Santé - Le Sénat entame à son tour l'examen du projet de loi Santé
Après un passage en commission qui s'est traduit par des coupes claires dans le texte (voir nos articles ci-contre du 21 et du 28 juillet 2015), le projet de loi relatif à la santé - déjà adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 14 avril 2015 - a entamé son parcours en séance publique au Sénat le 14 septembre. Pas moins de neuf journées sont programmées, plus deux journées en réserve, pour aborder un texte particulièrement touffu.
Près de 1.200 amendements, mais peu de changements à attendre
En revanche - et malgré les 1.192 amendements déposés en vue de la séance publique -, le texte issu du Sénat devrait ressembler de très près à celui adopté par la commission des affaires sociales en juillet. Chaque camp est en effet bien décidé à camper sur ses positions.
Dans son intervention en ouverture de la discussion générale sur le projet de loi, Marisol Touraine a ainsi réaffirmé la nécessité de "faire bouger les lignes, nous confronter aux conservatismes et aux immobilismes, affronter les acteurs qui ont intérêt à ce que rien ne change". Une allusion qui pourrait n'être pas appréciée par les médecins libéraux, qui ont appelé à nouveau à manifester contre certaines dispositions du texte, comme la généralisation du tiers payant ou le rôle croissant conféré aux agences régionales de santé (ARS). La ministre des Affaires sociales et de la Santé a pourtant affirmé vouloir faire "du médecin généraliste le centre de gravité de notre système de soins jusque-là centré sur l'hôpital. Nous sommes ainsi à l'opposé de l'épouvantail, brandi depuis des mois, de l'étatisation du système !".
Dans son discours, Marisol Touraine n'a fait aucune ouverture sur certains des amendements adoptés en commission. Une bonne partie des amendements de la gauche - comme du gouvernement - vise d'ailleurs à rétablir les dispositions supprimées par cette dernière.
"Une sorte d'hyper-administration"
Même raidissement du côté de la droite. Alain Milon (Les Républicains), co-rapporteur du texte pour la commission des affaires sociales (et médecin), a ainsi indiqué que certaines dispositions du texte sont "inacceptables". Outre l'opposition à la généralisation du tiers payant, il estime que "la création du service territorial de santé au public (STSP) est une sorte d'hyper-administration qui place l'essentiel des décisions dans les mains des directeurs généraux des ARS". Evoquant - côté établissements de soins - les groupements hospitaliers de territoires, le sénateur du Vaucluse estime que "les élus ne devront pas y assister en simples spectateurs, mais devront participer activement à la définition de leur stratégie".
La position des autres co-rapporteurs du texte sur les disposition relatives à la prévention et à la santé au travail - sujets plus consensuels - laisse davantage d'ouvertures, la commission ayant d'ailleurs adopté nombre d'articles sur ces sujets, malgré quelques dissensions qui subsistent, par exemple sur la question des paquets de cigarettes neutres.
Dans ces conditions, après le vote d'un texte profondément transformé par la Sénat, une solution de compromis en commission mixte paritaire paraît des plus improbables. Le projet de loi devra donc revenir en discussion pour que l'Assemblée nationale ait le dernier mot, ce qui risque de retarder encore l'entrée en vigueur d'un texte dont certaines dispositions sont supposées s'appliquer dès le 1er janvier 2016.
Jean-Noël Escudié / PCA
Références : projet de loi relatif à la santé (adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 14 avril 2015, examiné en séance publique par le Sénat du 14 septembre au 1er octobre 2015).