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Politique de la ville - Najat Vallaud-Belkacem présente la carte de France des poches de pauvreté

La carte tant attendue des 1.300 quartiers prioritaires de la politique de la ville est désormais connue. Elle peut être lue comme "une carte des poches de pauvreté en métropole", selon l'expression employée par Najat Vallaud-Belkacem, le 17 juin, à l'ouverture des Journées nationales d'échanges de la rénovation urbaine (Jeru). C'est aussi la carte des seules communes qui bénéficieront désormais, et durant 6 ans, des crédits spécifiques de la politique de la ville. Il reste à finaliser les contours des quartiers... et les contenus des contrats de ville. Les négociations ne font que commencer...

Contrairement à Cécile Duflot qui a laissé à sa successeure au ministère du Logement quantité de dispositifs non achevés, Najat Vallaud-Belkacem hérite de François Lamy d'une réforme quasi-ficelée. Il lui reste le portage politique, qu'elle a engagé avec force et conviction en ouverture des Journées nationales de la rénovation urbaine (Jeru), mardi 17 juin, au palais des Congrès de Paris. Symboliquement, elle a annoncé le jour-même la carte des futurs quartiers prioritaires de la politique de la ville que son prédécesseur François Lamy avait bordée.
Les critères de sélection, fondés sur le revenu des habitants, étaient définis (ils avaient même été présentés en juin dernier, voir notre article ci-contre) ; les élus s'étaient faits à l'idée au fur et à mesure de l'avancée de la concertation qui avait débouché, après un débat parlementaire plutôt consensuel, sur la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.
De François Lamy, il en a été très peu question dans son discours. La ministre a en revanche rendu un vibrant hommage à Jean-Louis Borloo, présent dans la salle et dont le nom a à plusieurs reprises été applaudi par l'assistance.

Beaune, Moissac, Royan…

Quant à la nouvelle carte de la géographie prioritaire, elle comporte les 1.300 quartiers prioritaires annoncés. Cent communes bénéficieront pour la première fois des crédits spécifiques de la politique de la ville : Saverne, Gradignan, Dax, Marmande, Coutances, Beaune, Joigny, Dinan, Issoudun, Porto-Vecchio, Sochaux, Arpajon, La Ferté-sous-Jouarre, Villeparisis, le Bourget, Herblay, Guéret, Uzès, Pont-à-Mousson, Pamiers, Saint-Gaudens, Moissac, Marcq-en-Bareuil, Sains-en-Gohelle, Villers-Cotterêts, Crépy-en-Valois, Royan, Gardanne, Bellignat, Privas, Saint-Marcellin, Albertville… on ne se lasse pas d'observer la carte, de lire les nouvelles communes dont certaines évoquaient jusque-là des destinations touristiques ou des spécialités du terroir. Il n'est désormais plus question de les résumer à cela. Des quartiers pauvres, il y en a partout : "aussi bien dans les périphéries des grandes villes, qu'en centre-ville de ces communes, en villes moyennes, voire semi-rurales", décrit la ministre, "dans les barres et dans les zones pavillonnaires". C'est pourquoi, autant qu'une carte des territoires d'intervention où s'appliqueront les contrats de ville, Najat Vallaud-Belkacem y voit "une carte des poches de pauvreté en métropole" (la carte de l'Outre-Mer sera connue "à la rentrée scolaire").

Biarritz, Saint-Raphaël, Grigny…

Trois cents communes sortiront, parmi lesquelles les emblématiques Biarritz, Saint-Raphaël et Boulogne-Billancourt, citées par la ministre en exemple de celles "qui n'auraient jamais dû y entrer". Mais aussi Cachan, Achères, Oignies, Firminy, Grigny… où les politiques de la ville menées depuis 30 ans auraient porté leurs fruits.
Signalons tout de même que la plupart des communes sortantes appartiennent à une communauté d'agglomération, communauté urbaine, et parfois même communauté de communes dont la ville centre demeure dans la carte. Or, les contrats de ville étant signés sur le périmètre intercommunal, ces communes devraient toujours bénéficier d'une manière ou d'une autre de la politique de la ville.

Territoires de veille et solidarité intercommunale

Ainsi, dix communes de la communauté d'agglomération du Douaisis sortent, mais il en reste encore cinq, dont Douais. Le Lot-et-Garonne "gagne" en tout quatre communes, mais en perd aussi quatre, toutes dans la communauté d'agglomération d'Agen, alors que la ville-centre, elle, demeure…
Et si la solidarité intercommunale ne fonctionne pas à plein, restent les "territoires de veille" prévus par la loi. Najat Vallaud-Belkacem a annoncé que les préfets auront la charge d'identifier, avec les élus locaux, les territoires sortants sur lesquels ils verraient "un motif d'intervention" qui se traduirait par une "mobilisation du droit commun avec insistance". Notons au passage que cela n'aurait rien d'automatique, et que concrètement, le statut de "territoire de veille" ouvrant droit à un contrat de ville (contrat de ville comprenant uniquement des crédits de droit commun) serait donc finalement issu d'une négociation locale entre Etat et élus.

Les contours définitifs en concertation

Il reste tout de même un détail technique : la délimitation des contours définitifs des quartiers. Certains apparaissent encore sous forme de carrés agglomérés (héritage de la technique du carroyage). Il s'agit désormais de mieux les dessiner en fonction de ce que l'on a coutume d'appeler "le territoire vécu".
La circulaire adressée au préfet le 13 juin dernier par Marie-Caroline Bonnet-Galzy, fraîchement nommée commissaire générale à l'égalité des territoires (CGET), donne la marche à suivre. Le texte enjoint aux préfets d'engager la consultation auprès des communes et intercommunalités pour déterminer les contours précis des territoires cibles afin qu'ils soient "conformes aux réalités locales".
Les contours issus de la concertation seront proposés au CGET qui examinera s'ils sont conformes au décret (la publication est imminente). La consultation devra s'achever au plus tard le 30 septembre.

Des extensions de périmètre a minima

Les extensions de périmètre ne pourront être justifiées que si elles "prennent en compte des populations qui présenteraient les mêmes caractéristiques que celles repérées par les données statistiques". En clair, les contours proposés devront respecter les seuils fixés, à savoir : une population minimale de 1.000 habitants et un revenu médian inférieur au seuil de bas revenus. Ils devront être calés sur les parcelles cadastrales existantes.
L'augmentation de population ne doit pas dépasser les 10% et ne doit pas faire trop modifier le revenu médian. Pour en être sûr, un aller-retour avec l'Insee est nécessaire (compter un délai "inférieur à une semaine", assure la circulaire).
La circulaire invite les préfets à organiser la consultation "autour de l'EPCI", en vue de "faciliter son positionnement pour l'animation et la coordination du contrat de ville immédiatement après". Et prévient que le démarrage des négociations des futurs contrats de ville sera lancé "prochainement" par voie de circulaire du Premier ministre. C'est peut-être là que les choses vont réellement devenir difficiles...

 

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