Décentralisation - L'Assemblée nationale confirme la création de la métropole du Grand Paris
Au terme de vifs débats, l'Assemblée nationale a voté, ce 12 décembre, la création au 1er janvier 2016, de la métropole du Grand Paris, nouvel établissement public de coopération intercommunale (EPCI) décrié par les élus de droite et du Front de gauche (FG). La structure regroupera Paris et sa petite couronne (Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne et Hauts-de-Seine), ainsi que les communes de grande couronne membres d'un EPCI dont le siège se situe en petite couronne, soit 6,5 millions d'habitants. Elle entraînera la disparition des 19 EPCI à fiscalité propre qui existent à ce jour en petite couronne.
Alors que le gouvernement défend un projet qui renforcera l'efficacité des politiques publiques (notamment celle du logement), le partage des richesses entre les communes et, donc, la compétitivité de la région-capitale, les députés de droite et de l'extrême-gauche ont dénoncé tour à tour "un monstre technocratique", un "gros machin", ou encore une "usine à gaz", qui ne fera qu'ajouter une couche au "millefeuille territorial" et privera les maires de leurs attributions. Candidate UMP à la mairie de Paris, Nathalie Kosciusko-Morizet a prédit une hausse de la fiscalité des Parisiens, citant une récente note du syndicat d'études Paris Métropole.
"Non au gâchis"
Tous ces arguments faisaient écho à des critiques émises par de nombreux élus franciliens, notamment dans une "pétition" et un "appel" portés par Patrick Devedjian, président UMP du conseil général des Hauts-de-Seine, et Patrick Braouezec, président FG de la communauté d'agglomération Plaine Commune. De son côté, Philippe Laurent, maire de Sceaux et président (jusqu'au 13 décembre) de Paris Métropole, avait appelé les députés, dans un communiqué, à "ne pas tuer Paris" et à dire "non au gâchis". Il avait rappelé la proposition soutenue par de nombreux élus locaux de s'appuyer sur les intercommunalités existantes pour construire une "métropole polycentrique".
Dans l'hémicycle, la majorité socialiste a balayé les amendements qui proposaient purement et simplement de revenir sur la création de la métropole. Elle a réservé le même sort à des amendements qui tendaient à permettre aux communes et aux EPCI existants de conserver leurs prérogatives, ou qui prévoyaient une consultation soit des populations, soit des conseils municipaux concernés, avant la création de la métropole.
Au final, les députés ont donc modifié à la marge le texte élaboré par la commission des lois le 27 novembre (lire notre article du 28 novembre 2013). La commission avait alors adopté un amendement présenté par la ministre en charge du dossier, Marylise Lebranchu, qui confie à la métropole des compétences en matière d’aménagement, de logement, d’urbanisme, de développement durable et d’action économique.
Les députés ont, toutefois, prévu que la métropole versera à chacune de ses communes membres une dotation territoriale métropolitaine, dispositif, qui permettra le financement des compétences rétrocédées aux communes, "lorsque celles-ci décident de confier leur mise en œuvre à d’autres personnes publiques". Ils ont aussi chargé la mission de préfiguration du Grand Paris, dans laquelle siégeront des élus locaux, d'élaborer la carte des territoires, des ensembles d'au moins 300.000 habitants qui composeront la métropole. Ils ont encore donné leur accord pour que le gouvernement prenne par ordonnance les mesures de nature législative, en vue de préciser les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables de la métropole, de même que s'agissant du fonctionnement des conseils de territoire.
Une métropole sans départements ?
Les débats ont pris un tour passionnel lors de l'examen de la proposition du député PS Alexis Bachelay d'un rapport, d'ici fin 2015, pour étudier la fusion des départements de Paris et de la petite couronne au sein du Grand Paris. "Les départements vont rapidement apparaître inutiles car leurs compétences pourront être transférées à un autre échelon", a plaidé le député. Il a finalement retiré ses amendements après l'engagement de la ministre de la Décentralisation que le gouvernement remettrait "un rapport, par exemple pour janvier 2015, au Parlement sur les modalités de suppression du département sur le périmètre de la métropole du Grand Paris et toutes les conséquences".
Dans un communiqué, les deux ministres en charge de la décentralisation ont salué le vote de l'Assemblée, qui ouvre la voie à un effort "sans précédent" de "rationalisation de l'organisation administrative de Paris et de la petite couronne".
Les députés ont achevé jeudi après-midi l'examen du projet de loi, sur lequel ils devaient se prononcer dans la foulée. Le 17 décembre, ils tenteront de trouver un compromis avec le Sénat, ce qui s'annonce difficile. Les deux assemblées devraient donc, ensuite, examiner le texte en nouvelle lecture. L'Assemblée nationale aura le dernier mot.