Archives

Lutte contre l'exclusion - Morts de la rue : le collectif publie son rapport final sur le décès des personnes SDF

Il y a cinq mois, le collectif Les Morts de la rue rendait, place de la République à Paris, un hommage poignant aux 453 personnes "mortes dans la rue" en 2013 (voir notre article ci-contre du 10 mars 2014). Au-delà de la volonté de sensibiliser gouvernants et citoyens à un phénomène difficile à admettre, le collectif mène aussi un travail "épidémiologique" sur la nature et les causes de ces décès. Une première édition de ce travail - intitulée "Projet dénombrer et décrire : Améliorer l'exhaustivité et la description des personnes 'sans domicile fixe" décédées en France" - était parue en septembre 2013. Financée par la direction générale de la cohésion sociale, elle portait sur les chiffres de 2012.

454 décès recensés en 2013...

Le collectif vient de publier la seconde édition, couvrant les chiffres définitifs de l'année 2013. Le rapport final confirme le chiffre avancé lors de l'hommage de mars dernier, avec un total de 454 personnes SDF décédées en France l'an dernier (sur 517 décès signalés au collectif). Le rapport précise toutefois que le recensement ne peut être considéré comme exhaustif. De même, les responsables de l'étude n'ont pu recueillir l'intégralité des données pour les personnes recensées.
En dépit de ces réserves méthodologiques - dont les raisons ne sont pas difficiles à deviner -, le rapport final n'en apporte pas moins de nombreux enseignements et confirme que la situation ne s'est pas améliorée entre 2012 et 2013. Ainsi, il apparaît que les hommes forment la très grande majorité (91,3%) des morts de la rue. L'âge moyen au décès n'a rien à voir avec celui observé en population générale, puisqu'il était, en 2013, de 53,4 ans en Ile-de-France et de 48,4 ans, contre 77 ans en moyenne nationale. Dans plus d'un tiers des cas (38,5%), la cause du décès est inconnue. Lorsqu'elle est connue, il apparaît que les causes prédominantes sont les causes externes (20%) - agression, accident ou suicide -, mais aussi les cancers et les maladies cardiovasculaires. Par ailleurs, 40% des personnes décédées sont passées par un institut médico-légal, en raison d'un décès sur la voie publique ou d'une cause de mort suspecte.

... dont quinze décès d'enfants à la rue

Les chiffres du rapport final ne laissent non plus aucun doute sur le lien entre la vie à la rue et le décès précoce. Les personnes décédées ont en effet passé, en moyenne, dix ans de leur vie en situation de rue et un quart d'entre elles avaient dormi dans un lieu non prévu pour l'habitation la veille de leur mort.
Le plus inquiétant reste toutefois la forte progression du nombre d'enfants de moins de quinze ans parmi les morts de la rue. Le rapport du collectif en dénombre quinze en 2013. Les trois quarts d'entre eux étaient en situation de rue (cabanes ou caravanes sur des terrains non autorisés). Leur âge moyen était de quatre ans et cinq d'entre eux étaient des nouveau-nés. Six enfants décédés l'an denier étaient nés en France et trois autres en Roumanie. Les raisons de leur mort sont principalement des causes externes accidentelles - neuf accidents, dont quatre noyades et deux incendies accidentels -, mais on recense aussi quatre cardiopathies congénitales (aucune des grossesses concernées n'ayant été suivie médicalement) et une pneumopathie non prise en charge médicalement.
Au terme de ce "travail unique dans le paysage de la santé publique française", "cette année, le collectif Les Morts de la rue souhaite attirer l’attention des lecteurs sur le fait que des enfants de moins de quinze ans meurent de la rue et que tous les efforts ne sont peut-être pas faits pour accompagner au mieux les personnes sortant de prison".