Périscolaire : les collectivités engagées mais en difficulté financière
Une enquête de l'Association des maires de France met en lumière l'engagement des collectivités dans l'accueil périscolaire au primaire. Elle relève toutefois des disparités en défaveur des plus petites communes et souligne des difficultés grandissantes de financement.
"Le périscolaire doit être accompagné dans son financement par l'État." Cette phrase de Frédéric Leturque, maire d'Arras, résume la teneur de la conférence de presse que ce dernier a tenue mercredi 11 octobre 2023 aux côtés de Delphine Labails, maire de Périgueux. Les deux coprésidents de la commission de l'éducation de l'AMF (Association des maires de France) présentaient à cette occasion une enquête intitulée "Le périscolaire pour les primaires". Son but ? Dresser un état des lieux de l'offre d'activités pendant les temps périscolaires et extrascolaires, cinq ans après la dernière enquête dédiée à ce sujet, et surtout cinq ans après "le choix massif des communes de privilégier un temps scolaire sur quatre jours".
Le principal enseignement de l'enquête est que, bien que facultatif, l'accueil périscolaire est organisé par 93% des communes ou intercommunalités ayant répondu aux questions de l'AMF. Dans le détail, 93% des collectivités proposent un accueil le matin, 80% le midi et 95% l'après-midi des jours d'école. Elles sont 53% à proposer un accueil le mercredi, 47% lors des vacances scolaires et seulement 6% le week-end. Cet accueil est géré directement par la collectivité compétente dans 78% des cas, il est délégué à un tiers (association…) dans 15% des cas et fait l'objet d'une solution mixte dans 7% des cas.
Mais ici apparaît un fossé entre les différentes strates de communes, fossé que l'on retrouve dans la plupart des questions liées aux questions périscolaires : seul un tiers des communes de moins de 2.000 habitants met en place des accueils, contre 66% à 80% des communes de plus de 2.000 habitants et les deux tiers des intercommunalités compétentes.
L'échec du plan Mercredi
L'enquête s'attarde particulièrement sur le cas du mercredi, "journée stratégique dans le temps de l'enfant", selon Delphine Labails. Ici encore, la différence est marquée selon la strate de population des communes. Ainsi, 36% des communes de moins de 2.000 habitants organisent un accueil le mercredi, contre 80% pour les communes de 2.000 à 9.999 habitants, 66% chez celles de 10.000 à 29.999 habitants et 75% parmi celles de 30.000 habitants et plus.
Il en est de même pour le plan Mercredi appliqué par 23% des collectivités répondantes mais seulement 10% parmi les communes de moins de 2.000 habitants. Outre cette disparité géographique, ce plan mis en place en 2018 afin de créer "un cadre de confiance pour les familles, les collectivités et leurs partenaires" et permettre "de proposer des activités de grande qualité le mercredi", peut être considéré comme un échec. Selon Delphine Labails, ce plan n'a pas eu "d'effet levier", tandis que Frédéric Leturque estime qu'il n'a pas eu "d'effet accélérateur pour les petits communes". L'enquête avance que la moitié des collectivités ayant mis en place ce dispositif considère qu'il est moyennement satisfaisant pour mettre en place des activités périscolaires de qualité. Seules 35% le jugent tout à fait satisfaisant. Les trois principales difficultés liées à la mise en place du Plan mercredi relèvent du recrutement des intervenants extérieurs (citées à 41%), de la difficile mobilisation du personnel territorial (37%) et du financement (34%).
Dans la même logique, on constate que le PEDT (projet éducatif de territoire), "premier outil de la continuité éducative" est "en perte de vitesse". Plus globalement, Delphine Labails a déploré un "empilement de dispositifs", citant les contrats de ville, les territoires éducatifs ruraux ou les cités éducatives, et demande à ce qu'on s'interroge "sur l'articulation de tous ces outils".
À propos du mercredi, la maire de Périgueux a enfin précisé qu'un conseiller du ministre de l'Éducation nationale lui avait, le matin même, réaffirmé que le gouvernement était "attaché à laisser aux communes le libre choix de l'organisation du temps scolaire".
Un reste-à-charge "lourd"
Les difficultés à mettre en place un accueil périscolaire font également état du manque de personnel d'animation disponible, et cela bien qu'une collectivité sur deux ait mis en place des mesures pour favoriser la stabilité et l'attractivité des postes. Ainsi, 51% des collectivités rencontrent des difficultés de recrutement.
Mais si ce mode d'accueil collectif de mineurs "n'est pas à la portée de toutes les communes", c'est avant tout pour des raisons financières. Côté ressources, d'abord, on note que les communes de moins de 2.000 habitants appliquent majoritairement la tarification unique pour les accueils périscolaires, tandis que celles de plus de 2.000 habitants mettent davantage en place une tarification dégressive en fonction des revenus des familles, imposée par la CAF pour le financement des accueils déclarés. Explication : "Les contraintes administratives et le sentiment d'intrusion dans la vie des familles dans les communes de petite strate génèrent des blocages pour la mise en place de la tarification dégressive."
Côté dépenses, pour le tiers des collectivités ayant pu répondre avec précision, le coût moyen annuel brut par enfant pour les accueils du mercredi est estimé à 362 euros pour les communes et 354 euros pour les intercommunalités, un coût en hausse par rapport à 2018. Au total, sur la semaine, les communes font état d'un coût moyen annuel brut par enfant de 703 euros (743 euros pour les intercommunalités). Surtout, 72% des collectivités signalent un reste à charge financier au titre de l'organisation des activités périscolaires, une fois déduites les différentes aides financières. "Un reste à charge lourd", selon Frédéric Leturque, qui ajoute que "mobiliser autant de moyens pour les collectivités, c'est un combat". Cela est d'autant plus vrai que, dans un contexte de hausse des coûts, la grande majorité des communes a décidé de supporter cette hausse et de ne pas augmenter les tarifs, alors qu'elles constatent l'augmentation des impayés et des situations de surendettement. Et le maire d'Arras de conclure : "Le périscolaire doit être accompagné dans son financement."