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Développement des territoires - Le Sénat vote la création des contrats de développement territorial

Contre l'avis du gouvernement, les sénateurs ont voté, le 22 octobre, la proposition de loi centriste visant à créer des contrats territoriaux de développement rural" calqués sur les contrats de ville en cours de signature. Ces contrats ciblés sur les territoires en difficulté, notamment démographique, seraient signés pour plusieurs années entre l'Etat, les nouveaux pôles d'équilibre territorial et rural créés en 2014 et les intercommunalités concernées. Jugeant le dispositif "lourd et complexe", Sylvia Pinel a préféré mettre en avant les apports des deux derniers comités interministériels aux ruralités.

Créer des contrats territoriaux de développement rural pris sur le modèle des contrats de ville ? C'est l'idée d'une proposition de loi centriste votée par le Sénat en première lecture, le 22 octobre, contre l'avis du gouvernement.
Le texte avait été déposé fin mai par l'ancien sénateur UDI du Cantal Pierre Jarlier, juste avant l'invalidation de ses comptes de campagne par le Conseil constitutionnel (voir ci-contre notre article du 11 juin 2015). Rendu inéligible pour un an, des élections partielles ont été organisées au mois de septembre. Et c'est son successeur, Bernard Delcros, par ailleurs président de la communauté de communes de Murat, qui a repris le flambeau. Une belle entrée en matière pour ce nouveau sénateur sans étiquette mais qui a rejoint le groupe UDI-Modem-Radicaux et indépendants.
"La loi Maptam de janvier 2014 a créé les pôles d'équilibre territorial et rural, mais on s'est arrêté au milieu du gué. Ce qu'il manque aux PETR c'est un outil de contractualisation inspiré des contrats de ville", commente Bernard Delcros auprès de Localtis. C'est ce manque que le texte vise à combler en instaurant un contrat pluriannuel signé entre l'Etat, le PETR (ou à défaut le syndicat du Scot) et les intercommunalités concernées. "Aujourd'hui, on peut contractualiser avec la région, le département ou l'Europe avec le programme Leader, mais pas avec l'Etat qui est pourtant le garant de l'équilibre des territoires", souligne Bernard Delcros. Selon le sénateur, il ne s'agit pas de demander des crédits supplémentaires, mais plutôt de concentrer les efforts - notamment les mesures annoncées lors des deux comités interministériels aux ruralités de mars et septembre 2014 - sur les territoires qui en ont le plus besoin. D'autant que selon le rapporteur du texte, Annick Billon (UDI, Vendée), ces mesures "qui reprennent en partie des dispositifs existants, témoignent de la fragmentation d'une politique dépourvue de vision stratégique".

Critères de densité et de richesse

Reste à définir ces territoires, comme ont pu l'être ceux de la nouvelle politique de la ville. "Entre 2007 et 2014, 16 départements ont continué de perdre des habitants alors que la population en France a augmenté de 2 millions d'habitants", souligne Bernard Delcros, ajoutant que ces territoires sont "fragilisés par la dégradation continue de l'accès aux services en particulier l'accès aux soins". Alors que le texte avait déjà été modifié en commission par huit amendements, en séance, les sénateurs ont apporté des critères de densité et de richesse dans la définition de ces territoires, soit les mêmes que ceux qui devraient prévaloir dans la réforme annoncée des zones de revitalisation rurale (ZRR). Il s'agit des "établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre caractérisés par une faible densité de population et un faible revenu par habitant, en référence à des valeurs nationales", précise désormais le texte. Un décret est censé en préciser les conditions.

"Les solutions proposées nous semblent inadaptées"

Le matin même, le sénateur disait ne pas connaître la position du gouvernement. Celle-ci n'a pas tardé à venir. "Si les questions soulevées par ce texte sont pertinentes, les solutions proposées nous semblent inadaptées", a estimé la ministre du Logement, de l'Egalité des territoires et de la Ruralité, Sylvia Pinel, en séance. Jugeant le dispositif "lourd et complexe" et son périmètre "bien large", elle a mis en avant les apports des deux comités interministériels : "mille maisons de services au public fin 2016, mille maisons de santé d'ici 2017, accélération du plan très haut débit..." D'après elle, les schémas de développement durable issus de la loi Notre, "articulés à la dynamique des métropoles, offrent davantage d'opportunités".
Pourtant, la veille, en lançant à La Courneuve la future agence de développement des territoires, France Entrepreneur, le président de la République François Hollande avait pris soin de ne pas opposer les territoires entre eux. "Il y a une France dans laquelle l'égalité doit être assurée", avait-il souligné alors que cette agence est censée agir dans tous les territoires fragiles qu'ils soient des quartiers de la politique de la ville ou des ZRR. L'occasion était donnée de mettre cette idée en pratique, mais la gauche a voté contre. Ce qui obère les chances de succès du texte à l'Assemblée.