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Musées - Le ministère recommande une vigilance renforcée avant l'acceptation d'une donation

La loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités - dite loi Perben - a introduit une modification importante en matière de donation aux musées. Elle a en effet ouvert aux héritiers la possibilité de signer des "pactes successoraux" pour ce type de donation. Ceux-ci permettent aux héritiers réservataires présomptifs du donateur de renoncer par anticipation à exercer une action en réduction de la donation. Cette dernière demeurant évaluée au jour du décès du donateur, cette nouvelle disposition offre une garantie aux musées, en permettant de prévenir des contentieux liés au fait que la valeur de la libéralité dépasse la quotité disponible du donateur, en raison de l'augmentation de la valeur d'une oeuvre donnée après le décès du donateur. Cette mesure a constitué une avancée indéniable, appréciée par les conservateurs. Mais la signature d'un pacte successoral n'a rien d'obligatoire. En son absence, le musée et son conservateur courent le risque de se retrouver au coeur d'un imbroglio juridique. La question n'a rien de théorique, comme le montrent les démêlés du musée Mathurin-Méheut (peintre et dessinateur breton) à Saint-Brieuc, victime d'un conflit entre héritiers. Une telle situation est d'autant plus embarrassante que le conservateur a l'obligation d'émettre, auprès de la collectivité territoriale dont relève le musée, un avis motivé sur l'opportunité, mais aussi sur la sécurité juridique du projet de donation. Aussi les conservateurs souhaitent-ils disposer de la possibilité de refuser une donation. Ce souhait a été relayé par plusieurs questions parlementaires.
Dans sa réponse, la ministre de la Culture et de la Communication - qui s'était déjà exprimée sur ce point en février dernier - confirme que "le conservateur doit s'assurer de l'accord des héritiers réservataires présomptifs sur le projet de don d'oeuvre qui lui serait généreusement proposé". C'est à partir de cette démarche qu'il peut émettre, à l'intention de la collectivité de rattachement du musée, un avis motivé sur le projet de donation. Mais il n'est pas seul à se prononcer ainsi, ce qui offre une garantie supplémentaire. En effet, depuis la loi du 4 janvier 2002 relative aux musées de France, "tous les projets d'acquisition, à titre onéreux ou gratuit, des musées de France doivent faire l'objet d'un avis de la commission régionale ou interrégionale d'acquisition territorialement compétente, animée par le directeur régional des affaires culturelles". Afin de mieux prendre en compte le contexte juridique de chaque projet de donation, le ministère de la Culture - via la direction des musées de France - va rappeler à tous les établissements la nécessité d'examiner systématiquement la réalité de l'accord des héritiers réservataires présomptifs lors de l'examen d'un projet de donation par le conservateur, puis par la commission régionale ou interrégionale d'acquisition.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence : Sénat, question écrite de Jean Besson, sénateur de la Drôme, et réponse de la ministre de la Culture et de la Communication (JO Sénat du 24 avril 2008).