Archives

Culture - Le Syndeac réclame la "dissolution immédiate" du Conseil pour la création artistique

C'est désormais la guerre ouverte entre le Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac) et le Conseil pour la création artistique, mis en place au début de l'année à l'initiative du président de la République et dont le délégué est le producteur Marin Karmitz. Cette déclaration ne doit rien au hasard, puisqu'elle intervient juste avant la réunion du Conseil de la création artistique à l'Elysée, le 9 septembre à 17h30, sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Au cours de cette séance, le délégué du Conseil devrait présenter au chef de l'Etat des "propositions importantes", qui seront rendues publiques le lendemain matin lors d'une conférence de presse avec le ministre de la Culture. Créé par un décret du 30 janvier 2009 et installé dès le 2 février (voir notre article ci-contre du 3 février 2009), le Conseil pour la création artistique est notamment chargé "d'éclairer les choix des pouvoirs publics en vue d'assurer le développement et l'excellence de la création artistique française, de promouvoir sa diffusion la plus large, notamment internationale, et d'arrêter les orientations de nature à permettre leur mise en oeuvre". Il est également chargé d'examiner en priorité "les mesures de nature à permettre le développement de nouvelles sources de financement de la création artistique. A cet effet, il étudie les modalités de gestion et d'évaluation des aides à la création artistique et formule toute proposition d'amélioration". Placé auprès du chef de l'Etat, qui en nomme les membres, et présidé par lui, le Conseil dispose d'un budget et de moyens en personnel.
D'emblée, le Syndeac s'est heurté au Conseil, qu'il considère comme un obstacle sans valeur ajoutée dans la relation entre les entreprises culturelles et le ministère. Le courant n'est pas passé avec le délégué général du Conseil, qui n'est lui-même pas vraiment réputé pour son caractère facile. Lors de son assemblée générale à Avignon, le 17 juillet, le Syndeac a notamment adopté une motion demandant la suppression du Conseil pour la création artistique qui, selon le syndicat, tente de priver le ministère des prérogatives de sa direction de la création artistique "en diminuant ses moyens et en dialoguant, à sa place, avec les autres ministères" (voir notre article ci-contre du 28 juillet 2009). Le ton vient encore de monter d'un cran avec la diffusion, le 4 septembre, d'un communiqué du Syndeac qui demande à nouveau la "dissolution immédiate" du Conseil et précise ses griefs à l'égard de cette instance. Ceux-ci sont au nombre de quatre : il "prétend exercer les prérogatives de la direction de la création du ministère de la Culture" ; il "contient en germe une 'réforme' qui, à terme, désengagerait le ministère de la Culture dans le soutien aux créateurs ; il "envisage de proposer une liste d'idées glanées de-ci de-là sans tenir compte de la politique du ministère et des revendications légitimes des artistes, des créateurs et des responsables culturels" et, enfin, il "finance ses prototypes et ses études sur le budget du ministère de la Culture". Le Syndeac attend par conséquent "que le dialogue avec le ministère de la Culture soit rétabli et véritablement relayé par la présidence de la République".
Ce conflit place le ministre de la Culture - qui ne s'est pas encore prononcé sur le sujet - dans une situation d'autant plus délicate qu'il est de notoriété publique que son prédécesseur était plus que réservé sur la création du Conseil. Comme indiqué dans notre article ci-contre du 6 août 2009, la politique culturelle se trouve en effet à un tournant. D'un côté, la voie des Entretiens de Valois, défendus par le Syndeac - acteur incontournable en ce domaine - et qui ont bien contribué à faire retomber la tension, mais peinent à déboucher sur des propositions concrètes. De l'autre, celle du Conseil pour la création artistique qui, fort du soutien du président de la République, n'hésitera pas à remettre à plat le financement de la création artistique, au risque de tensions avec les créateurs.

 

Jean-Noël Escudié / PCA