Habitat - Le Sénat rejette la proposition de loi sur la lutte contre les logements vacants
Le Sénat a rejeté, le 17 novembre, la proposition de loi relative à la lutte contre le logement vacant et à la solidarité nationale pour le logement. Ce texte avait été déposé par les sénateurs Thierry Repentin (par ailleurs président de l'Union sociale pour l'habitat), François Rebsamen (également maire de Dijon) et Jean-Pierre Bel. Il proposait notamment de donner aux maires la possibilité d'exproprier et de réaffecter au logement social les logements vacants de façon "anormalement longue" (5 à 8 années consécutives selon les cas) et d'appliquer automatiquement la taxe annuelle sur les logements vacants à toutes les communes soumises à l'obligation de 20% de logements sociaux, tout en en doublant le taux. La proposition précisait les modalités du droit de préemption urbain en indiquant que celui-ci peut être exercé pour assurer le relogement des occupants d'un immeuble visé par une déclaration d'insalubrité ou un arrêté de péril et pour transformer les biens préemptés en logements sociaux. Elle élargissait également la liste des délégataires du droit de préemption à l'ensemble des organismes HLM. Enfin, les deux derniers articles visaient plus spécialement le droit au logement opposable (Dalo). Ils prévoyaient la mise en place, jusqu'au 16 mars 2012, d'un moratoire sur les expulsions des personnes reconnues comme prioritaires par une commission de médiation au titre du Dalo, tant qu'aucune offre de logement ne leur est proposée. Ils proposaient également de mobiliser, dans le cadre du Dalo, l'ensemble du parc privé conventionné avec l'Agence nationale de l'habitat (Anah), en permettant au préfet d'imposer un demandeur au propriétaire, quel que soit le niveau des loyers prévus par la convention.
Si le rejet de l'adoption du texte dans sa globalité n'est pas surprenant, aucun des cinq articles n'a finalement trouvé grâce isolément aux yeux des sénateurs. Parmi les principaux arguments avancés par la majorité figure notamment le caractère prématuré du texte, sept mois après la loi de mobilisation pour le logement, "qui comporte pas moins de 124 articles, et dont la mise en application effective est conditionnée par l'élaboration de 65 mesures d'ordre réglementaire". Le récent rapport du Conseil d'Etat sur le droit au logement est également invoqué, dans la mesure où il mettait en cause les méfaits de l'instabilité juridique qui caractérise ce secteur. Un reproche plus technique tient à l'approche globale de la notion de vacance, qui recouvre pourtant des situations très différentes.
Les portes ne sont toutefois pas complètement fermées. Le rapporteur de la proposition de loi s'est ainsi déclaré ouvert à une hausse de la taxe sur les logements et sur son extension "aux grandes agglomérations dont le marché du logement est très tendu" (soit une trentaine d'agglomérations potentielles de plus de 200.000 habitants, au lieu des huit actuelles). Pour sa part, Benoît Apparu, le secrétaire d'Etat au Logement, a indiqué que "le droit de préemption urbain sera renforcé et simplifié dans le cadre de la proposition de loi qui sera examinée dès la semaine prochaine par la commission des lois de l'Assemblée nationale" et que l'"on peut attendre encore deux ou trois mois pour déposer un amendement". Certaines dispositions de la proposition de loi pourraient donc bien refaire surface, sous une forme amendée, dans les prochains mois.
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : proposition de loi relative à la lutte contre le logement vacant et à la solidarité nationale pour le logement (rejetée en première lecture par le Sénat le 17 novembre 2009).
Dalo : le comité de suivi veut des réquisitions
Le comité de suivi de la mise en œuvre du droit au logement opposable (Dalo) a demandé, ce mercredi 18 novembre, la mise en oeuvre de réquisitions de logements et en a appelé à Nicolas Sarkozy en raison de l'"aggravation" de la situation des mal logés.
Le comité de suivi, dont le dernier rapport annuel était publié fin octobre (sur ce rapport, lire notre article "Dalo : une obligation de résultat qui laisse encore à désirer"), s'est réuni en séance exceptionnelle et a constaté "l'aggravation d'une situation de non-respect de la loi" : fin juin, au moins 7.250 ménages désignés comme prioritaires, dont 6.500 Franciliens, n'avaient pas obtenu d'offre de logement dans le délai prévu par la loi. A fin septembre, ce décalage s'est accru, atteignant 9.780 ménages, dont 8.878 en Ile-de-France. "La situation est particulièrement grave, on ne peut la laisser empirer", a affirmé lors d'une conférence de presse Bernard Lacharme, secrétaire général du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées.
Dans une déclaration qui a fait consensus entre ses différents membres (élus, associations, représentants des organismes de logements), le comité de suivi "appelle solennellement le gouvernement à conduire la bataille de l'offre" et avance des propositions "réalistes, pas utopistes", selon les termes de son président, Xavier Emmanuelli.
Deux pistes sont préconisées, dont la mobilisation "effective des logements existants en faveur des ménages prioritaires". Le comité demande "que des instructions soient données du plus haut niveau de l'Etat pour que les préfets usent de tous les moyens en leur possession afin de résorber au plus vite leur retard".
Parmi les moyens recensés figurent notamment un "programme de réquisitions" et le "droit de préemption", pour ce qui ne relève pas du logement social. "L'arme de la réquisition est une arme qui peut être utile", a déclaré Etienne Pinte, député UMP des Yvelines et membre du comité, citant les réquisitions menées à Paris par des "étudiants et travailleurs" de Jeudi Noir dans des immeubles vides depuis plusieurs années.
Dans le logement social, le comité demande que le contingent préfectoral soit récupéré et que les délégations consenties aux maires soit "reprises partout où les relogements Dalo ne sont pas assurés, notamment dans les Hauts-de-Seine".
Le comité, qui a décidé de se réunir désormais tous les mois, réclame aussi un programme de construction de logements et de places d'hébergement, particulièrement en Ile-de-France, qui concentre l'essentiel des difficultés. Pour l'Ile-de-France, il faut "la construction de 70.000 logements par an dont 50% de logements sociaux", estime le comité, et "la reconnaissance d'utilité publique" de ce programme qui doit être "arrêté d'urgence".
Source AFP