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Innovation - Y a-t-il trop de pôles de compétitivité ?

Les pôles de compétitivité sont-ils des outils dédiés à l'aménagement du territoire, au développement de la recherche ou destinés à fédérer grandes entreprises, PME et laboratoires ? C'est en ce sens que s'est interrogée ce 7 avril la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances de l'Assemblée nationale, dans le cadre d'une série d'auditions menées sur l'évaluation et les perspectives des pôles de compétitivité.
"Je me pose la question : est-ce qu'il n'y a pas deux schémas différents, avec une quinzaine de pôles spécialisés qui sont orientés sur la recherche et d'autres davantage orientés sur des problématiques plus régionales, d'aménagement du territoire ?", explique Jean-Pierre Gorges, député UMP d'Eure-et-Loir. A cette question, les deux responsables de l'évaluation des pôles menée l'an dernier restent prudents. Pour Philippe Bassot, vice-président de CM International, les pôles servent surtout à fédérer les différents acteurs. Laurent Blivet, manager de The Boston Consulting Group, estime pour sa part que la politique des pôles est suffisamment flexible pour remplir les trois rôles simultanément. Mais une chose est sûre : au sein des pôles eux-mêmes, la vision n'est pas la même. "Quand on demande aux pôles directement, ils n'ont pas la même perspective que nous", a ainsi expliqué Laurent Blivet.
Derrière ces interrogations, se cache l'éternelle question du nombre souhaitable de pôles. "Fallait-il faire émerger seulement quinze pôles de dimension mondiale ou bien promouvoir une politique de développement économique régionale avec une multitude de pôles ?", a ainsi résumé Philippe Bassot. Si la France a fait le choix de voir plus de 70 pôles émerger, les financements sont toutefois concentrés sur ceux qui ont une dimension internationale : "80 à 85% des financements vont à quinze pôles, a précisé Laurent Blivet, et la structuration du dispositif, avec les appels à projets, fait qu'il y a de fait une concentration des ressources financières."

 

Envisager des délabellisations

Les membres de la mission d'évaluation ont également cherché à connaître les critères qui ont permis aux deux cabinets de mettre en évidence, parmi les 71 pôles de compétitivité, 39 bons élèves, 19 pouvant mieux faire et 13 devant être reconfigurés en profondeur. Trois critères principaux ont été pris en compte : la stratégie développée par le pôle, la gouvernance mise en place et la dynamique du pôle. Les moins bons élèves, qui ont un an pour faire leurs preuves, n'ont obtenu qu'un critère sur trois... Quant aux délabellisations, les deux cabinets considèrent qu'elles sont clairement envisageables. "Des pôles qui n'arriveraient pas à faire la preuve de leur valeur ajoutée devraient être délabellisés et auraient vocation à disparaître, a assuré Laurent Blivet. S'il y a des objectifs très clairs, il sera plus facile aux financeurs de délabelliser des pôles ou de diminuer leur financement."
La mission a aussi interrogé les deux responsables de l'évaluation sur le caractère considéré comme trop "directif" de l'Etat. "Pour les pôles, il y a deux patrons en plus du conseil d'administration : l'Etat, et les régions, qui financent parfois plus de 50% du fonctionnement des pôles, a expliqué Philippe Bassot. Ce côté schizophrène n'est pas évident à gérer, mais plus que le dirigisme de l'Etat, c'est le message brouillé donné par les différents ministères qui gênent les pôles." Enfin, la mission a demandé des précisions sur l'impact des pôles en matière d'emploi. Mais pour le moment, personne n'est capable de dire combien d'emplois les pôles ont créé. "Les pôles ont été avant tout créés pour pallier le faible niveau de R&D, a précisé Philippe Bassot. Si cet effort d'innovation se traduit en emplois, c'est un deuxième cran." La mission doit encore auditionner une vingtaine de personnes, et visiter trois pôles de compétitivité - Systém@tic, Cosmetic Valley et MTA - avant de rendre son rapport en septembre 2009.

 

Emilie Zapalski