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Congrès ARF - Les collectivités installent leur propre "comité Balladur"

L'intervention d'Alain Marleix, le secrétaire d'Etat aux collectivités locales, en clôture du Congrès des régions, vendredi, n'a pas permis de dissiper les craintes des collectivités. Au contraire : le changement du mode de scrutin des élections régionales semble de plus en plus à l'ordre du jour.

"Il faut respecter la spécificité des régions." Alain Marleix, le secrétaire d'Etat aux Collectivités locales a tenté de calmer les inquiétudes des élus en clôture du Congrès des régions, qui se tenait à Caen les 4 et 5 décembre. "Je m'inscris en faux contre certains commentaires sur la volonté du gouvernement de supprimer un niveau de collectivité. En aucun cas il ne s'agit de revenir aux établissements publics régionaux", a-t-il poursuivi. Allusion aux déclarations d'Alain Rousset, le président de l'Association des régions de France (ARF). Le secrétaire d'Etat a toutefois confirmé la volonté d'aller au bout du changement de scrutin pour la désignation des élus régionaux. "Les nombreuses modifications du scrutin régional n'ont pas permis l'enracinement des élus régionaux. Je peux vous montrer le nombre d'élus de villes de moins de 3.500 habitants : il faut reconnaître que les élus régionaux sont encore mal identifiés par les électeurs", a-t-il déclaré, s'attirant de nombreux sifflets au passage. Alain Marleix a annoncé que son projet de loi relatif à la modernisation des collectivités serait adapté en conséquence. Et de confirmer le rapprochement des assemblées régionales et départementales comme l'une des pistes explorées "pour permettre un meilleur ancrage territorial".

 

"Evitez de nous opposer"

Mais pour les régions, la raison de ce changement de scrutin tient principalement à une volonté de reconquête après la défaite cuisante de 2004. Selon elles, les élus de canton ne seront pas les mieux à même de défendre l'intérêt régional (innovation, développement économique, formation professionnelle). Même Adrien Zeller, le président du conseil régional d'Alsace (unique région métropolitaine UMP) avait émis des doutes la veille à ce sujet. "Le bébé régional ne doit pas être jeté avec l'eau du bain cantonal", avait-il déclaré. Avant d'inviter toutefois les élus à prendre l'initiative " pour mieux territorialiser notre représentation proportionnelle".
Pour les élus, le vrai sujet de débat n'est pas celui de l'enchevêtrement des niveaux de collectivités mis en avant par le gouvernement pour justifier sa réforme mais celui de la clarification des compétences. "Evitez de nous opposer", a lancé  Claudy  Lebreton, le président de l'Assemblée des départements de France (ADF). Un sentiment qui touche également les communes, réunies elles aussi en congrès une semaine plus tôt. La réforme des collectivités territoriales ne sera possible "que si l'Etat parvient à se départir d'une culture de défiance vis-à-vis des collectivités", a souligné Jacques Pélissard, le président de l'Association des maires de France (AMF).

 

Contre-propositions

Craignant de n'être pas suffisamment écoutées par le comité Balladur qui doit remettre ses conclusions avant le printemps 2009, les trois associations d'élus (AMF, ADF et ARF) ont décidé de faire cause commune et ont annoncé l'installation  de leur propre comité. Le but : faire des contre-propositions. Ce comité, qui comprendra des représentants des trois associations et des personnalités qualifiées, fera la synthèse des réflexions des groupes de travail déjà mis en place par les associations, notamment sur la fiscalité locale. L'un des sujets de débats sera celui du maintien ou non de la clause générale de compétence (c'est-à-dire le fait pour une collectivité de pouvoir intervenir dans tous les domaines) qui divise encore nombre d'élus. Alain Marleix s'est dit pour sa part favorable à une "évolution" afin de "limiter les financements croisés".
Enfin, le plan de relance de l'économie présenté par Nicolas Sarkozy la veille a suscité de nombreuses réactions lors de ces deux journées. Plutôt satisfaites dans le principe (notamment l'accélération des contrats de projets), les associations d'élus regrettent toutefois de n'avoir pas été consultées alors qu'elles doivent prendre en charge une grande partie des financements. D'où l'idée d'une conférence permanente entre l'Etat et les régions, défendue par Adrien Zeller. Jacques Pélissard a, lui, demandé d'"intensifier le rythme de réunion de la conférence nationale des exécutifs". Celle-ci devra très prochainement se pencher sur la mise en oeuvre du plan de relance, notamment sur l'avance du fonds de compensation de la TVA. Un bon test pour jauger le niveau de confiance.

En 2009, le congrès de l'ARF se tiendra à Marseille.

 

Michel Tendil