Laïcité - Voile intégral : la mission parlementaire propose une résolution l'interdisant dans les services publics
La mission parlementaire sur le port du voile intégral a remis, ce 26 janvier, son rapport "voile intégral : le refus de la République" dans lequel elle plaide en premier lieu, pour l'adoption d'une résolution parlementaire "réaffirmant la prééminence des valeurs républicaines sur les pratiques communautaristes et condamnant le port du voile intégral comme contraire à ses valeurs". Le vote de cette résolution, prévu a priori au printemps, n'a aucun pouvoir contraignant. Mais "l'objectif est bien que cesse cette pratique sur le territoire de la République", souligne Bernard Accoyer, président de l'Assemblée nationale, lors de la présentation du rapport. A la suite de six mois de travail, après avoir entendu plus de 200 personnes, les 32 membres de la mission, présidée par André Gerin et dont le rapporteur est Eric Raoult, livrent 18 propositions. Parmi celles-ci, le rapport préconise une loi interdisant de "dissimuler son visage" dans les services publics, administrations, hôpitaux, sorties des écoles, transports..., cette disposition serait déclinée par voie de circulaire. Concrètement, la loi contraindra les personnes concernées "non seulement à montrer leur visage à l'entrée du service public mais aussi à conserver le visage découvert" en son sein, faute de quoi elles ne pourraient pas percevoir les prestations souhaitées. La mission estime que l'interdiction pourrait être élargie aux espaces privés accueillant du public. "Nous allons tout faire pour ceux qui sont en première ligne, médecins, fonctionnaires, personnels des banques ou des crèches", assure André Gerin (lire ci-dessous certaines de ces propositions). Eric Raoult propose une "fermeté intelligente", "la fermeté pour refuser le voile intégriste, l'intelligence pour ne pas tomber dans le piège d'une décision qui ne serait pas expliquée, voire même qui serait cassée". Il souligne en effet qu'une loi pose des "questions juridiques complexes" et que son "annulation par le Conseil constitutionnel ou une condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme sonnerait comme une défaite de la République".
Trois préconisations ont été rejetées lors du vote sur l'ensemble du rapport : la création d'une Ecole nationale d'études sur l'islam (proposition 7), le lancement d'un travail parlementaire sur l'islamophobie (proposition 8), et la recommandation (proposition 18) de recueillir l'avis du Conseil d'Etat "en amont de l'éventuel examen d'une proposition de loi interdisant de dissimuler son visage dans l'espace public", les partisans d'une loi d'interdiction totale contestant l'épithète "éventuel".
"Les parlementaires pourront voter en connaissance de cause, une résolution, une loi, l'une ou l'autre, l'une et l'autre, nous verrons. Le mieux serait que l'Assemblée propose un texte d'initiative partagée à moins que le gouvernement prenne l'initiative", a conclu Bernard Accoyer.
Catherine Ficat
Quelques-unes des 18 propositions :
- Proposition 1 : adopter une résolution condamnant le port du voile intégral comme contraire aux valeurs de la République, affirmant le soutien de la représentation nationale aux efforts engagés par les acteurs de terrain pour combattre cette pratique, condamnant les discriminations et les violences faites aux femmes qui en sont victimes de par le monde ; diffuser cette résolution par voie de circulaire afin de la porter à la connaissance des agents publics.
- Proposition 4 : généraliser la formation des agents en contact direct avec les usagers aux règles de la laïcité et à la gestion des incivilités.
- Proposition 10 : donner instruction aux services de l'Etat de signaler systématiquement au président du conseil général les situations de mineures portant le voile intégral, dans le cadre de la protection des mineurs en danger.
- Proposition 15 : afin de conforter les agents publics, adopter une disposition interdisant de dissimuler son visage dans les services publics.