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Handicap - Polémique sur l'état des lieux des agendas d'accessibilité programmée

C'est l'histoire classique du verre à moitié vide ou à moitié plein. Le 2 décembre, le "Collectif pour une France accessible" - porté par l'Association des paralysés de France (APF) - publiait un communiqué pour "déplorer la faillite - prévisible ! - du dispositif gouvernemental" des agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP) sur trois, six ou neuf ans pour les établissements recevant du public (ERP). Quelques jours plus tard, Marie Prost-Coletta, la déléguée ministérielle à l'accessibilité accordait un entretien à l'AFP pour donner la version du gouvernement sur la mise en œuvre des Ad'AP.

40% des gestionnaires d'ERP dans l'illégalité

Du côté des associations, le Collectif dénonce toujours "l'ordonnance de la honte" du 26 septembre 2014 - ratifiée par une loi du 5 août 2015 -, qui a renoncé de fait à l'objectif de l'accessibilité universelle au 1er janvier 2015 et mis sur pied le dispositif transitoire des Ad'AP. Deux mois après l'échéance du 27 septembre 2015 fixée pour le dépôt des agendas, le Collectif constate que "ce sont plus de 400.000 établissements sur environ un million qui n'ont pas déposés leur Ad'AP, soit près de 40% des propriétaires d'ERP qui sont dans l'illégalité !".
Il rappelle aussi qu'"à de nombreuses reprises, le Collectif a alerté les pouvoirs publics sur les défaillances du dispositif : absence de réelle politique publique, notamment faute d'une communication adéquate à destination des propriétaires d'ERP qui ignorent encore leur implication et leurs devoirs". Devant ce qu'il juge être "une faillite", le Collectif demande donc "une réelle mobilisation des pouvoirs publics pour une France accessible à tous !".

Six fois mieux qu'avec la loi de 2005

Tout en ne niant pas le chiffre d'un million d'ERP, la déléguée ministérielle à l'accessibilité indique que les Ad'AP déposés au début du moins de décembre 2015 concernent "plus de 208.400 établissements" et les demandes de prorogation du délai de dépôt "87.551 ERP", soit au total près de 296.000 établissements. Ce chiffre est sensiblement supérieur aux 43.373 Ad'AP déposés avant la date limite du 27 septembre, représentant environ 80.500 ERP (voir notre article ci-contre du 23 octobre 2015). Compte tenu des retards dans certaines remontées départementales, le chiffre devrait rapidement atteindre 300.000 établissements aux normes ou engagés dans une démarche programmée de mise en accessibilité.
Selon Marie Prost-Coletta, ce nombre est six fois supérieur à "ce qu'on avait réussi à faire avec la loi de 2005". Elle rappelle ainsi que "sur un million d'ERP en France, 300.000 avaient été mis en accessibilité entre 2007 et 2015, dont 250.000 parce qu'ils étaient neufs et uniquement 50.000 existants qui avaient fait des travaux pour être accessibles".

La ville de Paris et la SNCF parmi les bons élèves

La déléguée ministérielle a également donné quelques informations plus qualitatives. Ainsi, "une dizaine d'universités" auraient demandé un délai supplémentaire de deux à quatre mois pour déposer leur Ad'AP. A l'inverse, la ville de Paris figure parmi les bons élèves pour avoir déposé dans les délais son agenda, qui concerne 1.800 établissements à rendre accessible d'ici à 2020, pour un investissement de 200 millions d'euros. La SNCF a également remis à temps son agenda, en s'engageant à rendre accessibles 160 "points d'arrêt nationaux" (gares, quais et services) pour 820 millions d'euros d'investissements sur neuf ans.
De façon plus large, 50% des autorités organisatrices de transports (AOT) auraient déposé un Ad'AP ou demandé un délai supplémentaire pour le faire. Les autres secteurs cités par la déléguée ministérielle pour leur engagement dans la démarche sont les "gros patrimoines" (réseaux bancaires, grandes villes...), ainsi que les chambres de commerce et d'industrie.
Comme elle l'avait déjà fait, Marie Prost-Coletta a rappelé qu'il était possible, pour les retardataires, de déposer un Ad'AP en justifiant les raisons du non respect de la date limite. Mais les intéressés seront passibles d'une amende allant de 1.500 à 5.000 euros par ERP concerné... dès que le décret correspondant sera paru.
Au-delà de la polémique et de la vision duale d'une même situation, il reste qu'un bilan précis et détaillé - et partagé - serait aujourd'hui le bienvenu.

 

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