Télécoms - Licences 4G : l'aménagement numérique du territoire en recul, selon l'Avicca
Un délai de déploiement rallongé de 12 à 15 ans et une "zone prioritaire" ramenée de 26 à 18% de la population : c'est ce que relève l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca) dans le projet de décision de l'Autorité de régulation (Arcep) pour l'attribution des futures licences mobile de quatrième génération (4G). La priorité affichée à l'aménagement numérique du territoire ne serait-elle alors qu'un artifice de communication pour masquer une opération financière profitable pour l'Etat et les opérateurs de téléphonie mobile dominants ?
Pourtant, dès juillet 2010, l'Arcep avait publié dans sa consultation publique des exigences nouvelles d'aménagement numérique des territoires pour l'attribution des fréquences de téléphonie mobile 800 MHz et 2,6 GHz : un concept de zone prioritaire pour 26% de la population et 74% du territoire (soit 30% de plus qu'actuellement), la fixation de minima départementaux (couverture de 90% de la population), ainsi que le mécanisme de partage pour diminuer les zones grises. "Dans le projet de décision publié en mai 2011, les exigences minimales sont, au contraire, en retrait par rapport au texte précédent", alerte l'Avicca.
Le taux de couverture finale de la population proposé (99,6%) régresse ainsi de 0,2 point par rapport au 99,8% désormais atteint dans le déploiement de la deuxième génération (2G ou GSM) grâce notamment à la mutualisation des antennes-relais. "Ces écarts de deux dixièmes de points peuvent sembler infimes, mais signifient concrètement que la population ainsi exclue varie du simple au double", insiste le président de l'association et du conseil général de l'Oise, Yves Rome. "Le minimum départemental s'apparente, quant à lui, à un minimum minimorum, tant il a été fixé bas (90%)", poursuit-il. Ce taux représente en effet "une très faible contrainte pour les deux opérateurs dominants [ndlr : Orange et SFR] qui n'atteignent pas ce seuil sur six départements seulement". Un taux de 95% aurait, selon l'Avicca, poussé davantage à la mutualisation.
"Il y a donc eu des coupes franches entre-temps, probablement dues à la volonté de maximiser le rendement des licences, et à la pression des opérateurs", accuse la note précise et argumentée de l'Avicca. Pour les experts des télécoms dans les collectivités, les critères fixés correspondent à une logique de concurrence par les infrastructures, dans l'esprit du plan du très haut débit de fibre optique. Les critères établis et négociés au préalable poussent ainsi à la hausse, par compétition entre les opérateurs, le montant des licences afin de remplir les exigences comptables du Gouvernement. Lequel voudrait bien valoriser de 2 à 2,5 milliards d'euros ses ressources rares que sont les fréquences radios.
En outre, l'attribution de délais supplémentaires pour le déploiement de la 4G irait également dans ce sens de la concurrence par les infrastructures en offrant du temps (et donc des marges financières) aux opérateurs pour financer leurs réseaux en propres au détriment d'une mutualisation des équipements alors que les pylônes sont pour la plupart déjà en place.
Au final, entre aménagement numérique durable du territoire, d'une part, et rentabilité immédiate à des fins d'équilibre budgétaire, d'autre part, les décideurs des finances et des télécoms n'auraient pas mis longtemps à trancher. Les élus ruraux, qui se réjouissaient déjà d'une meilleure prise en compte des zones moins denses, apprécieront.