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Habitat - Le prêt viager hypothécaire pourrait venir au secours du financement de la dépendance

Intervenant en septembre dernier devant l'Association des journalistes de l'information sociale (Ajis), Nicolas Sarkozy s'était clairement prononcé en faveur d'un financement de la dépendance partagé entre fonds publics (qui resteraient prédominants) et contributions privées. Il avait notamment affirmé que "la dépendance des personnes âgées est le plus souvent un risque assurable, qui peut être couvert en partie par des produits financiers innovants". Depuis lors, le gouvernement - qui semble exclure le retour à la récupération sur succession - est à la recherche de solutions adaptées. Mandatés par Xavier Bertrand, Bernard Worms, directeur général de l'Association nationale pour l'information sur le logement (Anil), et Claude Taffin, directeur des études économiques et financières à l'Union sociale pour l'habitat (USH), viennent ainsi de remettre au ministre du Travail les conclusions d'une expertise sur "la mobilisation de l'actif résidentiel des personnes âgées pour participer au financement des dépenses dues au grand âge" et, plus précisément, sur le recours au prêt viager hypothécaire (PVH).
Créé par l'article 41 de l'ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sûretés, le PVH a fait l'objet d'une première offre commerciale en juin 2007. Conçu pour faciliter l'accès des personnes âgées au crédit bancaire, il consiste en un prêt dont le capital et les intérêts sont remboursables en une fois, au moment du décès (ou du déménagement) de l'emprunteur et sont garantis par une hypothèque sur le bien immobilier en question. La plupart des banques devraient commercialiser le PVH courant 2008. Constatant que l'augmentation des patrimoines - notamment immobiliers - devrait se poursuivre à un rythme supérieur à celle des retraites, les deux experts légitiment un éventuel recours au PVH. Ils constatent par ailleurs qu'une aide à la mobilisation de l'actif résidentiel jouerait en faveur des classes moyennes, qui sont souvent les plus en difficulté face à la prise en charge financière de la dépendance.
Une banalisation de ce mode de financement suppose toutefois un certain nombre d'évolutions. D'une diffusion encore confidentielle, le PVH est en effet assorti de coûts élevés et d'une quotité - rapport entre le montant du prêt et la valeur du logement - très faible (34% à 75 ans). Il souffre également d'un manque évident de souplesse. Ecartant la subvention et l'incitation fiscale, les experts préconisent un certain nombre d'aménagements. La principale consisterait à confier au Fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété (FGAS) la mission d'apporter sa garantie au risque de dépassement (comme il le fait déjà pour les prêts à l'accession sociale). L'intervention du FGAS permettrait en outre à l'Etat de définir précisément les caractéristiques du PVH : taux plafond, frais de dossier, normes de flexibilité, conditions de commercialisation... Il aurait également la possibilité d'inciter à la souscription de PVH en prenant à sa charge tout ou partie des frais de dossier. La note suggère aussi de défiscaliser une éventuelle sortie en rente (en cas d'utilisation partielle du droit au prêt). Pour autant, les deux experts restent prudents sur le développement du PVH. S'adressant essentiellement à des ménages "house rich cash poor" (disposant d'un patrimoine immobilier, mais sans disponibilités significatives), cette forme de prêt devrait, selon eux, "rester un produit de niche dans les quinze prochaines années, avant de connaître son apogée lorsque la génération du baby-boom atteindra 75-80 ans, vers 2025-2030".
La note reste en revanche très discrète sur un point qui, il est vrai, n'entrait pas dans l'expertise confiée à ses auteurs : le recours au PVH évoque en effet étrangement - bien que ses bases juridiques et ses modalités techniques soient radicalement différentes - une sorte de "privatisation" de la traditionnelle récupération sur succession...

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence : Ordonnance 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés (JO du 24 mars 2006). 

 

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