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Finances locales - PLFR : le Sénat enrichit le texte d'un volet fiscalité locale

Le Sénat a introduit dans le projet de loi de finances rectificative pour 2012 plusieurs dispositions qui concernent directement les collectivités : relance de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, correction des dysfonctionnements dans la mise en oeuvre de la réforme de la fiscalité locale au niveau intercommunal, fiscalité de l'énergie, taxe sur les logements vacants... Vote définitif ce 31 juillet.

Le Sénat a adopté le 27 juillet à une courte majorité - 177 voix contre 166 - le second projet de loi de finances rectificative de l'année. Principal objectif du texte : permettre à la France de contenir le déficit public à 4,5% du PIB par une hausse d'impôts de 7,2 milliards d'euros et par le gel de 1,5 milliard d'euros de dépenses. L'ambition de la majorité est aussi de commencer à traduire dans les faits les promesses faites par le président de la République lors de la campagne électorale. Le texte abroge ainsi la TVA sociale et les incitations fiscales aux heures supplémentaires et alourdit la taxation des successions tout en instaurant une contribution exceptionnelle sur la fortune.
Comme de coutume, c'est au Sénat que les dispositions concernant les collectivités locales - très peu présentes dans le texte initial - ont été les plus nombreuses à rejoindre ce collectif budgétaire.

Confirmation de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels

Principale mesure décidée par la Chambre haute : la poursuite de la révision des valeurs locatives des 3,3 millions de locaux professionnels. Les principes de la révision ont été votés dans la loi de finances rectificative du 29 décembre 2010. Depuis, une expérimentation a eu lieu dans cinq départements. En juin dernier, la commission des finances du Sénat appelait à ne pas rester au milieu du gué et proposait des ajustements jugés indispensables pour réussir le chantier (lire notre article du 13 juin 2012 ci-contre). On retrouve ces propositions dans l'amendement de Pierre Jarlier et François Marc que le Sénat a adopté le 27 juillet. D'abord, un dispositif de lissage des hausses et des baisses de cotisations de taxe foncière est prévu sur une période de cinq ans. Celui-ci s'appliquera aux entreprises dont les cotisations s'écarteront de plus de 10% par rapport aux cotisations antérieures (ou de plus de 200 euros). La moitié des entreprises sera concernée. Le délai de cinq ans est "raisonnable", a jugé François Marc. Un avis partagé par ses collègues, de même que par le gouvernement, qui ont préféré cette solution à l'application sans délai de la réforme préconisée par des sénateurs de l'opposition. La demande d'un lissage sur "un à deux mandats" demandée par les associations d'élus locaux a elle aussi été rejetée, cette période étant jugée trop longue.
Les sénateurs ont souhaité une série d'autres adaptations techniques. Ainsi, le coefficient de neutralisation sera appliqué à la taxe d'habitation (pour les locaux professionnels assujettis à cet impôt) et à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (Teom). Objectif : limiter les impacts de la révision sur ces deux impôts. Ce coefficient de neutralisation doit permettre la mise en oeuvre de la réforme à produit fiscal constant. En outre, la révision exclura les locaux industriels dont l'évaluation des bases est soumise aujourd'hui à la méthode comptable et qui, de fait, sont à leur valeur réelle. Enfin, les rôles des impôts locaux prendront en compte les valeurs locatives révisées à compter de 2015 (et non 2014 comme prévu par la loi de 2010).
"Ces mesures, si elles sont confirmées par l'Assemblée nationale, permettront d'avancer dans la procédure de révision qui est tant attendue par les élus depuis de très nombreuses années, tout en prévoyant des mécanismes amortissant la charge de l'impôt pour le contribuable", s'est félicitée l'Association des maires de France dans un communiqué rendu public ce 30 juillet.
Si ces dispositions sont définitivement validées par le Parlement, les opérations de révision pourront redémarrer dès les prochains mois, avec au programme notamment la mise en place des nouvelles commissions départementales composées d'élus et de contribuables.

