité FTTH ne vont pas disparaître du jour au lendemain. Comme le rappelle régulièrement Infranum pour défendre ses membres, il faut du temps pour mettre en œuvre des mesures qui pèsent sur l’organisation et le système d’information des industriels comme de leurs sous-traitants : processus, suivi des intervention, création de flux de données… Mais le problème de fond reste celui de la formation et de la rémunération des sous-traitants, réplique tout aussi régulièrement l’Avicca. Sur le terrain, il a été constaté des techniciens réseaux à temps partiel, payés au raccordement (ce qui expliquerait les abonnés débranchés brutalement pour en brancher un autre, parfois par le même technicien) et, in fine, obligés d’exercer divers métiers pour subsister. Si la formation et l’idée d’un "permis de raccorder à un point" font partie des engagements fermes de la filière, l'amélioration de la rémunération des intervenants coince encore. Or elle paraît indispensable à la montée en qualité des réseaux.