Congrès HLM 2016 - CAP HLM : 45 propositions pour fabriquer le logement social du futur
La "fabrique collective" CAP HLM a produit 45 propositions réunies dans un rapport présenté au congrès HLM de Nantes et discutées tout au long des 27, 28 et 29 septembre devant plus de 4.000 congressistes. Intitulé "L'innovation pour tous", le document a été adopté en clôture.
Mais CAP HLM, ce n'est pas uniquement un document de 75 pages qui vient alourdir la mallette. Ce fut d'abord une démarche participative ayant stimulé les organismes HLM depuis janvier 2016. Et cela devient la feuille de route du mouvement pour les années à venir. L'Union sociale pour l'habitat (USH) aimerait aussi inspirer les candidats aux élections présidentielles. Petite sélections parmi les 45 propositions.
Construire l'autonomie énergétique du patrimoine HLM
Frédéric Paul, délégué général de l'USH s'y voit déjà : "Nous allons construire l'autonomie énergétique du patrimoine HLM", sans perdre de vue la baisse des charges locatives que cette autonomie pourrait entraîner. Le mouvement HLM s'inscrit là dans la droite ligne d'Acte HLM 2016-2017 (Agir pour le climat et la transition énergétique) signé il y a un an au congrès HLM de Montpellier (voir notre article du 25 septembre 2015). Pour y parvenir, les organismes réclament le droit à "l'expérimentation technique et sociale", pour tester des idées telles que les stationnements mutualisés, l'auto-partage, les services mutualisés... (proposition 16) ou encore des projets d'aménagement durable et de biodiversité favorisant la réduction de la consommation des ressources naturelles (énergie, eau, déchets) (proposition 21). CAP HLM invite également les organismes à prendre leur place dans les projets de territoires visant à soutenir la croissance verte (proposition 19).
La mixité passe par la qualité des services urbains
"Faire des quartiers HLM des quartiers comme les autres" est l'un des cap, pas vraiment nouveau, mais toujours incontournable et plus que jamais d'actualité. Pour le mouvement HLM, "comme les autres", cela veut dire : avec les mêmes services que les autres parties de la ville en termes de sécurité publique, d'écoles, de moyens de transport... "Sans services urbains, les classes moyennes ne viendront pas", expliquent les professionnels du logement social. Ce qui fait de la qualité des services urbains le seul moyen, selon eux, de réintroduire de la mixité sociale dans des quartiers aujourd'hui ségrégés.
Mais pour faire ces "quartiers comme les autres", il faudrait, quand les dysfonctionnements sont trop criants, pouvoir repartir à zéro. Les organismes demandent des moyens pour la démolition du parc obsolète, et sa reconstitution dans un objectif de mixité (proposition 5). Ils suggèrent également de faire appel à des "OIN (opérations d'intérêt national) de solidarité" pour les quartiers caractérisés par une grande insécurité et une grande ségrégation sociale (proposition 6). "C'est-à-dire une reprise en main par la puissance publique", résume Frédéric Paul. Le retour de l'Etat dans le financement des opérations Anru, annoncé par le Premier ministre, Manuel Valls, en ouverture du congrès (voir notre article du 28 septembre 2016 "Il faut organiser le retour de l'Etat dans le financement de l'Anru", annonce Manuel Valls), constitue en cela "un signe" dont s'est félicité Jean-Louis Dumont, président de l'USH.
Cartographier l'occupation pour affiner la politique d'attribution
Le mouvement HLM se donne aussi pour cap de "réduire la fracture numérique à horizon de cinq ans". Dans ce cadre, et anticipant ce que lui demandera la loi Egalité et Citoyenneté, le mouvement HLM se lance dans la conception et l'analyse des cartographies de l'occupation. Ces outils ont vocation à partager la connaissance, l'analyse et la situation de l'occupation sociale du patrimoine et du fonctionnement quotidien des immeubles. Et cela dans l'objectif de mettre en œuvre des politiques d'attribution plus fines que ce qui se fait aujourd'hui (proposition 29).
Le mouvement HLM entend également développer des services numériques destinés à "améliorer et simplifier les échanges et les réponses" avec les locataires et les demandeurs de logement social. Il s'agit de l'ouverture d'une "plateforme web nationale" qui informerait le demandeur en permanence sur les logements disponibles à la location et à l'achat et qui donnerait un sens à la "location active" (proposition 27).
Services innovants aux locataires ou "gadgets" ?
Le mouvement entend également mettre le cap sur l'amélioration de la qualité de service rendu aux locataires et aux accédants à la propriété, via le "conciliateur national interne" (proposition 39). Cette personne est déjà nommée par les instances du mouvement HLM. Il s'agit de Jean-François Lapierre, jusque-là directeur d'Actis, l'OPH de la région grenobloise. Son rôle serait opérationnel à la mi-octobre. Il consistera à "traiter les situations de non-qualité dans le parc social", sachant que ces situations d'ascenseurs cassés, de cages d'escalier souillées ou de trafic en pied d'immeuble ne relèvent pas uniquement de l'acteur HLM, parce qu'elles peuvent venir de défaillances des services de la ville ou encore des forces de police. Bref : faire en sorte que chacun cesse de se "renvoyer la patate chaude".
Dans cet esprit de qualité de service, le mouvement a le projet de mettre en place un "plan de développement de proximité augmentée". L'idée est d'utiliser les technologies numériques pour renforcer et "fluidifier" les relations avec les locataires, tracer et suivre les interventions (proposition 30). Des "innovations gadgets !", estime Simone Bascoul, présidente de la CLCV. "C'est quand même plus intéressant de parler à son gardien qu'à son smartphone", ajoute cette représentante des locataires.
Les HLM, un acteur économique singulier
Le mouvement veut aussi contribuer à l'emploi de ses locataires, par le biais de la création d'une "fondation HLM pour l'emploi" partenariale.
Se revendiquant acteurs économiques et sociaux, les organismes HLM ont repéré trois leviers d'action en matière d'emploi. D'abord ils sont de grands donneurs d'ordre et investissent 16,8 milliards d'euros chaque année rien qu'en "achat". Pour preuve, il suffit de se promener dans les allées du salon H'Expo, qui se tient en parallèle au congrès HLM, pour se rendre compte du marché. Le salon accueille cette année 330 exposants, soit 10% de plus que l'année dernière, dans les secteurs financier et du BTP, mais aussi des alarmes-sécurité, appareils sanitaires, architecture, ascenseurs, chauffage-climatisation, toiture-isolation, luminaires, revêtement des sols et murs, ventilation…
Les organismes HLM sont aussi des employeurs (82.000 salariés, 10.000 offres d'emploi sur trois ans) et orientent leur politique RH en direction des personnes en insertion professionnelle via des contrats aidés (*) et l'alternance. Enfin, troisième levier d'emploi qu'ils peuvent actionner : ils sont détenteurs et gestionnaires de locaux d'activité à coûts abordables, notamment en pied d'immeuble.
Valérie Liquet
(*) 308 organismes HLM ont embauché, en 3 ans, 1.775 jeunes en emploi d'avenir, ce qui représente 2.200 contrats (avec les renouvellements des CDD). S'y ajoutent 200 emplois indirects créés en lien avec les régies de quartier. 39% des jeunes habitent dans "des secteurs classés en zone sensible".