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Formation professionnelle - Philippe Caïla : "Les régions ne peuvent pas faire sans l'Afpa"

A compter du 1er avril, les 913 psychologues et conseillers d'orientation de l'Afpa passent sous l'autorité de Pôle emploi. L'aboutissement d'un long feuilleton ponctué de vives empoignades entre Etat, régions et syndicats. Bientôt propriétaire de ses locaux, l'Afpa compte à présent revoir son implantation géographique pour travailler au mieux avec les régions.

En imposant un transfert du personnel chargé de l'orientation de l'Afpa (Association nationale pour la formation professionnelle des adultes) vers Pôle emploi et le transfert du patrimoine immobilier de l'Etat vers l'Afpa avant le 1er avril 2010, la loi relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie du 19 novembre 2009 a provoqué une levée de boucliers. Les syndicats ont manifesté une réelle opposition au plan stratégique de l'Afpa, qu'ils ont associé à un démantèlement. De leur côté, les régions ont contesté les transferts de patrimoine immobilier avec force. Pourtant, le 30 mars, l'Afpa et Pôle emploi ont annoncé l'aboutissement de leur travail commun intégrant 913 psychologues et techniciens d'orientation à Pôle emploi dès le 1er avril. Pour le directeur général de l'Afpa, Philippe Caïla, ces changements étaient inévitables.

Localtis : Comment s’est opéré le transfert du personnel de l’Afpa vers Pôle Emploi ?
Philippe Caïla : Cela été un sujet difficile et très douloureux pour l’Afpa. Les psychologues sont les créateurs de la spécificité de notre association et l’orientation représentait le cœur de notre méthode. Mais c’est aussi un moment historique car cela implique la reconnaissance du haut niveau et du savoir-faire de l’Afpa. Dès lors que le gouvernement avait émis sa volonté, nous devions réaliser ce transfert du personnel dans de bonnes conditions. En s’y opposant, les organisations syndicales défendaient une certaine idée de l’intégrité de l’Afpa. De son côté, la direction a privilégié la mission de service public de l’Afpa. Après une étape de confrontation, nous sommes donc entrés dans une logique de construction avec de vraies négociations qui ont abouti à la création de la filière "transitions", une nouvelle filière dédiée au conseil en transitions professionnelles.

L’Association des régions de France (ARF) conteste le transfert de l’immobilier de l’Afpa. Qu’en pensez-vous ?
Ce débat concerne surtout l’Etat et les régions. Cependant, l’Afpa doit être un instrument essentiel entre l’Etat et les régions et non pas un enjeu. Lorsque la loi a décidé du transfert de ce patrimoine, les régions ont pensé que l’Etat voulait décentraliser l’Afpa. Ce n’est pas vrai. L’Afpa est une association de droit privé qui a passé des baux avec l’Etat. N’étant pas propriétaire du foncier, elle ne peut pas gérer son exploitation comme elle l’entend. Cette décision était donc nécessaire.

L’ARF pense que l’Afpa n’a pas les moyens de gérer ce patrimoine...
La question mérite d’être soulevée car nous allons avoir de nouvelles charges importantes avec ce patrimoine. Cependant, nous aurions eu ces charges quoiqu’il arrive car l’Etat n’aurait pas pu continuer à nous louer ce patrimoine à des prix si bas. En outre, l’ARF ne représente pas l’intégralité des régions qui n’ont pas une position unie sur cette question. Certaines souhaiteraient devenir propriétaires de ce patrimoine tandis que d’autres ne veulent pas voir leurs charges encore augmenter.

Malgré ces discordances, vous pensez pouvoir travailler harmonieusement avec les régions ?
Bien sûr. C’est pour nous une priorité. Mais ce n’est qu’une fois que l’Afpa sera devenue propriétaire de son immobilier qu’elle pourra discuter intelligemment, d’égal à égal, avec les régions. Notre vocation est aussi d’être un partenaire des régions dans leur politique territoriale de l’emploi. Pour ce faire, nous allons devoir fournir d’importants efforts de remise aux normes et repenser la cartographie des implantations de l’Afpa. En effet, nos 186 sites ne correspondent pas toujours aux besoins des bassins d’emploi. Les régions ne pourront pas faire sans l’Afpa qui est un interlocuteur majeur. Nous souhaitons donc nous entendre avec les régions mais pas question d’être inféodés.

L’Afpa est désormais l’égale d’autres agences de formation. Comment anticipez-vous cette ouverture à la concurrence ?
Nous réorientons notre action. Nous allons développer notre offre vers les salariés. On veut être présents à chaque étape : jusqu’alors, les personnes ne passaient qu’une seule fois dans leur vie à l’Afpa (souvent lorsqu’elles étaient en recherche d’emploi). Notre objectif est de devenir un organisme de sécurité professionnelle par lequel on passe plusieurs fois dans sa vie. Par ailleurs, nous répondons désormais aux appels d’offres. Les fédérations professionnelles ont voulu que l’Afpa soit leur concurrente. Nous répondrons à leur souhait. En matière de transition professionnelle par exemple, nous voulons être un des quatre grands acteurs du secteur. Nous avons une offre massive et de qualité à proposer, nous entendons bien la mettre en avant.
 

Propos recueillis par Muriel Weiss

 

L'Afpa et Pôle emploi veulent maintenir le lien

Afin de faciliter le transfert des personnels de l'orientation de l'Afpa vers Pôle emploi, les deux organismes lancent le 1er avril un nouveau service extranet baptisé "Cerise" (Centrale de réservation et indicateurs de suivis clients). L'objectif : permettre aux conseillers de Pôle emploi en charge de l’orientation de connaître en temps réel l’offre de formation de l’Afpa et les places disponibles sur l’ensemble du territoire.