Laïcité - Le Parlement interdit le port du voile intégral dans l'espace public
Lors d'un ultime vote du Sénat, le Parlement a définitivement adopté le 14 septembre, le projet de loi interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public. Le Sénat n'a pas apporté de modification à la version votée à l'Assemblée il y a deux mois, ce qui vaut feu vert définitif du Parlement. Après les réserves du Conseil d'Etat, le gouvernement a construit son texte autour de la notion d'atteinte à "l'ordre public social" : dissimuler son visage, explique-t-il, n'est pas seulement contraire à la dignité de la personne mais empêche la relation à autrui et heurte les exigences de la vie collective.
Si le texte interdit bien le port du niqab (qui ne laisse voir que les yeux) ou de la burqa (qui masque l'ensemble du corps), il vise plus largement "la dissimulation du visage dans l'espace public" (cagoules dans les manifestations, par exemple). Le dispositif distingue la dissimulation du visage, "sanctionnée d'une amende prévue pour les contraventions de deuxième classe", soit un montant maximal de 150 euros, éventuellement "assortie de l'obligation d'accomplir un stage de citoyenneté", du délit de dissimulation forcée du visage passible d'un an d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende. "Lorsque le fait est commis au préjudice d’un mineur, les peines sont portées à deux ans d’emprisonnement et à 60.000 euros d’amende", précise le texte.
Par ailleurs si l'interdiction est "générale et absolue", elle comporte néanmoins plusieurs exceptions car "certaines activités peuvent exiger la dissimulation du visage dans l'espace public, sans pour autant porter atteinte à l'ordre public social". Quelques exemples : pour "des motifs d’ordre professionnel et au titre de leur protection, certaines personnes sont amenées à porter un casque ou un masque, lesquels dissimulent leur visage […]. De la même façon, des personnes peuvent être amenées, pour des raisons médicales, à porter un masque parce qu’elles sont particulièrement sensibles à tel ou tel facteur de risque". Les exceptions peuvent également s’inscrire dans le cadre de pratiques sportives, "comme l’escrime, ou bien concerner des fêtes ou encore des manifestations artistiques ou traditionnelles".
Enfin, dans un souci de "médiation" et de "pédagogie", ces dispositions ne s'appliqueront qu'à l'issue d'un délai de six mois. La ministre de la Justice l'avait exposé devant l'Assemblée nationale : "Durant ces six mois, avec les autorités religieuses, les associations, les collectivités territoriales et l'ensemble de la police et de la gendarmerie, le but sera bien d'aller contacter chacune des femmes concernées."
Anticipant d'éventuelles contestations, les présidents des deux assemblées ont saisi dès le 14 septembre le Conseil constitutionnel qui a un mois pour se prononcer. La promulgation de la loi, si elle est validée, est attendue d'ici la mi-octobre.
Catherine Ficat