Société numérique - Les correspondants informatiques et liberté des collectivités se regroupent
Inscrire l'obligation des correspondants informatiques et libertés (CIL) dans la loi, c'est bien. Sensibiliser les collectivités à leur mise en place effective dans les services publics, c'est mieux. Pour partager les bonnes pratiques des villes, départements et régions, le club CIL de l'association des professionnels internet des collectivités territoriales (Apronet) a organisé un séminaire, ce 30 mars, au siège du Groupe Moniteur à Paris. 35 CIL venus de toute la France, y ont participé, en présence des sénateurs Anne-Marie Escoffier et Yves Détraigne, auteurs du projet de loi sur le droit à la vie privée à l'heure du numérique, adopté en première lecture, le 24 mars dernier. Premier constat : seuls 170 CIL ont été officiellement désignés au sein des 40.000 collectivités françaises. Même si l'institution est encore jeune (moins de 6 ans), et si le nombre de CIL croît régulièrement, cela paraît encore bien peu, notamment par rapport au quelque 5.000 CIL, dénombrés fin 2008, dont 9 sur 10 exercent dans les entreprises privées. En outre, les CIL ont souvent du mal à trouver leur place dans les services publics. Plusieurs d'entre eux ont témoigné des difficultés qu'ils rencontrent et de la "solitude" du CIL au sein des institutions. L'informatique reste, encore trop souvent, une question technique pour de nombreux élus et directeurs généraux (DGS).
Les services "n'en n'ont rien à faire de la Cnil"
Les DGS ne perçoivent pas suffisamment les risques qu'ils font courir aux collectivités et à leurs usagers en cas de non application de la loi. Aussi, bon nombre de CIL aurait été nommés au seul motif de faciliter les formalités auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil). Résultat : ces "CIL alibis" bénéficient de moyens très insuffisants pour remplir leur mission. Par ailleurs, l'indépendance du CIL s'oppose au devoir d'obéissance du fonctionnaire vis-à-vis de son supérieur hiérarchique. "Aussi, faudrait-il prendre en compte le CIL dans le statut général des fonctionnaires et le code général des collectivités territoriales", a suggéré Romain Perray, avocat au barreau de Paris. "De même, il faut aller vers une professionnalisation du CIL susceptible de renforcer sa légitimité en interne et éventuellement proposer une cellule composée de plusieurs personnes pour remédier à la solitude du CIL", a-t-il ajouté. Et pour les petites collectivités qui n'ont pas les moyens de désigner un CIL en leur sein, la mutualisation de la fonction pourrait être assurée à différents niveaux : EPCI, Centres de gestion, département… D'ailleurs, les bonnes pratiques existent déjà. Laure Palluy-Corvaisier, CIL du conseil général du Rhône, a témoigné du " réel soutien de la direction générale et de moyens suffisants" (elle occupe ce poste à 60% du temps). De même, le syndicat mixte Mégalis a créé, le 25 mars dernier à Rennes, un club CIL breton en partenariat avec l'Apronet pour sensibiliser les 1.268 communes bretonnes. "Les actions d'accompagnement que mène la Cnil sur le terrain sont plus que jamais d'actualité", a conclu Mathias Moulin, chef du service des correspondants de la Cnil.
Luc Derriano / EVS, avec Christine Balaï