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Insertion/Emploi - Le taux de précarité a doublé en vingt ans et touche surtout les jeunes et les agglomérations

Alors que la prime d'activité - née de la fusion du RSA activité et de la prime pour l'emploi - doit se mettre en place le 1er janvier 2016 (voir notre article ci-contre du 1er septembre 2015), le Centre d'observation de la société (COS) publie deux analyses sur la précarité de l'emploi, qui correspond pour partie à la situation visée par cette nouvelle prestation. Le COS est dirigé par Louis Maurin, par ailleurs fondateur de l'Observatoire des inégalités.

Plus de trois millions de salariés précaires

Le premier article cherche à cerner "L'étendue de la précarité en France". Le terme précarité s'entend ici comme définissant les personnes disposant d'un statut professionnel précaire : stage et contrat aidé, CDD (contrat à durée déterminée), intérim, apprentissage... Dans cette acception, les précaires représentent 3,2 millions de personnes, soit 14% du total des personnes en emploi (25,8 millions). Si on retire l'apprentissage (considéré par l'Insee comme un statut précaire, mais qui est davantage lié à la formation qu'à l'emploi) et les stagiaires et contrats aidés, le taux de précarité tombe à 11%.
L'étude montre que la précarité de l'emploi a connu une brutale accélération entre le milieu des années 80 et la fin des années 90. Au cours de cette brève période, le taux de précarité a plus que doublé, passant de 5% à 12%. En revanche, le taux de précarité tend à rester stable depuis le début des années 2000, autour de 11 à 12%. La crise de 2008-2009 a même eu pour effet paradoxal de réduire la précarité de l'emploi, dans la mesure où les salariés précaires ont été les premiers licenciés afin de préserver les effectifs en CDI.

Un taux de précarité de 50% chez les 15-24 ans

Autre enseignement de l'étude : "Le marché du travail n'est pas 'précarisé' dans son ensemble. Le taux moyen de précarité masque des écarts énormes en fonction de l'âge et du niveau de qualification". Sur ce point, les résultats sont sans ambiguïté : les principales victimes de la précarité sont les jeunes, avec un taux de précarité qui frise les 50% chez les 15-24 ans.
Là aussi, la rupture s'est produite entre le milieu des années 80 et la fin des années 90, le taux de précarité passant de 17% à 47%, ce qui a installé un véritable "marché du travail à deux vitesses [...] avec un pôle de salariés de plus en plus stables, qui s'accrochent à leur emploi, et de salariés de plus en plus instables, souvent jeunes et peu qualifiés, allant de contrat en contrat". Ce poids de la précarité de l'emploi chez les 15-24 ans n'est évidemment pas neutre au regard de l'ouverture de la prime d'activité à cette tranche d'âge.

Où vivent les précaires ?

Le second article cherche à savoir "Où vivent les précaires ?". Il apparaît ainsi que la précarité de l'emploi s'accroît avec la densité de population. Près des deux tiers des salariés précaires vivent en effet dans des communes de plus de 20.000 habitants (alors que celles-ci regroupent environ 40% de la population) et 45% dans des agglomérations de plus de 200.000 habitants (qui abritent environ 10% de la population française), dont 15% à Paris.
La part des précaires parmi l'ensemble des salariés est ainsi de 9,9% dans les communes rurales, de 11,2% dans les unités urbaines de moins de 20.000 habitants et de 12,9% dans les unités urbaines de 20.000 à 200.000 habitants. Elle culmine à 13,9% du total des salariés dans les unités urbaines de plus de 200.000 habitants, hors agglomération parisienne. Cette dernière affiche en effet un taux nettement plus faible de 10,2%.