Santé - Lutte contre l'obésité : les villes en première ligne
A l'occasion de sa réponse à une - longue - série de questions écrites portant sur la prévention de l'obésité, le ministère de la Santé fait le point sur cet aspect essentiel de la politique de santé publique. Cette soudaine inquiétude des parlementaires s'appuie notamment sur la récente publication des résultats d'Obépi 2012, enquête épidémiologique nationale sur le surpoids et l'obésité, menée par l'Inserm, les laboratoires Roche et Kantar Health. Portant sur les personnes de 18 ans et plus, celle-ci dénombre 14.807.123 - le chiffre est précis ! - Français en surpoids et 6.922.215 obèses, pour 24.158.990 adultes ne présentant pas de surpoids. Près de 15% de la population est aujourd'hui obèse, contre une prévalence de 8,5% il y a douze ans.
La réponse ministérielle se veut toutefois plus rassurante. A la différence d'Obépi, elle se concentre en effet sur les enfants. Elle rappelle tout d'abord que "la prévalence de l'obésité infantile s'est stabilisée depuis 2000, voire commence à diminuer selon l'enquête récente de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees)". Il reste qu'un enfant sur six présente encore un excès de poids et que "cette tendance à la baisse ne doit cependant pas masquer l'accroissement des inégalités sociales dans ce domaine". La réponse ministérielle rappelle également un certain nombre de mesures mises en œuvre par les pouvoirs publics, notamment dans le cadre du programme national Nutrition Santé (PNNS) : large diffusion des repères nutritionnels, signature d'une charte avec les représentants des secteurs des médias et de l'industrie alimentaire visant à développer les informations sur les comportements alimentaires et l'importance de l'activité physique, instauration en 2012 d'une taxe de 7,16 euros par hectolitre sur l'ensemble des boissons avec ajout de sucres ou d'édulcorants...
Mais le ministère de la Santé insiste aussi sur le fait que "le rôle de proximité des collectivités territoriales est à cet égard particulièrement important". Il rappelle en particulier que 308 collectivités sont à ce jour "villes actives du programme national Nutrition Santé". Ces collectivités couvrent une population de 12,85 millions d'habitants. La participation au réseau des villes actives du PNNS se traduit par l'engagement de la collectivité à désigner un référent "actions municipales du PNNS" et à mettre en œuvre, chaque année, au moins une action issue de la liste proposée par le PNNS ou une action innovante et conforme au PNNS. Les actions menées - dont le site du réseau fournit de nombreux exemples - sont très diverses. Il s'agit principalement d'actions d'éducation et d'information conduites auprès des publics scolaires : modification de l'offre de service, développement d'activités physiques, ateliers nutrition, animations autour des repas, pédagogie sur les repères nutritionnels... Le site du réseau met également à disposition de nombreux outils, conçus le plus souvent par l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes).
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : Sénat, question écrite n°04506 de Marcel Rainaud, sénateur de l'Aude, et réponse du ministère des Affaires sociales et de la Santé (JO Sénat du 28 mars 2013).
Prévalence d'obésité en outre-mer : une loi pour contrer une problématique majeure de santé publique
Rappelant que 25% des enfants et adolescents et plus d'un adulte sur deux est touché par des problèmes d'obésité ou de surpoids dans les DOM-TOM, les députés français ont adopté le 27 mars dernier, en première lecture, une proposition de loi socialiste qui "tend à prohiber la différence de taux de sucre entre la composition des produits manufacturés et vendus dans les régions d'outre-mer et celle des mêmes produits vendus dans l'Hexagone". Sodas et yaourts sont entre autres en ligne de mire. À titre d'exemple, la proposition de loi avance que pour 250 ml de soda Fanta orange distribué aux Antilles, on relève 34g de glucides contre 24g pour celui distribué dans l'Hexagone.
Pourquoi un même produit vendu sur le continent et en outre-mer serait-il jusqu'à deux fois plus sucré ? Victorin Lurel, ministre de l'Outre-Mer, pointe, pour sa part, le rôle des industriels qui auraient, selon lui, des préjugés "selon lesquels les habitants des outre-mer seraient plus friands de sucre que les autres Français". "Le fameux goût sucré des ultramarins, c'est un argument des professionnels. On nous a très certainement conditionnés à aimer sucré, et dès le plus jeune âge", a souligné de son côté Hélène Vainqueur-Christophe, députée de Guadeloupe et rapporteure du texte, qui a pointé quant à elle "une inégalité flagrante entre les consommateurs".
Que dit alors cette proposition de loi ? L'article 1 mentionne "qu'aucune denrée alimentaire de consommation courante destinée à être présentée au consommateur final ou aux collectivités dans les régions d'outre-mer ne peut contenir, à compter du 1er janvier 2014, davantage de sucres que le produit similaire de même marque vendu en France hexagonale". L'article 2 dispose donc qu'un arrêté du ministre chargé de la santé publique détermine, après avis du Haut Conseil de la santé publique, le taux de sucre maximal entrant dans la composition de ce type de produits. Le texte prévoit que le taux de sucre maximal qui entre dans la composition des produits alimentaires soit identique partout en France et extrapole en souhaitant par la même loi mettre fin au dispositif de double étiquetage lorsqu'il s'agit de la date limite de consommation des produits périssables. Un double étiquetage qui autorise par exemple, pour la quasi-totalité des yaourts, une limite de consommation de 30 jours en métropole et de 55 jours en outre-mer. Une double tromperie (sur l'ajout de sucre non mentionné et une date de péremption largement reculée) qui va enfin prendre fin. Composé de quatre articles, "le texte devrait faire consensus, assure la rapporteure du texte : c'est un vrai problème de santé publique avec l'obésité et toutes les pathologies associées, et un vrai souci d'inégalité entre consommateurs".
Le texte de loi prévoit aussi de modifier l'article 53 du Code des marchés publics afin de favoriser la production locale via des circuits courts lors de l'attribution des marchés publics de restauration collective, et notamment scolaire.
La loi s'appliquera dans les départements d'Outre-mer (Guyane, Guadeloupe, Martinique, la Réunion, Mayotte), ainsi que dans les collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon. La Polynésie française, la Nouvelle Calédonie et Wallis-et-Futuna ne sont pas mentionnés car ils ont leurs compétences propres en matière de santé.
Victorin Lurel doit se satisfaire de l'adoption de cette proposition, qu'il avait défendue en 2011 alors qu'il était député guadeloupéen, repoussée à 10 voix près. Le texte devrait passer au Sénat en mai.
La réinscription du texte au Parlement avait été une des promesses de François Hollande.
S.T. avec AFP