Protection de l'enfance - Le nombre de signalements ralentit, mais la part des adolescents augmente
Comme chaque année, l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée (Odas) publie les résultats de son enquête sur l'enfance en danger. Cette nouvelle édition, portant sur les chiffres de 2006, montre une relative stabilisation du nombre d'enfants signalés (+1% par rapport à l'année précédente). Au total, 98.000 enfants ont bénéficié, l'an dernier, d'une mesure de protection administrative ou judiciaire, soit 7 mineurs sur 1.000 (contre 5 sur 1.000 en 1998). Ce ralentissement, après les fortes hausses de 2003 et de 2004, ne modifie toutefois pas la tendance sur le moyen terme. Entre 1998 et 2006, le nombre d'enfants signalés a en effet progressé de 18%. Outre le ralentissement constaté en 2006, l'enquête de l'Odas apporte une autre bonne nouvelle : la diminution du nombre d'enfants effectivement maltraités. Ils représentent 19% des 98.000 enfants signalés, soit une diminution de 5% sur l'année précédente. Ce recul ramène leur nombre au niveau de 1998, mais le nombre de mineurs s'est accru depuis lors. Les maltraitances d'ordre physique (33% des cas) et sexuel (23%) continuent de dominer, mais leur part a diminué par rapport à 1998.
L'étude met aussi en avant la meilleure coordination des acteurs, que l'Odas impute principalement à la mise en place, sous l'égide des conseils généraux, des cellules départementales de signalement et des observatoires de la protection de l'enfance, tous deux prévus par la loi du 5 mars 2007. Au 1er novembre 2007, 51% des départements avaient déjà installé une cellule de signalement. Même sans création d'une cellule formalisée, huit départements sur dix ont mis en place une centralisation des informations préoccupantes dont le conseil général est directement saisi. Enfin - toujours côté positif -, l'enquête 2006 montre une progression de la part des suites administratives données au signalement, ce qui correspond à la fois aux souhaits des départements et à une probable amélioration de la détection précoce des situations. Sur les 98.000 signalements enregistrés en 2006, 42.000 ont reçu une suite administrative et 56.000 ont fait l'objet d'une transmission judiciaire, soit un taux de judiciarisation de 57% contre 59% en 2005 (et également en 1998).
Le principal enseignement de l'enquête de l'Odas concerne toutefois le poids croissant des adolescents dans le total des signalements. Le nombre des 11-17 ans progresse de 5% (soit 40.200 signalements en 2006), alors que celui des 0-10 ans recule de 2% (soit 54.900 enfants). Alors que les garçons sont plus nombreux que les filles de 11 à 15 ans, la tendance s'inverse à partir de 15 ans, avec un nombre plus important de signalements concernant des filles. Les jeunes majeurs connaissent également une progression importante (+7,4%), même si leur nombre demeure limité (2.900 en 2006). Pour l'Odas, ce poids croissant des adolescents "met en lumière les difficultés éducatives rencontrées par un nombre croissant de familles à un moment décisif du développement de leur enfant [...], alors même que la fragilisation des solidarités familiales et un grand isolement social et relationnel ne permettent pas un étayage suffisant". Aussi l'association se félicite-t-elle du développement des maisons des adolescents, des actions innovantes menées par certains départements et de la mise en place, par la loi du 5 mars 2007, des accueils de 72 heures.
Jean-Noël Escudié / PCA