Audiovisuel - Le report de la date de généralisation de la TNT n'est plus tabou
Officiellement, la date de l'extinction du signal analogique et du basculement dans le tout numérique est toujours fixée au 30 novembre 2011. Il s'agit là de la date désormais inscrite dans la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision. Elle figurait déjà dans le plan de généralisation progressive de la télévision numérique terrestre (TNT) proposé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et validé par le Premier ministre en décembre dernier. Officieusement, cette date a, dès le départ, laissé perplexe un grand nombre d'acteurs de la TNT. Ce scepticisme a encore été renforcé par les retards dans le démarrage du plan d'extinction élaboré par le CSA (voir notre article ci-contre du 19 mars 2009). Pour l'instant en effet, seules deux régions connaissent dejà leur date de basculement dans le tout numérique, à la suite d'une décision du CSA : l'Alsace (le 2 février 2010) et la Basse-Normandie (le 9 mars 2010). Or, d'après le plan initial adopté par le CSA, le basculement des deux départements alsaciens aurait dû être programmé au quatrième trimestre 2009. Avec ce décalage initial, les 20 régions restantes devraient basculer en l'espace de 19 mois, alors que chaque opération suppose une préparation et un accompagnement importants, notamment vis-à-vis des populations les plus fragiles. Ce scepticisme de départ, conjugué avec les retards dans la mise en œuvre du plan du CSA, a fini par inquiéter les élus locaux. Plusieurs d'entre eux ont récemment saisi le gouvernement et le CSA pour faire part de leur inquiétude à l'idée qu'une partie - même minime - de la population pourrait, faute d'une préparation suffisante, se retrouver devant des écrans vides au moment de l'extinction du signal analogique dans leur région.
Mais la question de la date du basculement dans le tout numérique vient de franchir une nouvelle étape décisive, avec la demande du GIP France Télé Numérique à Nathalie Kosciusko-Morizet - secrétaire d'Etat chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique - de reporter à 2014 la date de fin du basculement. En évoquant ouvertement une nouvelle date, cette démarche lève une sorte de tabou et devrait inciter le gouvernement à réagir rapidement. Elle a d'autant plus de poids que le GIP France Télé Numérique regroupe tous les acteurs de la TNT et que sa raison d'être est précisément d'accompagner le basculement. Il dispose pour cela d'un budget de 149 millions d'euros sur trois ans, apportés à parité par l'Etat et par les chaînes historiques de télévision (TF1, France Télévisions, Canal+, M6 et Arte). Certes, la démarche du GIP n'est pas totalement innocente. TF1, par exemple, souffre de la concurrence de la TNT et a tout intérêt à reporter sa généralisation le plus loin possible pour mieux s'adapter à cette nouvelle concurrence. Mais ce revirement public du principal acteur du basculement - avec le CSA et TDF -, va peser très lourd dans la clarification que le gouvernement est désormais contraint d'apporter.
Jean-Noël Escudié / PCA