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Logement social - Les offices publics de l'habitat logent les gens modestes, et un peu plus encore

L'innovation dans le logement social, ce n'est pas seulement les bâtiments à énergie positive et les appli smartphone pour fluidifier la relation locataire-organisme HLM. La Fédération des offices publics de l'habitat (OPH) le prouve avec la belle moisson des résultats de son appel à projets 2016 sur sa conception de l'innovation dans le logement social.

Avec son appel à projets "Nouvelles attentes, nouveaux services : les offices au cœur des projets sur les territoires", la Fédération nationale des offices publics de l'habitat (OPH) entend démontrer que sa mission ne se résume pas à loger les personnes à revenu modeste, mais qu'elle inscrit son "action dans le développement, la cohésion et l'équilibre des territoires". "Ce qui fait la force et la place des offices, c'est notre implication sociétale qui répond aux besoins différenciés des territoires", dit-on avec fierté à la Fédération. Une "force" et une "place" qui ne sont certainement pas étrangers au fait que les OPH sont présidés par des élus locaux et rattachés à des communes (en tous les cas jusqu'au 1er janvier 2017, voir notre article ci-contre du 2 septembre 2016), intercommunalités ou départements.
Lancé en janvier 2016 auprès des 260 OPH de la Fédération, l'appel à projets a séduit 38 organismes qui ont présenté 43 projets (un même organisme pouvait présenter plusieurs projets). Les quatre lauréats sont : Drôme Aménagement Habitat pour la réalisation de cinq maisons médicales ; Pas-de-Calais Habitat pour son dispositif "Un jeune, un logement" ; Est Métropole Habitat pour la promotion de "Nouveaux modes de consommation au cœur des quartiers" et Plaine Commune Habitat pour son opération "Logement et santé mentale".
Deux mentions spéciales ont été accordées à Moulins Habitat pour une résidence intergénérationnelle et à Tarn Habitat pour une opération de restauration immobilière mettant en valeur un patrimoine historique remarquable. Proclamés lors de l'assemblée générale des OPH en mai dernier (voir notre article du 31 mai 2016), la remise des prix s'est déroulée le 27 septembre durant le congrès HLM de Nantes.

Cinq maisons de santé, cinq montages sur mesure

Confrontées au départ à la retraite de médecins généralistes et aux difficultés liées à leur remplacement, plusieurs communes de la Drôme ont interpellé le conseil départemental pour les aider à produire des maisons de santé pluridisciplinaires, notamment dans l'arrière-pays. Durant quatre ans, Drôme Aménagement Habitat a joué le rôle d'"ensemblier", sans perdre de vue sa mission originelle de bailleur social. Pour répondre aux demandes en évitant les risques financiers, l'OPH a utilisé deux types de montage : la construction/vente et la construction/gestion.
A Tain-l'Hermitage, la maison médicale a été réalisée en complément d'une opération d'acquisition/amélioration de vingt logements et l'équipement a ensuite été vendu à une SCI de cinq médecins généralistes. A Anneyron, elle a été réalisée en complément de cinq logements et l'équipement a ensuite été vendu pour partie à la communauté de communes des Portes de Drôme Ardèche et pour partie à trois professionnels de santé (dentiste, opticien et pharmacien). A Nyons, l'équipement a été construit puis loué par bail à neuf professionnels de santé. Au Grand-Serre, il a été construit puis loué par bail à un pharmacien et à six professionnels de santé.
A Luc-en-Diois, la maison de santé a été réalisée dans le cadre d'un réaménagement du quartier : il est complémentaire d'une maison d'accueil rurale pour personnes âgées (Marpa) de 22 logements + 1 logement de gardien, de six logements sociaux et de six lots à bâtir libres de construction. Elle accueille six professionnels de santé.

#1jeune1logement chez Pas-de-Calais Habitat

Expérimenté depuis plus d'un an par Pas-de-Calais Habitat sous l'impulsion du conseil départemental, le programme #1jeune1logement est composé de trois mesures. Lancé en mars 2015, le dispositif "Loyer tout compris" s'adresse aux jeunes de moins de 30 ans, seuls ou en couple sans enfant, en recherche d'un premier logement. Il leur est proposé un logement social à la location où toutes les charges sont incluses : loyer, charges locatives, charges liées à l'énergie et aux fluides. Trente-trois logements sont dédiés au dispositif. Ils sont situés "dans les grandes villes du département et près des centres urbains". Ils sont pré-équipés (espace cuisine et éléments de rangements). Un accompagnement social est organisé dans le mois qui suit leur arrivée, avec aide à la gestion du budget logement, sensibilisation aux éco-gestes, conseils administratifs... Trente-six jeunes ont bénéficié du dispositif depuis son lancement, cinq d'entre eux ont depuis quitté définitivement leur logement. Son coût s'élève à 104.800 euros, dont 99.000 euros pour l'aménagement des logements et 5.800 euros pour l'accompagnement social.
Mis en place en janvier 2015, le fonds d'aide "Idée de Gen Y" soutient, jusqu'à 500 euros, les jeunes locataires (ou enfants de locataires) dans leurs projets : gala de danse, concours de chant, jardins partagés, voyage humanitaire au Sénégal... sont parmi les premiers projets soutenus. Depuis son lancement, 15 projets ont été financés pour un montant déboursé de 7.300 euros.
Le "bouclier fiscal" est une "remise sociale" permettant de limiter le taux d'effort de 25% à tous les locataires de moins de 30 ans. Il bénéficie aujourd'hui à 135 locataires, qui voient ainsi leur loyer baisser de 75 euros par mois en moyenne.

