Départements - Protection de l'enfance : la QPC des Côtes-d'Armor rejetée par le Conseil constitutionnel
Le Conseil constitutionnel a annoncé ce vendredi 25 mars avoir débouté le département des Côtes-d'Armor, présidé par Claudy Lebreton, au sujet d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance et son article 27 prévoyant la création d'un Fonds national de financement de la protection de l'enfance. Cette QPC avait été transmise fin décembre par le Conseil d'Etat.
Celui-ci avait notamment considéré qu'il y avait en effet lieu, comme le soutenait le conseil général des Côtes-d'Armor, de s'interroger sur la conformité de cet article 27 de la loi réformant la protection de l'enfance à l'article 72-2 de la Constitution, article selon lequel "toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi". Ceci, parce que "les conditions et garanties d'une telle compensation" n'auraient pas été suffisamment précisées, alors même que la loi de mars 2007 "redéfinit les missions des services départementaux de protection maternelle et infantile et d'aide sociale à l'enfance, notamment en créant des obligations nouvelles à la charge des départements et en élargissant l'intervention de ces services à l'ensemble des mineurs en situation de danger".
Pour le Conseil constitutionnel au contraire, si la loi de 2007 a effectivement "modifié les conditions d'exercice des missions des services de protection maternelle et infantile et d'aide sociale à l'enfance exercées par les départements", elle n'a en revanche ni "élargi le champ de leurs bénéficiaires" ni créé de prestation nouvelle... et n'a donc pas procédé "ni à un transfert aux départements d'une compétence qui relevait de l'Etat ni à une création ou extension de compétences". Et ce, même si les départements doivent désormais assurer "l'établissement d'un bilan de santé pour les enfants âgés de trois à quatre ans, l'entretien psychosocial pour les femmes enceintes au cours de leur quatrième mois de grossesse ainsi que la mise en oeuvre d'actions sociales et médicosociales pour les parents en période postnatale" – autant d'actions, considère le Conseil constitutionnel, "qui relevaient déjà des attributions de la protection maternelle et infantile".
Un long feuilleton
On rappellera que le Fonds national de financement de la protection de l'enfance prévu par la loi de 2007 n'a été mis en place que plus de trois ans plus tard, par un décret de mai 2010 – un décret qui venait marquer la fin d'un long feuilleton, le gouvernement ayant longtemps laissé entendre qu'il ne créerait pas ce fonds. Jusqu'à ce que, saisi par l'Assemblée des départements de France (ADF), le Conseil d'Etat enjoigne l'Etat de mettre en place ce dispositif prévu par la loi. Soumis à consultation, le projet de décret avait été critiqué de toutes parts, et pas seulement par l'ADF qui estimait que les "propositions financières d'abondement du fonds [étaient] sans rapport avec les sommes envisagées lors de l'élaboration de la loi". Même le Comité des finances locales affirmait craindre que le décret n'instaure un certain nombre de "transferts rampants". Mêmes désapprobations après la publication du décret, l'ADF continuant de considérer que "le compte n'y est pas". Une position que le président de l'ADF, cette fois en tant que président du conseil général des Côtes-d'Armor, a donc continué de défendre par la voie d'une QPC.
On rappellera enfin que les départements à majorité de gauche se sont tous engagés dans une démarche de QPC concernant cette fois la compensation des trois principales allocations individuelles de solidarité (APA, RSA et PCH), là encore pour non-respect de l'article 72-2 de la Constitution et du principe de libre administration des collectivités locales. Fin janvier, l'un d'eux, le conseil général de Seine-Saint-Denis, remportait une toute première étape avec la validation de cette QPC par le tribunal administratif de Montreuil et donc sa transmission au Conseil d'Etat. Les considérants du Conseil d'Etat, mais aussi du Conseil constitutionnel, sur la question de la protection de l'enfance, donnent-ils un avant-goût de leurs futures décisions respectives s'agissant de la compensation des allocations de solidarité ?
Claire Mallet
La présence des conseillers généraux dans les CDAS jugée inconstitutionnelle
Dans
une autre décision également rendue publique ce 25 mars, le Conseil constitutionnel, là encore saisi d'une QPC par le Conseil d'Etat, a jugé inconstitutionnelle la composition des commissions départementales d'aide sociale (CDAS). Ceci dans la mesure où les trois conseillers généraux qui siègent dans chacune de ces commissions risquent d'être à la fois juges et partie dès lors que la CDAS examine des recours formés, précisément, contre les décisions du président du conseil général en matière d'aide sociale. Même chose, d'ailleurs, pour les fonctionnaires de l'Etat membres des CDAS puisque celles-ci peuvent être amenées à examiner un recours formé contre une décision du préfet. Cette déclaration d'inconstitutionnalité prenant immédiatement effet, les CDAS doivent dès aujourd'hui revoir leur composition.
C.M.