Protection de l'enfance - Mineurs isolés étrangers : le fonds de financement de la protection de l'enfance mis à contribution
Un décret du 18 août 2015 procède à une nouvelle répartition des dépenses du fonds national de financement de la protection de l'enfance, mis en place par la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance. L'objet du fonds - dont les débuts ont été très laborieux, puisqu'il a fallu attendre trois ans pour le décret d'application - est "de compenser les charges résultant pour les départements de la mise en oeuvre de la présente loi selon des critères nationaux et des modalités fixés par décret et de favoriser des actions entrant dans le cadre de la réforme de la protection de l'enfance et définies par voie conventionnelle entre le fonds et ses bénéficiaires".
Une sous-enveloppe dédiée au financement des MIE
En l'occurrence, le décret du 18 août 2015 touche au sujet le plus sensible dans les relations entre l'Etat et les départements en matière de protection de l'enfance : la prise en charge des MIE, ou mineurs isolés étrangers (voir nos articles ci-contre). Depuis le décret du 17 mai 2010 mettant en place le fonds, celui-ci comprend deux enveloppes distinctes. La première regroupe les crédits destinés à compenser les charges résultant pour les départements de la mise en œuvre de la loi de 2007. La seconde comprend les crédits de soutien aux actions entrant dans le cadre de la réforme de la protection de l'enfance, y compris celles à caractère expérimental (aide à la parentalité, aide à la protection des enfants vivant dans la précarité économique...).
Le décret du 18 août 2015 introduit une nouvelle subdivision en éclatant la première enveloppe en deux sous-enveloppes. La première comprend désormais "les crédits destinés à être versés sous forme de dotations à l'ensemble des départements". La seconde - qui correspond à l'innovation apportée par le décret - regroupe "des crédits spécifiquement dédiés au remboursement des dépenses engagées par les départements dans le cadre du financement de la phase de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation des enfants sans représentant légal sur le territoire français".
Il appartiendra au comité de gestion du fonds de décider de la répartition entre les deux sous-enveloppes et de fixer les modalités de remboursement des dépenses engagées au titre de la seconde sous-enveloppe.
Une péréquation financière de fait
Compte tenu des fortes inégalités territoriales dans la prise en charge des MIE, le décret du 18 août 2015 instaure, de fait, une péréquation horizontale entre départements, en permettant d'accroître l'aide allouée à ceux concernés au premier chef par ces prises en charge (en l'occurrence plutôt les grands départements urbains). D'une certaine façon, ce fléchage des crédits constitue le pendant financier de la péréquation géographique instaurée - partiellement - par le protocole conclu entre la ministre de la Justice et l'Assemblée des départements de France, et qui a été pour partie annulé par le Conseil d'Etat en février dernier (voir nos articles ci-contre).
Pour mémoire, le fonds national de financement de la protection de l'enfance est abrité par la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf). Il est financé par un versement annuel de la Cnaf, arrêté en loi de financement de la sécurité sociale, et par un versement de l'Etat, fixé en loi de finances. Son comité de gestion associe des représentants de la Cnaf, des départements et de l'Etat.
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : décret 2015-1013 du 18 août 2015 modifiant certaines dispositions du décret du 17 mai 2010 relatif au fonds national de financement de la protection de l'enfance (Journal officiel du 20 août 2015).