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Innovation - Les pôles de compétitivité invités à sortir du "carcan territorial"

Nécessaire au départ, la dimension territoriale des pôles de compétitivité se justifie de moins en moins. Pire, ce serait un handicap à leur développement, voire un danger. C'est le constat du rapport de la Mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances de l'Assemblée nationale remis le 23 août 2009. Mauvaise nouvelle pour les régions qui ont de fortes velléités dans ce domaine et qui, surtout, investissent de plus en plus (sur la période 2005-2008, les collectivités ont apporté 383 millions d'euros aux pôles, soit 20% du total). "Il faut que les collectivités comprennent que leur action concourt avant tout à l'intérêt général, il ne faut surtout pas entrer dans le débat sur le retour sur investissements, c'est la différence entre sponsoring et mécénat", explique le député d'Eure-et-Loir, Jean-Pierre Gorges, coauteur du rapport. Pour les députés, il faut privilégier à présent le travail en réseau. "Le territoire ne doit pas être un carcan, si on s'enfonce dans cette logique, le pôle peut finir par mourir", estime encore Jean-Pierre Gorges. En clair, la compétitivité doit l'emporter sur la logique territoriale.

A quelques jours de la nouvelle vague de labellisation de pôles spécialisés dans les écotechnologies (la phase "2.0") annoncée pour le 2 octobre, les conseils des députés arrivent à point nommé pour corriger le tir. Car leur constat est assez sévère. Les pôles n'ont pas rempli leur première mission : rapprocher les mondes de la recherche et de l'entreprise. "Ils ne favorisent pas suffisamment le passage de la recherche fondamentale à la valorisation industrielle", constatent-ils. Les députés déplorent l'empilement des dispositifs de soutien de la recherche - pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES), réseaux thématiques de recherche avancée (RTRA), instituts Carnot, etc. – sans coordination avec les pôles.
 

Neuf mois pour une subvention

Les dispositifs de financement sont jugés trop longs et complexes : neuf mois pour obtenir une subvention, avec de nombreux intervenants (fonds unique interministériel, Agence nationale pour la recherche, Oséo, Caisse des Dépôts). Et pour un résultat décevant : seulement 76% des crédits ont été consommés. Les députés proposent un dossier unique de demande d'aide valable pour l'ensemble des financeurs. Ils demandent que le transfert du FUI vers Oséo soit accéléré, alors qu'il est prévu qu'il soit effectif pour le neuvième appel à projets attendu dans les prochains jours. La solution passe aussi, selon eux, par un recours accru aux financements privés (business angels, banques, capitaux risqueurs, fonds de capital-rique régionaux, etc.).
Le rapport propose par ailleurs de consacrer la part non-consommée, soit environ 25%, à la maturation des projets lors de la phase 2.0. Une façon de combler le vide entre fonds publics et privés, vide souvent préjudiciable aux PME. Un fonds dédié à la maturation des projets de recherche innovants serait créé à cet effet.
Mais les députés réclament également plus d'exigence. Ils envisagent la création d'un label "eco-tech" en faveur des pôles existants réalisant plus de 50% de leurs projets de recherche dans les écotechnologies. Par ailleurs, ils suggèrent que les crédits soient conditionnés désormais à la réalisation des objectifs contenus dans les nouveaux "contrats de performance". Les treize pôles pointés du doigt lors de l'audit de 2008 sont particulièrement visés. Une nouvelle évaluation menée à l'automne 2009 par le gouvernement devrait décider de leur sort. Certains ont déjà amorcé un redressement, d'autres, à l'image des pôles MTA et Mov'éo cette année, devraient être amenés à se rapprocher. Pour ceux qui n'auront pas redressé la barre, la "délabellisation" semble se rapprocher. C'est en tout cas la solution envisagée par les députés.
Le gouvernement a deux mois à présent pour répondre aux députés par écrit.
 

Michel Tendil

 

 

Référence : rapport des députés Alains Claeys, Jean-Pierre Gorges et Pierre Lasbordes en conclusion des travaux de la Mission d'évaluation et de contrôle sur les perspectives des pôles de compétitivité, présenté le 23 septembre 2009.