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Finances locales - Pour une réforme globale de la péréquation

Un rapport de la commission des lois de l'Assemblée nationale propose de simplifier les dispositifs de péréquation financière en créant une dotation de péréquation unique pour chaque niveau de collectivité. L'idée sera débattue dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale lancée par le gouvernement.

A la demande de la commission des lois de l'Assemblée nationale, Manuel Aeschlimann, député des Hauts-de-Seine, formule six propositions pour renforcer l'efficacité de la péréquation financière entre les collectivités. La principale, qui sera certainement étudiée de près dans le cadre de la réforme des collectivités, consiste à créer pour chaque niveau de collectivité une dotation de péréquation unique regroupant les multiples dotations péréquatrices existantes. Cette nouvelle dotation aurait pour objectif de "réduire au moins de moitié les inégalités de pouvoir d'achat entre collectivités".
Selon le député, la priorité n'est pas d'augmenter les moyens financiers consacrés à la péréquation. D'abord, le contexte budgétaire ne s'y prête guère et ensuite, contrairement à une idée répandue, le poids de la péréquation a eu tendance à s'amplifier au cours de ces dernières années. La proportion de la dotation globale de fonctionnement - qui représente près de 80% des concours financiers versés par l'Etat aux collectivités territoriales, soit 40,9 milliards d'euros sur un total de 52,4 milliards d'euros en 2009 - consacrée à la péréquation est en effet passée, toutes collectivités confondues, de 9,5 % en 1998 à 15,7 % en 2008.
"C'est bien sur la performance intrinsèque des dotations de péréquation que l'effort devrait porter en priorité", conclut le député. Et c'est sur ce point que le bât blesse. Car d'une dotation à l'autre, l'efficacité de la péréquation peut varier du simple au double. De plus, celle-ci s'est réduite quelque peu entre 2001 et 2006 pour les communes et les départements, comme l'a montré une étude des professeurs Guengant et Gilbert (lire notre article du 28 octobre 2008).
Pour que les dotations de l'Etat corrigent plus efficacement les inégalités de ressources entre les collectivités, l'ancien maire d'Asnières-sur-Seine préconise logiquement une révision des critères d'attribution des dotations de l'Etat aux collectivités, qui doit conduire à concentrer les effets redistributeurs de ces dotations sur les collectivités les plus défavorisées. La difficulté de l'opération est que, si l'objectif est partagé par tous, il "est généralement perçu comme allant à l'encontre de l'intérêt particulier" des collectivités qui ne bénéficieront plus des dotations de péréquation.

 

Réforme de la TP : "un impact majeur"

Manuel Aeschlimann en veut pour preuve la fronde des élus locaux contre la volonté à l'automne dernier du ministre de l'Intérieur de réformer les critères de la dotation de solidarité urbaine (DSU). Les intérêts divergents des différentes catégories de collectivités s'exprimeraient au sein du Comité des finances locales (CFL), instance constituée principalement d'élus chargés de répartir les dotations de l'Etat aux collectivités. Conséquence : "La volonté de préserver le plus large consensus au sein du CFL aboutit, dans de nombreux cas, à affaiblir considérablement la portée des réformes envisagées, tout en les compliquant, pour finalement n'en conserver que le plus petit dénominateur commun, considéré comme acceptable par l'ensemble des partenaires en présence." Malgré ce constat sans ambiguïté, le député plaide pour que le CFL conserve une place centrale dans la gouvernance des dispositifs de péréquation. Il pourrait ainsi être chargé chaque année de fixer pour chaque échelon d'administration territoriale un objectif indicatif de péréquation.
La suppression de la taxe professionnelle dès l'année prochaine offrirait l'opportunité de mener la "réforme globale" de la péréquation que le parlementaire préconise. Mais cette occasion pourrait vite se transformer en menace si la taxe professionnelle était compensée en partie par des dotations d'Etat. La part des dotations de péréquation dans l'ensemble des dotations aux collectivités se trouverait en effet, dans le nouveau schéma, mécaniquement réduite. Le député plaide de ce fait pour la création de taxes locales imposant la valeur ajoutée des entreprises et "l'impact de leurs activités sur les écosystèmes".

 

Thomas Beurey / Projets publics