Des corrections apportées à la réforme de la fiscalité locale

Les sénateurs ont par ailleurs adopté trois amendements qui réparent des oublis ou corrigent certains dysfonctionnements dans la mise en oeuvre de la réforme de la fiscalité locale par les intercommunalités. Deux étaient proposés par le rapporteur général de la commission des finances, François Marc, l'autre l'était par Pierre Jarlier. Ces amendements ont pour objectif commun de faciliter la conduite des projets de fusion de communautés dans le cadre de la réforme territoriale. Grâce à l'un des amendements, les EPCI issus d'une fusion pourront "récupérer" les corrections faites à partir de 2011 par les communautés de leur territoire sur les bases de la taxe d'habitation pour tenir compte, le cas échéant, des anciens abattements du département. En cas de fusion entre plusieurs EPCI, le maintien de ces corrections n'était pas possible jusqu'à présent. Un autre amendement permet l'application dans tous les cas de fusions d'EPCI de la réduction automatique des taux communaux de taxe d'habitation à hauteur de la part départementale de la taxe d'habitation transférée en 2011 (dans certains cas, la loi était imprécise).
Le troisième amendement va permettre aux EPCI issus d'une fusion de récupérer la compensation accordée par l'Etat pour l'exonération de taxe d'habitation au bénéfice des personnes de condition modeste. Un vide juridique empêche aujourd'hui les EPCI créés à partir de la fusion de plusieurs EPCI d'obtenir cette compensation.
A la demande du gouvernement, un amendement définissant les modalités de mise en place d'une base minimum de cotisation foncière des entreprises (CFE) après une fusion - ou dans le cas de l'évolution du périmètre d'une intercommunalité - a été retiré pour permettre à Bercy d'en évaluer toutes les conséquences. Cette disposition pourrait faire l'objet d'une nouvelle discussion en fin d'année.

Des dispositions hétéroclites

Au-delà de ces mesures, les sénateurs de gauche ont profité de ce projet de loi de finances rectificative pour faire valoir leurs positions sur différents dossiers relatifs aussi bien à la fiscalité de l'énergie qu'à celle du logement ou encore dans le domaine de l'action sociale.
Les sénateurs sont ainsi revenus sur la redevance pour les concessions hydroélectriques, plus exactement sur les modalités de sa répartition entre l'Etat, les départements et les communes, modalités qui viennent d'être établies à l'occasion de la loi de finances pour 2012. L'objectif des sénateurs est de rétablir en partie l'équilibre au profit des communes qui ont, selon eux, été lésées.
Le Sénat a aussi voté un amendement du groupe RDSE (à majorité radicaux de gauche) qui augmente les taux applicables à la taxe sur les logements vacants. Si la mesure est confirmée par la commission mixte paritaire, le taux doit désormais être fixé à 12,5% la première année d'imposition (contre 10% aujourd'hui), 15% la deuxième année et 20% à compter de la troisième année (respectivement 12,5% et 15% actuellement). Tout en s'en remettant à la sagesse du Sénat, le gouvernement a indiqué qu'il réfléchit à "une série de mesures" contre les logements vacants. Des mesures qui devraient intégrer le projet de loi de finances pour 2013.
Les sénateurs ont décidé, enfin, de rétablir la possibilité de demander l'aide médicale d'Etat (AME) auprès des centres communaux d'action sociale (CCAS), des services sanitaires et sociaux départementaux ou encore des associations à but non lucratif agréées. Cette possibilité avait été supprimée en juin 2011 afin de réserver le recueil des demandes aux caisses primaires d'assurance maladie.
Une commission mixte paritaire (sept sénateurs, sept députés) devait se réunir ce 30 juillet pour harmoniser les positions du Sénat et de l'Assemblée nationale avant un vote définitif du collectif budgétaire le 31 juillet, dernier jour de la session extraordinaire du Parlement.