Aéroports régionaux - Les compagnies à bas coûts en zone de turbulences à l'Assemblée
Ryanair avait comme du plomb dans l’aile, mardi 23 mars, à l’Assemblée nationale. Face à la commission des affaires européennes, la députée Odile Saugues (PS) présentait son projet de rapport d’information consacré, notamment, aux aides aux aéroports régionaux. Et si la compagnie aérienne à bas coûts n’était pas seule visée, elle a traversé une légère zone de turbulences dans la salle annexe de l’Assemblée.
Comme l’a d’abord rappelé la députée du Puy-de-Dôme, "Air France vient de déposer une plainte pour concurrence déloyale contre Ryanair devant la Commission européenne". En effet d’après la compagnie française, "en moyenne les chambres de commerce et d’industrie, gestionnaires des aéroports, soutiennent l’activité de Ryanair en France à hauteur de 9 à 32 euros par passager embarqué".
Certes, ces aides doivent déjà obéir à un ensemble de règles européennes - rappelées par Odile Saugues. Mais selon la députée socialiste, il appartient au gouvernement français de "proposer à Bruxelles des mesures pour rétablir dans le domaine aérien une concurrence non faussée". Elle appelle donc à "clarifier et sécuriser juridiquement les aides des aéroports régionaux aux compagnies low cost". Et comme il suffit à une entreprise de se domicilier dans un pays à charges sociales faibles pour pratiquer un "dumping social", Odile Saugues demande "au niveau européen des règles sociales minimales, applicables aux personnels navigants".
A vrai dire, pour le député Jean Gaubert (PS), ces "problèmes de statuts sociaux et de parité monétaire sont beaucoup plus importants", comme il a pu lui-même le constater pour la compagnie maritime française Britanny Ferries, durement concurrencée par le britannique P&O. Et si quelques députés ont pu témoigner des "chantages" de Ryanair, à Angoulême ou à Pau, plusieurs ont préféré rappeler l’intérêt de ces aides aux compagnies à bas coûts.
"On a rien à proposer de mieux pour assurer le développement de territoires qui sont mal desservis", à l’instar de Bergerac, a ainsi jugé Daniel Garrigue, député non-inscrit de Dordogne. Quant à Pierre Forgues (PS), il a souligné que "quel que soit le transport, en France, il est subventionné", et que certaines lignes d’Air France étaient elles-mêmes largement aidées. Ce que le directeur général de Ryanair, Michael O'Leary, ne s'est pas privé de rappeler, dans un entretien à La Tribune, mercredi, dans lequel il affirme qu'Air France cherche à "bloquer la croissance des aéroports régionaux français".
Enfin, les députés ont soulevé les exemples de Strasbourg et de Perpignan : faute de pouvoir y être aidé, Ryanair a décidé d’atterrir à Karlsruhe-Baden, en Allemagne, et à Gérone, en Espagne…
"Cela démontre qu’il faut des règles communes à l’Europe", a conclu Odile Saugues. A la sortie de la salle de la Commission, elle l’a d’ailleurs précisé : "Il n’est pas question pour moi de brider les low-cost, mais d’avoir des règles communes a minima." La mise en concurrence des territoires opérée par Ryanair ne rend-t-elle pas la mission délicate ? "J’ai toujours pensé que l’intérêt collectif passait avant les intérêts particuliers, mais il faudrait aussi que les élus le conçoivent. Un aménagement du territoire bien compris se fait au niveau national." Et même européen, manifestement…
Olivier Bonnin