Ile-de-France - Métropole du Grand Paris : à peine née, la mission de préfiguration est menacée de blocage

Le décret instaurant la mission chargée de mettre sur les rails la métropole du Grand Paris est paru ce jour au Journal officiel. Réclamant une révision de la loi, les élus locaux menacent de ne pas participer à ses travaux.

Etape importante sur le long chemin vers la création au 1er janvier 2016 de la métropole du Grand Paris, la mission de préfiguration de cet établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant plus de 6 millions d'habitants, est née ce 21 mai suite à la publication d'un décret au Journal officiel.
Selon l'article 12 de la loi du 27 janvier 2014 d'affirmation des métropoles, la mission est chargée de "préparer les conditions juridiques et budgétaires" de la création de la métropole du Grand Paris. En particulier, elle doit examiner la question des transferts de compétences des intercommunalités à fiscalité propre existantes vers la nouvelle entité, ce qui inclut la définition de l'intérêt métropolitain. Par ailleurs, elle est responsable du "diagnostic" nécessaire à l'établissement du projet de territoire. Enfin, elle doit préparer la réflexion sur le pacte financier et fiscal de la métropole.
La mission disposera des moyens techniques d'un groupement d'intérêt public "constitué à parts égales entre l'Etat et le syndicat mixte Paris Métropole", précise le décret. Cette structure sera présidée alternativement par le préfet de la région Ile-de-France, Jean Daubigny, et le président du syndicat mixte, actuellement Daniel Guiraud (maire PS des Lilas). Ils seront assistés d'un directeur. Le préfet François Lucas va officiellement prendre ses fonctions, même si dans les faits il a déjà commencé à travailler.

Désaccord sur le statut des territoires

Un "conseil des élus oriente les travaux de préparation des rapports" sur les compétences dévolues à la métropole. Y siégeront les maires des 123 communes, le maire de Paris, les présidents des conseils généraux franciliens, le président du conseil régional d'Ile-de-France, les présidents des EPCI de petite couronne, ainsi que deux députés et deux sénateurs.
Un "conseil des partenaires socio-économiques" est aussi créé avec 20 membres désignés par le conseil économique, social et environnemental d'Ile-de-France, 20 par le préfet de région et 20 par Paris Métropole. Il émet des "avis" préalablement aux "avis" du conseil des élus.
Mais à peine née, la mission voit déjà son existence compromise par un possible boycott des élus locaux. Le 16 mai, le syndicat mixte Paris Métropole a brandi la menace par le vote d'une résolution à la quasi-unanimité des 121 élus présents. Les élus espèrent ainsi arracher au président de la République ou au Premier ministre la décision de revenir sur l'article 12 de la loi du 27 janvier 2014. Ils réclament que les "territoires", entités de 300.000 habitants au moins situées entre la métropole et les communes, bénéficient d'un statut juridique "sui generis". Qu'ils soient dotées de ressources financières ou fiscales propres est une autre condition très importante selon eux. Absentes de la loi, ces deux qualités conféreraient aux territoires un statut proche de celui des EPCI à fiscalité propre. Leur existence s'inscrirait dans le cadre d'une vision "fédérée" de la métropole que les élus opposent à la vision "intégrée" qui serait aujourd'hui celle de la loi.

Amendement dans le prochain texte sur la décentralisation ?

Le syndicat mixte Paris Métropole a obtenu, le 19 mai, un soutien de poids, celui de la maire de Paris, Anne Hidalgo. Mais le bras de fer s'annonce difficile avec le gouvernement. Le 20 mai à l'Assemblée nationale, la ministre en charge de la décentralisation a opposé aux élus locaux une fin de non-recevoir. Pour autant, le gouvernement prend très au sérieux la menace d'un blocage des travaux de la mission de préfiguration. Le Premier ministre doit recevoir mi-juin une délégation d'élus de Paris Métropole. Le prélude à des concessions de la part du gouvernement ? Ce n'est pas impossible. Le président de la République "a évoqué la possibilité d'intégrer de nouvelles dispositions sur le Grand Paris dans un texte de loi sur la décentralisation prévu en octobre prochain", annonçaient des élus UDI consultés sur la réforme territoriale, le 15 mai dernier à l'Elysée.
Pour élaborer la carte des territoires de la future métropole, le syndicat d'études Paris Métropole doit organiser un séminaire, "mi-juin". "Les élus dessineront une première carte des territoires en partant des données de la loi ainsi que des coopérations intercommunales et des projets territoriaux existants" indique un document de travail. Ces cartes seront analysées au regard notamment des bassins de vie, des chiffres de la richesse et du chômage, de la carte des services publics et de leurs relations avec les grands pôles universitaires et les "bassins culturels et éducatifs".
Au mois d'avril, l'Atelier parisien d'urbanisme (Apur) avait lui aussi étudié plusieurs pistes pour la création des territoires (contrats de développement territorial, formes de coopération intercommunale existantes, regroupements liés aux services techniques et réseaux urbains, géographie physique…).

Thomas Beurey / Projets publics

Référence : décret n° 2014-508 du 19 mai 2014 relatif à la mission de préfiguration de la métropole du Grand Paris.