Un programme "Logement et santé mentale" à Plaine Commune Habitat"

Plaine Commune Habitat développe depuis 2015 le dispositif "Logement et santé mentale", un programme pluriprofessionnel pour l'accès au logement et le maintien dans les lieux de ses locataires souffrant de troubles psychiques. A ce jour, plus de 80 personnes ont été prises en charge dans ce cadre. La plateforme s'appuie sur une équipe constituée de deux psychiatres, d'un éducateur, d'un infirmier, de travailleurs sociaux et d'une association en charge de la gestion des baux glissants.
Deux grands objectifs guident l'action de la plateforme : le maintien dans le logement (les locataires concernés bénéficient d'un accès à une prise en charge médicale, sanitaire et sociale) ; l'accès au logement (des logements en bail glissant sont dédiés aux patients demandeurs de logement et suivis par le secteur psychiatrique).
A l'origine de ce projet, il y a le repérage de locataires isolés et psychologiquement fragiles, qui ne bénéficient pas de prise en charge adaptée. "Ces situations sont souvent mises en évidence par des cas d'agressions, de violences ou de conflits de voisinage signalés par les équipes de proximité, les locataires ou parfois les partenaires", indique l'OPH. "Il s'agit aussi de préserver un environnement serein et de maintenir des relations paisibles entre les habitants des résidences de Plaine Commune Habitat", précise-t-il.
Pour concrétiser le projet, l'office a collaboré avec l'établissement public de santé Ville-Evrard et la ville de Saint-Denis. Il a également obtenu une subvention de 150.000 euros dans le cadre de l'appel à projets sur l'innovation sociale lancé par la Dihal (direction interministérielle à l'hébergement et l'accès au logement).

Est Métropole Habitat : "Nouveaux modes de consommation au cœur des quartiers"

Est Métropole Habitat, OPH du Grand Lyon, a élaboré une offre de "commerces de toute proximité" dans quatre QPV (quartiers prioritaires de la politique de la ville), dont trois sont des quartiers Anru caractérisés par "une forte précarité et une offre limitée, voire inexistante, de commerces de proximité". Cette offre de service se compose de trois projets. L'association Légum'Au'Logis propose, depuis 2011, un système de paniers de produits fermiers locaux, sans abonnement ni engagement, avec "un système de double tarification (sociale et solidaire)". L'OPH aide à hauteur de 15.000 euros par an (dont la mise à disposition gratuite des locaux).
Créée en septembre 2014, l'association Vrac (Vers un réseau d'achat en commun), co-portée avec la fondation Abbé-Pierre, est axée sur les produits secs et d'hygiène, le plus souvent certifiés en bio, à des prix négociés en gros. Elle envisage de proposer des services "de qualité à des prix négociés" dans des domaines aussi divers que l'assurance-habitation, l'offre internet ou encore les cours de conduite. L'OPH aide à hauteur de 10.000 euros par an (dont la mise à disposition gratuite des locaux).
Enfin, l'Epicerie mobile est un camion magasin qui s'installe une demi-journée par semaine, sur un emplacement fixe au cœur d'un quartier. Elle propose "tous les produits que l'on n'y trouve pas habituellement" : produits frais en circuit-court, viande, fromage, crèmerie, fruits et légumes, pain, œufs, mais aussi produits secs (huiles, farine, café, etc.) L'OPH met à disposition un terrain via une convention de partenariat (pour déroger à l'interdiction d'utilisation des espaces publics par des camions pizzas, épicerie et food-trucks) et a financé les travaux de raccordement (2.000 euros).
A noter que des collaborateurs de l'office fréquentent aussi ces commerces. Le fait de s'y croiser "permet une modification des rapports", note l'OPH. Cela a également permis de repérer des habitants "relais et moteurs" qui s'investissent désormais dans les actions de concertation autour du renouvellement urbain.